Chapitre 8 Le nième cercle
L’historien allemand Julius Mader déclara à propos de Bergier : « Aucune torture n’a pu avoir raison de cet homme de fer ». En mars 1944, Bergier partit de Compiègne au camp de Neue Bremme en Sarre. C’était un camp « Rückkehr unwünschbar » (retour indésirable). Bergier n’aurait pas dû en sortir vivant car Neue Bremme était réservé aux ennemis numéro un du Reich comme le colonel de la Roque, fondateur des Croix de Feu engagé dans la Résistance. Il mourut dans le camp.
Bergier raconte qu’on les réveillait à 4 heures du matin et on les alignait dans la cour. On le fit sortir du rang pour l’obliger à tourner autour du bassin d’eau qui était le centre du camp, chargé d’une croix de bois nettement plus lourde que lui. Les prisonniers n’étaient nourris que d’une tartine avec de la margarine synthétique après quoi ils devaient courir autour du bassin. Bergier survécut grâce à une technique qui lui permettait de reculer dans le temps et de dormir six heures de plus. Il survécut aux supplices les plus variés et aux interrogatoires. Il promit la vie sauve et le passage aux Canada assuré aux Allemands qui se mettraient à son service. Aucun n’accepta alors c’est avec un vif plaisir que Bergier les fit fusiller à l’issue du procès de Rastatt.
Les gardiens ne pouvaient l’abattre car Bergier était interrogé par les services de renseignement allemands mais ils pouvaient le faire mourir de AKS (Allgemeine Kärpere Schwachness (faiblesse corporelle générale). A deux reprises les médecins le déclarèrent mort car il s’était évanoui et ne respirait plus mais il se réveilla avant qu’on l’enterre. Il survécut pour ne pas donner à ses gardiens le plaisir de sa mort. Bergier ignorait que l’Union de combat des Russes l’observait. C’était un groupe de Résistants. Bergier alla ensuite à Mauthausen avec une réputation qui lui servit beaucoup. Le camp de Neue Bremme était entouré de barbelés mais il n’y avait pas de murs et tout ce qui s’y passait était parfaitement visible d’une population qui n’y trouvait rien à redire. Pour survivre Bergier avait pensé à l’Enfer de Dante comme Primo Levi. Il fallait abandonner tout espoir pour vivre sans peur et sans illusions. Il ne fallait pas parler avec les démons (les gardiens). Bergier ne sut s’expliquer pourquoi Neue Bremme avait été permis. Il avait beaucoup lu, discuté avec des religieux mais ne trouva pas la réponse. Il pensa à la vengeance. Il pensa beaucoup à la possibilité de fabriquer une arme atomique qu’il aurait tant souhaité lâcher sur Berlin ou Sarrebrück. Il pensait que les camps japonais dépassaient en horreur ceux de l’Allemagne nazie. Et la justice des hommes avait été rendue. Lorsqu’il était à Mauthausen il avait parlé avec d’autres déportés et il avait remarqué qu’ils s’inventaient un passé absolument extraordinaire, où tous avaient été heureux et triomphants. A Neu Bremme, Bergeir inventa une théorie. Il commença par nier l’existence de traces d’événements passés dans le cerveau. L’existence de la mémoire reposerait sur un enregistrement dans le cerveau au niveau moléculaire. Il estimait que le cerveau est un ordinateur connaissant les lois naturelles et recalculant le passé à partir du présent. Pour Bergier, il n’est pas exclu qu’il y ait dans dans l’Histoire des grands trous parce que tous les « cerveaux ordinateurs », ayant subi la même perturbation, oublient les mêmes choses. C’est la thèse de Velikovsky sur l’amnésie collective.
