Une fois de plus - encore qu’il m’étonnerait fort que Nicolas Sarkozy n’ait jamais vu ou lu la pièce - il semble s’inspirer de William Shakespeare : «Beaucoup de bruit pour rien» ! Presque cinq mois d’insoutenable suspens… Pour les ministres en place et ceux qui aspiraient à être distingués, parce qu’autant dire qu’en ce qui me concerne et sans doute pas mal de Français sont dans le même cas, nous nous en fichions pas mal ! “foutu l’un, foutu l’autre”… Comment et en quoi serions-nous concernés par un remaniement ministériel de quelque importance qu’il fût ? Il ne fallait point être grand clerc pour subodorer que nous n’aurions rien de bon à en attendre : il s’agirait toujours de nous bouffer le maximum de laine sur le dos tout en préparant la seule échéance qui préoccupât Nicolas Sarkozy : 2012 et l’élection présidentielle. Il restait toutefois le spectacle, des plus réjouissant : intrigues et embrouilles, coups d’épée dans le dos, déclarations fracassantes, accu-sations et offres de service.
Nous devions comprendre qu’il se résignait à ne pas se succéder, les prétendants ne manquant pas… Fort de sa popularité au sein de l’UMP et parmi les députés de son parti, se préparait-il à d’autres combats - “en réserve de la République” comme naguère Georges Pompidou ? Certains lui prêtant même l’intention de se présenter en 2012 à l’élection présidentielle si Nicolas Sarkozy continuait de sombrer dans les sondages d’opinion…
Je ne saurais dire ce qui lui a fait changer son fusil d’épaule. Sans doute un faisceau de circonstances. Quelque «Apologie des membres et de l’estomac» ? digne d’un Ménénius Aggripa, lui faisant comprendre qu’il n’aurait rien à espérer pour l’avenir en restant à l’écart… Et l’irritation d’une très grande majorité au sein de l’UMP - du gouvernement aux parle-mentaires - devant les ridicules prétentions affichées par Jean-Louis Borloo – qui de surcroît n’est pas tout à fait “de la famille” : pièce rapportée du Parti radical - lequel se voyant déjà tellement en haut de l’affiche qu’il en oublia toute sagesse, retenue et précaution.
Bien d’autres avant lui en auront fait les frais. A commencer par Claude Allègre, candidat à un ministère à plusieurs reprises. Qui n’aurait pas renoncé, ce me semble à la lecture d’un article fort réjouissant de Nicolas Domenach sur Marianne2 Allègre premier au concours de carpettes sarkozystes (13 nov. 2010). Les déclarations d’autres lèche-bottes valent aussi leur pesant de cacahuètes. Sans doute aussi trop stupide pour comprendre que «l’ouverture» avait fait long feu… Le seul prétendu “socialiste” débauché en 2007 restant dans le nouveau gouvernement - Eric Besson – précisément parce qu’il n’est plus de gauche si jamais il l’a été quelque jour !
A contrario, Frédéric Lefebvre - naguère autant flingué en raison de sa nullité intrinsèque que pour avoir prétendu avant l’heure plusieurs fois faire partie des heureux promus – est enfin récompensé par un poste de secrétaire d’Etat au Commerce après avoir adopté le profit le plus bas possible : silence radio… Il est dommage qu’il n’ait pas hérité du poste de porte-parole du gouvernement. Nous eussions bien ri chaque semaine ! Nicolas Sarkozy n’a rien de tel à redouter de François Baroin, ex poulain de Jacques Chirac devenu semble-t-il sarkozyste et adepte de la parfaite langue de bois.
Soit. Mais, cela n’est pas tout. Il me semble que peu lui importait au fond qui serait le futur chef du gouvernement. L’objectif essentiel n’était-il pas dès cet instant de se débarrasser – dès que serait votée la réforme des retraites - de l’encombrant ex «Monsieur Parfait de l’UMP» qui semblait juste avant que n’éclatât l’affaire Bettencourt-Woerth (qui éclaboussait indirectement Nicolas Sarkozy) promis à un avenir encore plus prestigieux : 1er ministre en remplacement de François Fillon. C’est bien ce “scandale matriochka” et ses multiples rebondissements du feuilleton de l’été 2010 qui ont totalement ruiné la stratégie de Nicolas Sarkozy, l’obligeant à explorer toutes les pistes du remaniement. Lesquelles se sont avérées autant d’impasses.
