l'embusqué

Par Richard Gonzalez

(Tarente - Tarentola mauritanica, L'Escala, Espagne, le 7 avril 07)

Dans les vieilles blessures des murailles, sous les aisselles des portiques, la Tarente se blottit mollement. Que tombe le soir et l'épineux lézard se dégage alors de sa torpeur et se transforme en chasseur de phalènes agile et rusé. Equipé de doigts adhésifs, il peut courir après ses proies sur des parois toutes lisses. J'en ai vu les nuits d'été dans les villages du Midi, collés aux cadrans lumineux des horloges des églises, jouer entre les aiguilles. Les Tarentes courent encore sur le soleil de mon enfance. Je m'amusais à essayer de les attraper sur les murs des cabanes des chevriers, quand celles-ci parsemaient le maquis catalan. Pareil aux petits monstres de la préhistoire, l'animal a de quoi fasciner tous les enfants du monde. En Malaisie, j'ai vu des gamins de huit ou dix ans faire la même chose, les poches pleines de petits geckos grouillants.

[Des lois européennes interdisent depuis une quinzaine d'années la capture et le transport des reptiles - et des amphibiens, têtards compris. C'est bien. Mais en privant les enfants des joies de ces chasses innocentes, je me demande si on ne les éloigne pas trop de la Nature.]