L’existence de Bergier à Neue Bremme était teintée d’une certaine monotonie qui donnait l’impression d’une durée interminable. A Neue Bremme, Bergier pu constater que la mort n’avait aucune espèce de dignité, qu’un cadavre n’est pas plus sinistre ou dramatique qu’un billet de métro oblitéré. Après, Bergier ne croyait plus à une valeur quelconque de la souffrance qui n’apporte rien, ni moralement ni physiquement. Comme Primo Levi, Bergier fut marqué par l’odeur des camps et les mots étaient impuissants à en rendre compte.
Chapitre 9 : guerrier parmi les guerriers
Bergier arriva à Mauthausen le 2 avril 1944. Il contribua à son écroulement le 5 mai 1945. Bergier recueillit des confidences et des renseignements. Il obtint des informations sur les nouvelles armes allemandes, sur les trésors d’art volés en France avant qu’il n’émigrent vers la Suisse ou l’Amérique du Sud. Bergier fut interné au bloc n° 5 dont le chef était Hans, un prisonnier de droit commun. c’était un boxeur qui avait tué sa femme, l’amant de sa femme et trois policiers. Les prisonniers de droit commun commandaient les prisonniers politiques. Bergier affirme qu’il y avait dans les deux catégories de parfaits salauds et des hommes très bien. Hans donna à manger à Bergier et le félicita pour sa conduite à Neue Bremme. Bergier rencontra Franz Dalhem, ce héros de légende qui avait tenu tête à Hitler lors d’un meeting contradictoire. Il avait dirigé le PC allemand clandestin et résisté à toutes les tortures de la Gestapo depuis son arrestation en 1938. Il rencontra Octave Rabaté, révolutionnaire qui dirigea l’Humanité à partir de 1945. Bergier réalisa qu’il était devenu un homme parmi les hommes, un guerrier parmi les guerriers. Il dut travailler dans la carrière de Mauthausen. Il rencontra un représentant des services secrets soviétiques qui lui proposa de faire partie du Comité de résistance international de Mauthausen. Après la guerre un film et des livres rendirent hommage à Bergier en URSS.
On réveillait Bergier à 3 heures du matin pour lui apporter une liste de 1 500 ou 2 000 Français devant passer au crématoire à 6 heures. Il fallait pointer les noms sur la liste. Ainsi Bergier dut choisir des résistants à sauver. Il connut Guillaume Hoorockx qui fut arrêté en 1941 au tout début de l’affaire de l’Orchestre rouge. Il soigna des déportés et sauva des vies. Pourtant il n’était pas médecin mais éditeur d’art ! Hoorickx s’était fabriqué un diplôme de médecine tropicale qui lui aurait permis de partir pour le Congo belge et de continuer le combat. Mais il fut arrêté avant. Il put néanmoins emporter son faux diplôme à Mauthausen. Il avait réussi à duper les médecins allemands.
Un jour, Bergier rencontra un prisonnier politique qui déclara être un vrai SS. C’était un membre du Front noir d’Otto Strasser. Bergier devint le chef dans l’association clandestine. Ses assistants étaient Franz Dahlem et le général Gregory Fedorov qui devait plus tard succéder à Beria. Bergier réussit à fabriquer une radio et transmit des renseignements militaires à Londres. Il fournit la pièce à conviction qui condamna Goering : l’ordre écrit de sa main, de pendre 40 aviateurs Etats-uniens amenés à Mauthausen. Bergier vit également des témoins de Jéhovah qui s’étaient fait interner dans les camps pour témoigner de ce qu’ils auraient vu mais ils furent tués. Bergier organisa une révolte dans la nuit du 2 au 3 février 1945. Les révoltés étaient des officiers soviétiques. 40 réussirent à s’évader.
Le matin du 5 mai 1945, les SS s’étaient enfuis. Beriger réussit à retrouver Ziereis, le chef de Mauthausen et il le tua. A la libération du camp, Bergier réclama des livres et ainsi il put découvrir Lovecraft. Il ragagna la France en pyjama de déporté. Tout ce qu’il avait pu apprendre de la situation en France, ainsi que ses premières impressions, lui disaient qu’il avait commis la gaffe de sa vie en ne se faisant pas rapatrier en URSS. Mais il était trop tard.