Il faut en effet se souvenir que l’annonce du remaniement – même si son hypothèse flottait dans l’air depuis bien plus longtemps - eut lieu 15 jours après l’irruption de l’affaire Bettencourt-Woerth sur le devant de la scène médiatique, lors même que la contestation contre la réforme des retraites commençait à prendre quelque ampleur – quelque 2,5 millions de manifestants le 24 juin 2010 – en même temps que fusaient les quolibets contre Liliane Bête en Cour et Eric Woerth – ministre du Travail en charge de la réforme des retraites. Nicolas Sarkozy étant largement associé sur les pancartes au fiasco de l’Equipe de France de football au Mondial : la comparaison avec Raymond Domenech n’ayant rien de flatteur ! N’ayons garde d’oublier que le même jour il reçut Thierry Henry, à peine descendu de l’avion qui le ramenait de l’épopée malheureuse des Bleus en Afrique du Sud… Nicolas Sarkozy possède à l’évidence le sens des priorités !
Remarquons que cela n’a pas patté en route : à peine Eric Woerth n’est-il plus protégé par son statut de ministre – qui contrairement à celui du président de la République n’empêche pas qu’il puisse être poursuivi pendant qu’il est en fonction – que la Cour de cassation reprend la procédure envisagée depuis déjà quelques semaines visant à le faire comparaître éventuellement devant la Cour de justice pour les malversations supposées dans la vente de 54 hectares de la forêt domaniale de Compiègne à l’hippodrome de Compiègne pour 1/10° de son prix.
Que Nicolas Sarkozy ait vraisemblablement eu la tentation de se débarrasser d’un premier ministre qui lui faisait quelque ombrage par une cote de popularité plus importante que la sienne depuis belle heurette, quand bien eût-elle commencé à s’effondrer également, est une chose. Qu’il ait envisagé plusieurs hypothèses quant à son remplacement, tout aussi assuré.
François Fillon s’est imposé pour se succéder à lui-même. Sans doute le choix sans risque de la continuité. Je suis néanmoins persuadée qu’il faut faire litière des élucubrations de certains journalistes selon lesquels Fillon deviendrait un «hyper-premier ministre» à la tête d’une équipe de grognards (RTL, 15 nov. 2010) face à un Sarkozy affaibli qui serait dès lors obligé de composer. Lequel n’aurait nullement apprécié la Une de Libération du 14 novembre 2010 : «Fillon garde Sarkozy»
Je me demande aussi comment un journaliste du Monde - heureusement anonyme - a pu commettre un titre aussi stupide : François Fillon, un gaulliste social à Matignon ? Porte-folio résumant sa carrière, de la Sarthe à Matignon. Je croyais cette fable de Fillon à l’aile gauche du RPR enterrée depuis longtemps. Ni gaulliste – arriviste ! - ni moins encore social… Aussi “à droite toute” que Sarkozy mais dans un registre soft. Il suffit de penser à sa réforme des retraites en 2003. Comment également oublier – il l’a rappelé récemment - qu’il fut le véritable auteur du programme de Sarkozy ? Confusion lamentable avec son véritable mentor : Philippe Seguin qui a dû se retourner dans sa tombe avec la réforme des retraites.
Plus amusant encore le titre de l’article de Jean-Noël Guénod (Tribune de Genève du 13 nov. 2010) Comment «Droopy» Fillon est devenu pitbull qui constatait avant l’annonce de la composition du gouvernement que «Le premier ministre François Fillon semble bien parti pour se succéder à lui-même, ce qui réduirait la bombe que voulait lancer Nicolas Sarkozy à un pétard mouillé par cette pluie qui ne cesse de cribler Paris depuis une semaine. Le président français ne s’attendait sans doute pas à ce retournement de situation, lui qui distillait fuites et phrases pour faire miroiter aux uns et aux autres une possible nomination à Matignon. Ce qui a provoqué un concours de danse du ventre de la part de ses ministres, amusant certes, mais dévastateur pour la cohésion de sa majorité»…
L’analyse de la situation que fait Jean-Noël Guénod quelques jours avant l’annonce du remaniement est très pertinente. Non seulement quant à l’avenir politique de Jean-François Borloo : «Si François Fillon est reconduit à la tête du gouvernement, il sera le grand perdant de ce psychodrame. L’actuel ministre d’Etat radical, donné encore favori pour Matignon au début du mois, risque fort de refuser un poste ministériel, préférant s’investir pour l’élection de 2012 en fédérant les divers courants centristes».
