C’est en allant m’éclater
La tête contre un mur
Que j’ai vus couler,
En fines rainures
Un liquide bizarre
Sans couleur ni odeurs
D’un petit trou dans mon crâne
Que j’avais pas tout à l’heure
Et ça fait Paf paf paf
La cervelle joue au milkshake
Clac clac clac
Plus que de la purée dans la tête
Le mur ne m’a rien dit
Parce que les murs n’ont qu’des oreilles
Le mur est rester muet
Muré dans ses groseilles
Il était tout couvert de lierre
Rampant sur sa colonne
Infiltré dans tous les pores
De sa peau de pierre
C’était un beau mur naturel
C’est pour ça que je l’ai choisi
Pour aller me faire tout le mal
Que j’avais pas envie
Et ça fait Clac clac clac
Encore trois petits coups
Crac crac crac
Et je ne sentiras plus rien du tout...
Le petit trou dans mon crâne
S’est changé en fossé
D’ou on voit tous les cadavres
De mes vieilles idées
Des tas de petits corps
Empilé pêle-mêle
Emmêlé de leurs torts
Aux blessures cruelles
Des mauvaise idées à la con
J’en ai eu des tonnes
De quoi refaire toutes les colonnes
Du fronton du parthénon
Elles ne sont jamais parties
Elles sont juste mortes
Quand je les aient tué
Pour éviter que tu partes
T’es partis quand même
Avec une autre fille
Qu’aimait moins les murs
Et les fosses communes à idée
Qui préférait la nature
Et les cours de récré
Me voilà au pied de la crevasse
Qui traverse mon crâne
Comme le fleuve Amour
Zig zag dans la taïga
Au pied de ma crevasse il fait aussi froid
Que sur les flancs du fleuve
Le fleuve est immobile
Figé par la glace
Raide... comme la colonne vertébrale
De ma grand-mère
Depuis qu’elle est tomber
Sans le faire exprès.
Au pied du fleuve, de ma fosse
Ou du chevet de ma grand-mère
Je regarde des petits tas de choses,
Des tas de corps morts
Bleu, jaunie, verdâtre,
Et au milieu un joli corps tout rose
Que je connais très bien.
Puisque ce corps-là c’est le tien.
Et à l’époque ça faisait :
Tu m’as aimé, je t’ai aimé,
Avec nos tête, avec nos corps
Je t’ai lassé, tu m’as quitté
Avec tes mots, puis avec tes pieds
Je t’ai pas oublié, tu t’es guéris
Avec des rires, avec des filles
Je t’ai haïs, je t’ai tué
Avec mon coeur, avec mon pistolet
Mon pistolet à fleur.
Je te vois encore si brillant
Alors que je t’ai tué il y a si longtemps
Je me souviens
Je t’avais mis contre mur
Nu et tremblant dans ta chaire
Tu cherchais autour de toi sans me voir
Et puis j’avais procédé à ton exécution sommaire
Dans la fraîcheur du matin,
Au couchant du soleil
Tu t’es étendu au sol
Et j’ai glissé à ton oreille
Mes derniers mots de nacre
Fragile coquillage...
Fracassés contre ton tympan
Aussi sourd qu’une oreille de mur
Muré dans les merveilles
Des mots des filles à la nature
Qui te décolle les pieds du plancher, qui t’envole
Qui t’ouvre toutes les portes avec des clés de sol
Retour au pied du mur,
De la fosse, du chevet de ma grand mère
Retour à ma tête contre le mur de pierre
Un beau mur naturel
Que j’ai choisis pour ça...
Le long du mur le lierre rampe toujours
Entre mes doigts s’échappe encore le fleuve Amour
Et ça fait... Clac clac clac
Encore trois coup
Crac crac crac
Et je sentirais plus rien du tout.