Chapitre 10 : La guerre continue (1945)
Bergier n’aimait pas l’atmosphère de mépris diffusée par le pouvoir et le rationnement. Il ne pouvait retourner en URSS où il aurait été exécuté comme espion. A défaut d’autre chose, il s’occupa d’organiser le service secret d’espionnage extérieur français, la DGER. Il apprit que les Etats-uniens avaient fait sauter une bombe atomique sur une tour le 17 juillet 1945. Il en parla à de Gaille. Il lui demanda de créer un Commissariat à l’Energie Atomique et de nommer à sa tête Frédéric Joliot-Curie. Sur le plan médical, les meilleures autorités assuraient à Bergier qu’il ne lui restait que quelques jours à vivre. Sur le plan pécuniaire, il recevait une solde de colonel. Il continua la guerre. Les camps japonais, qui dépassèrent dans l’horreur leurs homologues allemands, n’avaient suscité aucune résistance passive ou spirituelle au Japon. De sorte que pour Bergier, le peuple japonais tout entier avait bien mérité Hiroshima et Nagazaki. Il dit au général Spaatz, commendant des escadres de bombardements états-uniennes qu’il était dommage que Berlin n’ait pas été détruite par la bombe atomique. Il lui répondit indigné : « Mon cher colonel Bergier ! Vous ne pouvez pas utiliser ça contre des Blancs ! »
Depuis le 1er août 1945, Bergier se promenait avec une bouteille d’uranium enrichi trouvée dans le coffre-fort d’une importante société métallurgique allemande, la Degussa. Si un seul neutron pénétrait dans la bouteille, Paris aurait pu être détruite. De Gaulle lui ordonna de rendre la bouteille. Bergier se remit à l’espionnage. Il s’aperçut que se dégageaient deux idées générales que les historiens et les sociologues paraissaient ne pas avoir traitées : l’hitlérisme n’avait pas seulement été un mouvement politique, mais d’abord et surtout une religion; l’espionnage était socialement plus important que ce que Bergier avait cru et ses réseaux constituaient l’approche d’un nouveau type de gouvernement, la cryptocratie, destiné dans l’avenir à remplacer aussi bien le capitalisme que le communisme.
Bergier était pauvre alors qu’il aurait pu s’enrichir en 1945 car des amis qu’il s’était faits dans le milieu, via la prison et le camp de concentration, lui proposèrent d’échanger une grande quantité de billets. Il aurait présenté cet argent comme appartenant à des résistants qu’il recherchait à l’Etat qui remplaçait les vieux billets par des nouveaux de même valeur pour taxer l’argent du marché noir. Bergier aurait pu gagner 500 millions de francs mais il refusa car il ne voulait pas gagner d’argent avec le sang de ses camarades. Il éprouva du chagrin en pensant au sort de tant d’êtres remarquables, morts quelquefois à la veille de la Libération ou même après. Il ressentit l’exil car il se sentait étranger en France. Alors il continua ses aventures : poursuite de criminel de guerre, recherche de secrets militaires allemands, espionnage et contre-espionnage. Il voyagea dans les pays de l’Est et vit, rue des Alchimistes, à Prague une porte qui selon la légende s’ouvrait sur le Schéol, l’enfer juif. Elle était verrouillée solidement et ni les nazis ni les communistes n’avaient osé la forcer. Bergier prétend qu’il avait ramené de Mauthausen deux pouvoirs paranormaux. Par un simple coup d’oeil, il pouvait lire sur un visage ce dont la personne avait faim. Cela lui était désagréable et il se débarrassa de ce pouvoir. Bergier savait aussi quand il était suivi. Ce n’était pas de la paranoïa car il était suivi par des agents de l’Est. Selon Bergier, les agents secrets auraient ce pouvoir. Il s’occupa du procès de Nuremberg, de la protection du tribunal, de la mise en forme des documents rassemblés par l’organisation des résistants à Mauthausen, la mise au point et la présentation des films pris par les SS ou les déportés après la libération de Mauthausen et la collecte des renseignements pouvant aider à la rédaction des actes d’accusation. En 1946, Bergier empêcha la France de basculer dans le camp communiste. Les communistes n’avaient pas d’armes mais les Polonais avaient laissé des dépôts d’armes en France. Leur emplacement était inconnu mais Bergier les retouva et put empêcher un soulèvement des communistes. En 1947, Bergier avait fondé, avec son ami Albert Mirlesse, une société « Recherche et industrie », groupe d’ingénieurs-conseils.