C’est exactement ce qui s’est passé – Jean-Louis Borloo ayant refusé, après avoir dit-on longuement hésité, toutes les propositions de Nicolas Sarkozy : Affaires étrangères, Justice et «même un vaste ministère regroupant l’emploi, le redéploiement industriel et un autre morceau de ce ministère de l’économie» lis-je sous la plume de Raphaëlle Bacqué dans Le Monde du 15 nov. 2010 L’amertume du “zozo” Borloo… C’était premier ministre ou rien ! Ego à l’évidence sur-dimensionné relativement à ses capacités réelles : n’a-t-il pas ruiné toutes ses chances aux yeux de Sarkozy par son incurie lors de la grève des raffineries ? Qui ne peut le moins ne pourra le plus.
«Je ne pouvais me contenter d’un truc excentré»… Il en profite pour tacler Fillon : «Le plus souvent, j’ai accompli mes réformes malgré François Fillon. Il fut presque toujours mon principal opposant». Oubliant à l’évidence un certain… Nicolas Sarkozy qui se contrefiche en réalité de l’écologie, n’hésitant pas à déclarer le 6 mars 2010 au Salon de l’Agriculture : «L’environnement ça commence à bien faire» ! Ou Sarko l’UM/Posteur…
Jusque dans la dernière ligne droite, les partisans de Jean-Louis Borloo ont continué d’espérer : ils estimaient que le chef de l’Etat ne laisserait pas M. Fillon, «qui a tout fait pour le plomber, continuer à faire sa popularité sur sa couenne»… Ils en sont pour leurs frais. Quant à l’élection présidentielle, nous savons que précisément Jean-Louis Borloo – qui avait fait planer la menace d’une candidature en 2012 pour évincer François Fillon – n’a pas renoncé à fédérer les centristes.
Il est même aidé dans cette entreprise par Jean-Pierre Raffarin, opposant notoire à la politique poursuivie par Nicolas Sarkozy et qui de surcroît ne s’entend pas avec François Fillon. Ce n’est sans doute pas pour rien que son fidèle lieutenant en Poitou-Charentes, Dominique Bussereau avait depuis longtemps annoncé qu’il quitterait le gouvernement. Réussiront-ils à rassembler pour autant toutes les familles centristes, des partisans de Borloo à ceux de Bayrou ? Rien n’est moins sûr.
Il est d’ailleurs trop tôt pour savoir si l’ambitieux et méprisant Hervé Morin, patron du Nouveau Centre – qui ne s’attendait certainement pas à faire partie de la charrette des sortants ! – renoncera à se présenter en 2012 comme il en a exprimé l’intention à plusieurs reprises. Il ne s’est pas privé de dénoncer un casting façon «équipe de campagne» «proche du RPR». Marc-Philippe Daubresse a préféré suivre Jean-Louis Borloo par solidarité. Quant à Valérie Létard, elle n’a pas été reconduite. Il faut ajouter un autre “sorti” : Jean-Marie Bockel – «docile jusqu’au bout» et auquel l’Elysée avait imaginé de confier le Haut commissariat à l’intégration comme lot de consolation lis-je sur sous la plume de Laureline Dupont Borloo le rebelle futur rateau de Sarko ? (Marianne 16 novembre 2010) - qui rallierait Borloo avec sa microscopique «Gauche moderne» si tant est qu’il ait été socialiste sauf sur le papier.
Bon débarras au demeurant : n’est-il pas celui qui veut repérer les délinquants “dès 2 ou 3 ans” (L’Express du 3 nov. 2010). Tentation récurrente de la droite depuis une trentaine d’années : ficher les gamins en difficulté dès la plus tendre enfance. Ce qu’enseignants, éducateurs et personnels des services sociaux ont toujours refusé avec la dernière énergie. Je ne sais plus comment s’appelait le dispositif imaginé à la fin des années 70 mais il procédait de la même démarche. Doit-on le cataloguer à “l’extrême centre” ?
Je ne sais quel crédit il faut accorder à l’hypothèse pour le moins machiavélique de Laureline Dupont : «Et si cette coordination des centres n’était que la volonté du prince ? En mettant en travers de la route de Bayrou et Villepin un troisième candidat, représentant d’une alternative centriste, Sarkozy espère peut-être affaiblir ses adversaires et s’offrir en prime la possibilité d’une réserve de voix pour le second tour»… C’est oublier que Jean-Louis Borloo se sent gravement humilié de n’avoir pas eu le poste de François Fillon.
Pour mémoire, cette hypothèse avait été envisagée par l’Elysée en avril dernier après l’échec des élections régionales Jean-Louis Borloo, sauveur de Nicolas Sarkozy pour 2012 ? (20 minutes du 15 avril 2010) et Le Figaro du 14 avril 2012 Jean-Louis Borloo face au casse-tête de 2012, le sous-titre donnant le ton : «Dans la majorité, une candidature au premier tour du ministre de l’Écologie est évoquée comme un moyen de faire gagner Nicolas Sarkozy au second» avec la création d’un parti centriste et écologique. Force étant tout de même de constater que depuis les mouches ont encore plus changé d’âne et qu’à défaut d’infliger un râteau à Nicolas Sarkozy, Laureline Dupont ironise : «Borloo et Morin ont plus le profil d’un ramasse-miettes»…
«Pour la première fois, Fillon a retourné en sa faveur le rapport de force avec le président. Naguère encore, l’image qu’il offrait était celle du chien de Tex Avery, «Droopy» poursuit Jean-Noël Guénod. Mais comme dans le dessin animé, le gentil «Droopy» Fillon est devenu pittbull. Le premier ministre se voit singulièrement conforté par un sondage qui paraît aujourd’hui dans Marianne. Il l’emporterait au second tour de la présidentielle de 2012 contre Martine Aubry, alors que Nicolas Sarkozy serait, lui, battu par la même adversaire».
Sans doute une candidature de Borloo en 2012 «pourrait provoquer un éparpillement des voix du centre et de la droite nuisible à Sarkozy. Borloo dispose donc d’un certain pouvoir de nuisance à l’endroit du président. Toutefois, celui de François Fillon reste incomparablement plus élevé. Sarkozy doit donc le ménager, de préférence au chef du Parti radical».
Ce sera encore bien plus marrant à suivre si au premier tour de la présidentielle l’on voit des candidatures multiples au centre et à droite : déjà Christine Boutin n’exclut pas de se présenter. L’on peut parier sur François Bayrou, Dominique de Villepin et très certainement Nicolas Dupont-Aignan. Jean-Louis Borloo et Hervé Morin se tirant la bourre… Si l’on y ajoute Marine Le Pen dont il m’étonnerait fort qu’elle ne se présentât point (l’hypothèse d’un possible rapprochement avec l’UMP, souhaité par certains membres du parti majoritaire et une frange de l’électorat FN ayant fait long feu, ce me semble) nous nous retrouverions avec, pour la droite – pléthore de candidats - un scénario proche de 2002… Ce que redoute le plus Nicolas Sarkozy : un 22 avril à l’envers… Ce qui serait trop drôle.
Certes, François Fillon a gagné des points «En prenant discrètement le contre-pied de Nicolas Sarkozy, opposant le calme de l’homme réfléchi à l’hyperactif président, soignant les bleus à l’âme des députés UMP rendus inquiets par l’impopularité de l’Elysée, offrant l’image de la continuité aux moments les plus bouillonnants de la rupture sarkozyste (…) il a donc rassuré le peuple de droite déboussolé par ce résident de la banlieue chic de Paris, mal à l’aise lorsqu’il s’agit de porter ses escarpins dans la glèbe de la France profonde (…) et lorsque Sarkozy a commis l’erreur d’annoncer trop tôt le remaniement gouvernemental, Fillon a laissé vibrionner les ambitions, avant de descendre en flamme la candidature de Jean-Louis Borloo, devenu son principal concurrent, et se poser en recours».
Cela est vrai mais faut-il en conclure pour autant que Nicolas Sarkozy aurait fait amende honorable à Canossa ou ailleurs et laissera désormais François Fillon gouverner ? Certes, l’image d’un «Droppy lent, mélancolique et avalant sans broncher les couleuvres que lui prescrivait Nicolas Sarkozy» se transformant «en un pitbull plus mordant qu’aboyeur» est d’autant plus séduisante que selon un sondage récent – paru dans Marianne – François Fillon «l’emporterait au second tour de la présidentielle».