Chapitre 11 aventure indienne aux Etats-unis (1947)
Nehru pensa qu’en menaçant les sociétés pétrolières de produire de l’essence synthétique, il aurait des grandes chances de les voir découvrir rapidement du pétrole en Inde. Bergier fut chargé par le gouvernement indien d’établir un projet parfaitement réalisable d’essence synthétique. Puis on fit une abondante publicité autour l’affaire. L’Inde eut son pétrole. L’UNESCO fournit à Bergier les moyens de fonder en France l’Association des écrivains scientifiques. Bergier en fut exclu quand il voulut réfléchir à son compte.
En 1947, Bergier et Mirlesse allèrent aux Etats-Unis. Bergier désirait savoir ce qu’étaient devenues les littératures de science-fiction et de fantastique. A l’époque Mao marchait à la conquête de la Chine et Bergier, né en Russie, fut suspect aux Etats-Unis. Il fut interrogé par le FBI mais il faisait parti de l’OSS et on le laissa tranquille. Bergier refit connaissance avec ce peuple états-unien qu’il aimait tant. Il alla voir sa tante. Il rencontra des techniciens allemands dont le docteur Alberts mais aussi des Russes dont Ipatieff qui travaillait sur la pétrochimie. Bergier découvrit l’âge d’or de la science-fiction. Il existait 34 revue de science-fiction aux Etats-Unis. Cela donna à Bergier un intérêt supplémentaire à son existence. Il voulut rencontrer le grand écrivain Abraham Merritt mais il apprit qu’il était mort en 1943. Bergier le fit connaître en France. Il rencontra le grand poète Robert Frost. A New-York il fit la connaissance du plus grand auteur de science-fiction, John W. Campbelle. Il rencontra aussi Murra Leinster qui commença la science-fiction en 1919 mais il était peu apprécié en France parce que trop intelligent et que l’intelligence, dans ce pays, est une qualité que l’on n’aime guère. Bergier adorait Boston. Il demanda où se trouvait le cinéma à un policier qui le prit pour un Anglais !A Washington, Bergier visita la bibliothèque du Congrès. Il vit que les employés étaient très polis, ce qui change de notre Bibliothèque Nationale, et prodigieusement efficaces.