Néanmoins, la meilleure preuve que Nicolas Sarkozy n’entend nullement s’effacer derrière son premier ministre et lui laisser le champ libre pour mener sa politique à son gré ? Déjà le simple fait qu’il ait lui-même consulté en vue du remaniement (dépêche AFP, 14 nov. 2010). Contrairement à la tradition de la Ve République qui voulait que ce fût le 1er ministre qui consultât, proposant des noms au Chef de l’Etat, libre ensuite à lui de les agréer ou non, d’où de fréquents déplacements entre Matignon et l’Elysée pour le plus grand intérêt des journalistes à l’affût.
Emission que je me suis bien gardée de suivre, n’étant nullement maso : il m’insupporte toujours autant. Juste cette réponse – entendue le lendemain matin sur France Info - à la question de savoir s’il serait candidat en 2012 et quand il se déclarerait. Pour noter qu’il commet exactement la même erreur de français qu’une autre fois : «quelque part à l’automne 2011»… Préposition de lieu au lieu de temps.
Qu’il arrête aussi de nous prendre pour de parfaits imbéciles. Tout le monde sait bien qu’il y pense sûrement non seulement en se rasant mais toute la journée sinon en dormant. Que les services de l’Elysée sont mobilisés pour cela – les affaires de la France peuvent bien attendre ! – et que le nouveau gouvernement, resserré et presque exclusivement composé de valeurs sûres de l’ex RPR est constitué dans ce seul but. Marianne ne s’y est pas trompé en donnant la liste de La nouvelle équipe (gouvernementale) de campagne…
Selon Le Figaro du 17 nov. 2010 Sarkozy exige une «unité sans faille» de ses ministres sous l’auspice de la devise bien connue attribuée aux Mousquetaires de Dumas : «Un pour tous et tous pour un» qui devrait leur tenir de «feuille de route politique»… Point n’est besoin de se demander qui est “l’Un”… Se prendrait-il désormais pour Dieu le Père ? Wait and see. Les précédentes équipes gouvernementales, certes plus hétéroclites politiquement, nous ayant tellement habitués aux “COUAC ! COUAC !” et autres bisbilles ou tacles assassins. Les ministres restant au demeurant des êtres humains qui n’ont pas forcément d’atomes crochus entre eux. Chassez le naturel… A suivre dans Le Canard Enchaîné.
Quoi qu’en puisse dire dans le même sens Olivier Biffaud dans Le Monde du 15 nov. 2010 Un gouvernement électoral pour un président affaibli… S’il est en mauvaise posture c’est bien plus sûrement sur le plan des sondages. Quand bien même ferait-il les pieds aux murs ou n’importe quel autre exercice du même style. Ce remaniement dont il attendait une embellie se termine à l’évidence une fois de plus en «eau de boudin» et nous savons que par ailleurs il mise sur la présidence du G20 pour se redorer la pilule…
La fera-t-il avaler aux Français lors même que nous savons aujourd’hui qu’il n’a aucunement l’intention de remettre en cause les dérives de la finance internationale ? Bien au contraire et je vous engage à lire l’article de Philippe Cohen et Emmanuel Lévy sur Marianne2 Nicolas Sarkozy: je ne vous ai pas compris et ça n’est pas fini ! (16 novembre 2010) qui constatent avec justesse que si Nicolas Sarkozy justifie l’alignement fiscal sur l’Allemagne en affirmant «parce que j’en ai assez de la délocalisation» il commet une magistrale erreur : les entreprises françaises ne délocalisent sûrement pas la production vers l’Allemagne mais bien dans les pays – Asie ou Europe de l’Est - où la main d’œuvre est peu chère, la protection sociale quasi inexistante. En revanche, l’Allemagne nous pique force parts de marché pour la simple et seule raison qu’elle a conservé son industrie au maximum, notamment du fait de sa spécialisation dans les bien d’équipement industriels.