Chapitre 12 La très sainte alchimie (1948)
Dès 1948, Bergier avait pu assister à quelques expériences alchimiques, en pratiquer lui-même et donc se forger une opinion. En 1938, Helbronner lui demanda s’il s’intéressait à l’alchimie. Helbronner prétendit avoir appris l’alchimie aux Indes avec la société des Neuf Inconnus. Il n’avait pu les voir mais avait rencontré un « chela » un de leurs disciples. Helbronner amena Bergeir dans la banlieue parisienne. L’alchimiste que Bergier rencontra avait une quarantained’années. C’était Fulcanelli. Il dit à Bergier que les recherches étaient dangereuses car elles risquaient d’aboutir à des bombes atomiques. En 1945, Bergier voulut retrouver Fulcanelli mais il avait disparu. Bergier explique que l’alchimie apparut en Chine il y a plusieurs milliers d’années. Des moines chinois découvraient l’effort thérapeutique de l’or sur un certain nombre de maladies. Bergier croyait en la transmutation des métaux. Il disait qu’une réaction chimique pouvait agir sur le noyau. Bergier prétendait que la matière était transmutée mais l’expérimentateur également. Il passait à une condition surhumaine, à un état « d’homme après l’homme » qui nous serait supérieur comme nous le sommes aux grands singes. Fulcanelli paraissait avoir atteint cet état. En 1948, Bergier aurait réalisé une expérience avec des métaux et des sels. Avec ce mélange il aurait obtenu une croute laissant apparaître une surface métallique brillante ayant exactement la forme de notre galaxie avec ses satellites. Tout cela est évidemment farfelu mais prouve l’imagination débordante de Bergier. Bergier prétend avoir fabriqué de l’or à partir du Thallium. Il affirme avoir voulu entrer dans des groupes où on savait fabriquer des bombes atomiques sur un fourneau à gaz mais son admission fut refusée pour moralité insuffisante. Il dit qu’il existe des alchimistes au Maroc, aux Indes et en Tchécoslovaquie. Certains s’intéressent plus particulièrement aux applications médicales ou bien à la physique nucléaire. Bergier prétend que ce n’est qu’à partir de 1975 qu’il a été possible de décrire toute l’alchimie en termes scientifiques modernes.
Bergier commença ses travaux d’alchimie en 1948 dans une usine chimique pour les continuer ensuite dans une usine de matériel militaire. Bergier voulait présenter la pierre philosophale qu’il appelait « catalyseur Novale » à l’Académie mondiale des arts et des sciences. Il pensait qu’on n’intéresserait à l’alchimie les physiciens-mathématiciens qu’en leur offrant des possibilités de publication. Il comprit que l’alchimie était une forme de recherche d’une condition surhumaine et peut-être aussi une forme de mysticisme expérimental ayant réussi. Bergier affirme qu’il existe des immortels et que Roger Bacon était Ruggiero Boscovitch.
Chapitre 13 La lèpre, c’est très public (1959)
La profession d’ingénieur-conseil qui, de 1945 à 1953, avait permis à Jacques Bergier tant bien que mal, et plutôt mal, de gagner sa vie, disparaissait. Il se reconvertit dans le journalisme. Son ami André Ulmann le recommanda à « Constellation » où il commença vite à travailler et à bien gagner sa vie. Il y connut Starov qui avait été délégué du PC tchèque au Komintern et Mme Lecoutre, représentante de la Pologne au Komintern. Elle avait été violée par Staline. « Constellation » se vendait à 800 000 exemplaires. Mme Lecoutre était naïve et des rédacteurs lui présentèrent un Chinois famélique en lui faisant croire qu’il avait été secrétaire de Mao. Elle publia ses Mémoires. Elle avait des expressions surprenantes du genre : « Il faut faire un article sur la lèpre. La lèpre, c’est très public ». Les articles de « Constellation » étaient farfelus du genre : « Si l’Algérie perdait la France » ou sur les fusées françaises de Colomb-Béchar. Résultat, les espions du monde entier se présentèrent à Colomb-Béchar. Mme Lecoutre rêvait de démasquer Bergier. Car selon elle, Jacques Bergier avait un truc qui consistait à tout inventer ou à utiliser une équipe d’une cinquantaine de nègres. A l’époque, Bergier faisait des travaux expérimentaux sur l’homéopathie qui aboutirent à faire prendre en charge un certain nombre des médicaments homéopathiques par la sécurité sociale. Il annonça, dans Constellation, que des dilutions élevées de ginseng guérissaient l’impuissance masculine et l’éjaculation précoce. L’effet fut foudroyant, des milliers de lecteurs appelaient la rédaction pour remercier Bergier. Constellation commençait à couler et Bergier le sauva en écrivant un article sur Nostradamus. Un cinéaste voulut l’utiliser pour faire un film avec Pierre Fresnay dans le rôle de Nostradamus et Belmondo dans ceux des rois Henri. Mais Bergier lui demanda de l’argent et le cinéaste ne revint pas. Bergier inventa la vie de l’abbé Mélisse, le chef des chrétiens en Chine dont Mao avait peur. L’éditeur Julliard crut à cette blague et demanda la biographie complète. Elle fut publiée en 17 langues.