Quant à faire croire qu’il sera «le roi du monde» chargé de mettre fin au désordre monétaire mondial par un quelconque nouveau «Bretton Woods», soit il travaille encore plus du chapeau qu’on ne le supposait jusqu’alors soit il nous prend une fois de plus pour de parfaits cons. Hypothèse la plus vraisemblable. Sinon, il devrait s’opposer à son nouvel ami – Hu Jintao – en l’obligeant à réévaluer le yuan et développer la consommation intérieure «au lieu d’accumuler des excédents commerciaux au détriment de l’industrie de leurs partenaires». Or, tel n’est pas le cas si l’on se réfère au discours qu’il tint dernièrement à Séoul lors de son discours inaugural de sa présidence du G20. Bien au contraire : «Nicolas Sarkozy a l’intention de laisser la folie néolibérale et libre-échangiste - moyennant quelques miettes pour l’Afrique - suivre son cours et risquer de nous entrainer vers de nouvelles turbulences». CQFD. Certains lui prêtent même l’espoir d’une grave crise financière qui lui permettrait d’apparaître en sauveur…
Quant à être “roi” - je suis certaine qu’il se rêve bien plutôt “empereur” et qu’il n’hésiterait point à l’image de Napoléon (peint par David) à se saisir de la couronne pour se la placer lui-même sur le chef… contrairement à Charlemagne qui fut sacré quasi à “l’insu de son plein gré” : il priait tête baissée dans une église romaine lorsque quelqu’un lui mit la couronne sur la tête - il faudrait encore lui rappeller que “l’exactitude est la politesse des rois”…
J’ai lu récemment sur un blog du Monde - Ethique et affaires - tenu par un spécialiste des questions économiques internationales - Georges Ugeux, banquier d’affaires - qu’il insupporte toujours plus ses pairs de la communauté internationale Monsieur Sarkozy, il est temps de renoncer à être le garçon mal élevé de la scène internationale : il vient de rajouter une couche à son UM/Politesse traditionnelle, en arrivant une journée après l’inauguration du G20 de Séoul et repartant sans même assister au dîner de clôture, lors même qu’il prend en mains les destinées de ce G20 pour un an ! Grave manquement à l’étiquette diplomatique…
D’ailleurs, Nicolas Sarkozy n’aurait nullement convaincu les Français (Flash Actu du Figaro, 17 nov. 2010) : 64% des personnes interrogées répondent “pas convaincant”, contre 36% “convaincant”… Il reste donc dans les mêmes eaux que les récents sondages d’opinion. Ni le remaniement ni son intervention télévisée n’ayant eu d’influence.
Il y a belle heurette que ce qu’il espère être des électrochocs n’a plus aucune espèce d’influence pour redresser la courbe défaillante des sondages. L’électroencéphalogramme restant désespérément raplapla. Non seulement, 53 % des sondés l’ont perçu – évidemment avec raison - «comme un président en campagne» mais ils sont 71 % à souhaiter qu’à l’avenir «le président intervienne moins sur les dossiers du quotidien, et qu’il laisse plus d’autonomie au premier ministre François Fillon (84%)»… Si ce n’est pas un désaveu pur et simple de la saturation hyper médiatique de Nicolas Sarkozy, qu’est ce donc ?
Enfin, pour rester dans la veine shakespearienne : «les joyeuses commères de Windsor l’UMP» pourront faire la gueule : 9 femmes sur 30 ! La «fable» de la mixité hommes-femmes aura eu la vie moins longue que celle du Karachigate qui revient aujourd’hui sur le devant de la scène avec une nouvelle déclaration de Charles Millon devant le juge Renaud Van Ruymbeke confirmant l’existence de rétrocommissions (Le Monde du 17 nov. 2010) qui nous donnera encore quelque grain à moudre… et bien sûr ! toujours trop de travail.
Quand bien même remarquerais-je une fois de plus que cela ne nous apprend rien de nouveau depuis les révélations du feuilleton de l’été 2009 : les faits, les protagonistes, les comptes off shore et toutes les embrouilles dignes d’un thriller financiaro-politico-barbouzesque sont exactement les mêmes. Idem une enquête menée par la police luxembourgeoise en mars et juin 2010. Simple confirmation.
Le pouvoir vient de prendre une nouvelle baffe de la Cour de cassation avec le dépaysement des dossiers d’instruction des affaires Bettencourt à Bordeaux alors qu’à l’évidence il souhaitait que ce fût dans le ressort de la Cour d’appel de Paris. Il ne lui resterait plus qu’à “dépayser” un procureur – Courroye ou Marin – à Bordeaux ou à changer de procureur là-bas… mais la ficelle serait vraiment trop grosse ! Autre déconvenue : La demande de mise sous tutelle de Liliane Bettencourt sera examinée…
Enfin ! Je note toutefois que si la juge des tutelles de Courbevoie a décidé - conformément à l’avis du parquet – que la troisième ! demande de mise sous tutelle formulée par Françoise Meyers-Bettencourt était «recevable» - véritable changement de pied ! – et méritait d’être examinée, elle n’a pour autant pris dans l’immédiat aucune mesure contraignante… Il risque donc de couler encore beaucoup d’eau «sous le Pont Mirabeau»…