Chapitre 14 Rencontre avec Louis Pauwels (1959)
Lors de sa rencontre avec Louis Pauwels, en 1959, Bergier n’avait pas imaginé une seconde que cette rencontre puisse changer bien des vies, y compris la sienne et celle de Pauwels. C’est à ses études d’alchimiste que Bergier dut d’avoir fait la connaissance de l’alchimiste René Alleau qui lui présenta Pauwels. c’est la curiosité de Pauwels qui frappa Bergier. Pauwels venait de terminer « Monsieur Gurdjieff ». Ils voulaient écrire une étude d’ensemble sur les sociétés secrètes qui ne vit jamais le jour. Bergier voulut s’introduire dans des sociétés secrètes à Londres et à Paris mais il fut refoulé. La seule société réellement secrète dont Bergier pût parler avait existé dans l’ancienne Rome. Elle avait pour objet d’éliminer quiconque menaçait de dévoiler le vrai nom de Rome. De sorte qu’aujourd’hui encore ce mystère reste toal. Bergier se rendait chez Pauwels et ils passaient la journée à échanger des idées. Le lendemain, Pauwels se levait à 4 heures du matin et commençait à rédiger à partir de leurs conversations. La plus grande partie des dossiers de Bergier pour son travail avec Pauwels fut perdue. Lorsqu’ils furent à la recherche d’un titre Bergier proposa « Les Renseignements généraux », ce qui pouvait passer pour un trait d’humour mais risquait de conduire à des confusions. Bergier suggéra ensuite : « Le Graal et la galaxie » mais Gallimard refusa alors Pauwels trouva « Le Matin des magiciens ». Bergier travailla pour Gallimard. Il eut l’idée du « Rayon fantastique ». Il réalisa l’étude sur la science-fiction parue dans le volume Littérature III, de l’encyclopédie de la Pléiade. « Le Matin des magiciens » suscita de nombreuses réactions. Ainsi Jean Paulhan comme Raymond Queneau dirent à Bergier que s’ils avaient eu le manuscrit, il n’aurait été publié que sur leur cadavre. Un intégriste avait écrit un livre expliquant que Le Matin des magiciens fut dicté par Satan. Des communistes, puis des gauchistes publièrent des études tendant à montrer qu’il s’agissait d’une machination pour détourner le peuple français des vrais problèmes. Bergier estimait que le succès du livre venait du style de Pauwels. Bergier prétend que 92% des faits indiqués dans le Matin des magiciens sont exacts. Les 8% restants étaient non vérifiables car encore sous secret militaire. Bergier collabora avec Alain Resnais sur le film « l’année dernière à Marienbad » où l’on voit un homme rencontrer une femme avant qu’elle-même ne l’ait rencontré et « Je t’aime, je t’aime », l’histoire d’un voyageur du temps qui oscille autour d’une position, d’un instant qui est sa destination, avant de s’arrêter. Bergier évoque le réalisme fantastique. Le terme de « Réalisme fantastique » est dû à l’écrivain belge Frans Hellens. Il s’applique parfaitement à la démarche de Pauwels et Bergier.
Chapitre 15 « Le Matin des magiciens » (1961)
Le peintre et érudit tchèque Jaromib Skrivanek dit à Bergier qu’il avait eu l’impression que c’était lui qui parlait en lisant le Matin des magiciens. Le livre s’était vendu à deux millions d’exemplaires dans le monde et il avait été lu dans son intégralité à la radio tchèque. Bergier avait du mépris pour ceux qui dénigrèrent le livre. Il les traite de « résidus d’encrier » et d’ »illettrés de laboratoire ». En Californie une religion fut fondée par un dénommé Zartan basée sur le Matin des magiciens. Le Matin des magiciens est devenu matière à enseignement dans de nombreux pays. Bergier explique le succès du Matin des magiciens par le vide qui existait dans l’évocation de la science avec ferveur et poésie. L’autre raison du succès du livre fut sa présentation sérieuse et respectable par Gallimard. Le livre a fonctionné grâce au bouche à oreille. Bergier pense que le style de Pauwels a contribué également au succès du livre. L’un des apports du Matin des magiciens fut de souligner un certain nombre de choses parfaitement exactes comme le fait que la science n’est pas une collection de livres à jeter dès que l’on a passé l’examen. Bergier pense aussi que le succès du Matin des magiciens tient à un aspect religieux ou para-religieux. Le Matin des magiciens est venu rappeler que les religions révélées sont des religions à mystère. Bergier rappelle que les religions ont été brisées par le totalitarisme soviétique. On comprend alors que le Matin des magiciens, en France et en Europe, se soit heurté à l’hostilité de tous les partisans de la tyrannie, des néo-nazis aux staliniens. Bergier pense qu’il y avait deux grands livre à écrire. L’un d’eux devrait tenter de rendre manifeste le grand mystère de l’univers. Le deuxième livre, tout aussi nécessaire, mais à diffusion limitée, pourrait être édité à compte d’auteur. Il décrirait simplement en langage scientifique les faits indiscutables que les lois naturelles ne peuvent actuellement expliquer.
Chapitre 16 Mai 1968
Bergier était contre la révolte de mai 68. Il avait cette phrase radicale : « Pour la canaille, il faut la mitraille ». Il pensait que Pompidou avait laissé se produire des dégâts irréparables. Il considérait que l’université avait été totalement détruite. Pour lui, mai 68 c’était la révolte des imbéciles contre les intelligents, des incapables contre les capables, des perdants contre les gagnants. Bergier raconte des scènes folles comme des internés de Sainte-Anne qui étaient allés à la Sorbonne et qui cherchaient à soigner les gens à l’infirmerie ou des anciens OAS élus pour continuer la Révolution. Bergier, presque aveugle, s’était étalé sur une barricade et des journalistes d’Europe 1 lui demandaient ce qui lui était arrivé. Il fit une déclaration violente au nom d’un organisme qu’il avait créé avec Pierre Dac en 1934, « La Ligue de la matraque pour tous ». Dans un café, Bergier vit naître le fascisme, un commerçant et d’autres personnes sortirent leur revolver pour tuer tous ceux qui oseraient toucher à leur voiture. Bergier prétend que mai 68 n’était pas une insurrection organisée mais qu’on avait simplement fourni aux émeutiers de l’argent et de la drogue et qu’on les avait laissés se débrouiller. Il prétend que 10 millions de francs avaient été donnés chaque jour par un comité maoïste à Bruxelles.
En se mêlant aux émeutiers, Bergier avait été stupéfait de constater la haine qu’ils éprouvaient pour tout ce qui symbolisait la réussite. Il avait eu une idée folle, créer un journal intitulé « La Guerre civile » mais il n’en fit rien. Son but aurait été d’exciter tout le monde contre tout le monde. Bergier pensait que mai 68 ne se reproduirait pas car il prophétisait le départ d’Europe des Etats-uniens et que les Russes viendraient mettre de l’ordre.
Chapitre 17 Par-delà l’invisible frontière (1977)
Bergier évoque le cas d’un homme qui revint à la vie en Yougoslavie, en 1965 après avoir été déclaré cliniquement mort. Cet homme avait conservé des souvenirs de la période où il était mort comme ceux étudiés par le docteur Moody. Vers 1950, Bergier interrogea le physicien Coustal qui prétendait avoir régulièrement et à volonté connu l’expérience de la mort. Bergier prétend que quiconque se lance dans l’expérience du voyage astral court le risque de se voir atteint un jour par la maladie de Parkinson. Il évoque le clairvoyant Ingo Swann qui aurait déplacé, lors d’une projection hors du corps, une minuscule boule de métal refroidi. Le savant Henri Spindler pensait avoir démontré rigoureusement l’existence de la projection en astral, du voyage hors du corps. Pour Bergier, il y avait trois définitions de la magie. La première était poétique, la deuxième technologique, le terme magie désignant en ce cas le résidu technique de civilisations plus avancées que la nôtre et aujourd’hui disparues. La troisième, enfin, est la définition traditionnelle de la magie. Elle s’oppose à la science, sans espoir de réconciliation. Selon la science, nous sommes censés ne pas penser, mais disposer d’un programme fondé uniquement sur le hasard et la nécessité. Pour la magie, au contraire, non seulement l’intelligence et la volonté existent, mais nous nous trouvons tout en bas de l’échelle des êtres qui en son pourvus et qui, selon ses dires, coexisteraient avec nous dans le même espace et le même temps, mais à d’autres niveaux d’énergie.
En 1970, Bergier imagina pour le scénario du feuilleton « Les frontières du possible » un manuscrit qu’il attribua à de Vinci. Or ce manuscrit existait et il venait d’être volé à Turin. Son existence n’avait jamais été révélée. Bergier avait eu une vision. Vers 1950, Maurice Renault présenta à Bergier un médecin légiste qui avait accumulé des dossiers apportant la preuve de l’existence dans la société d’un petit nombre d’immortels changeant périodiquement d’identité. Ce sujet est traité dans le livre de Jacques Yonnet, « Enchantements sur Paris ». Il existerait en Allemagne une société d’alchimistes, fondée dans un passé très lointain, et qui aurait sauvé Goethe quand celui-ci fut condamné par les médecins. Cette société serait celle-là même qui a donné en 1880 l’autorisation de fonder la Golden Dawn.
Jacques Lantier avait raconté à Bergier qu’il avait vu au Tchad la résurrection d’un mort. Il en avait parlé au CNRS mais on l’envoya promener. Toutes ces histoires curieuses attiraient Bergier au point qu’il avait mentionné sur sa carte de visite « Amateur d’insolite et scribe des miracles ».
Chapitre 18 : Le plus tard possible
Les secrets professionnels et militaires auxquels Bergier était tenus ne l’autorisaient pas à parler des divers événements qui lui arrivèrent entre 1968 et 1977. Il participa au Grand jeu, à la lutte pour la possession du monde. Ce qu’il appréciait surtout dans la vie, c’était le singulier, l’unique. Il pense que n’importe qui aurait pu écrire ses livres sauf « Agents secrets contre armes secrètes » et que n’importe qui aurait pu découvrir le peu de choses qu’il avait trouvées en sciences. En revanche, ses aventures dans le domaine des services secrets ont été et sont encore absolument uniques. Il prétend avoir sauvé des milliers de vie en empêchant des attentats dans des lieux publics et il évita que des secrets français ne partent à l’étranger. Bergier prédisait une alliance russo-états-unienne, la balkanisation de la Chine et la création d’un nouvel empire en Afrique. La revue états-unienne Publisher’s weekly dit de Bergier : Bergier est cet oiseau rare : l’homme qui est à l’intérieur du milieu d’espionnage. Lisez-le et tremblez ! ».
Bergier pensait que les services secrets décidaient et étaient les gouvernements invisibles.
En 1976, Bergier apprit que les Etats-uniens avaient trouvé un moyen de transmettre la matière à distance sur un faisceau d’ondes de radio mais il ne le crut pas. Mais il crut qu’un sous-marin soviétique dont l’épave avait été repêchée par le navire Us Glomar Challenger n’avait pu l’être que grâce au médium Ingo Swann.