Quatre ans, dix mois et seize jours … Cela fait quatre ans, dix mois et seize jours que Pascal n’a pas pris de vacances. Quatre ans, dix mois et seize jours … ce qui équivaut à une scolarité entière à l’école primaire, à cinq saisons de votre série préférée, à l’espérance de vie d’une abeille ou d’un hippocampe (!), presque un mandat présidentiel. Quatre ans, dix mois et seize jours.
Il s’est passé bien des choses dans sa vie depuis sa dernière période de repos
- il a changé de travail en intégrant une grande société d’informatique,
- il a petit à petit monté les échelons si bien qu’il est maintenant directeur d’une filiale,
- il a assisté à ses premières réunions, à ses premières conférences, à ses premiers meetings,
- il a rencontré l’amour,
- il s’est marié … c’était un samedi ensoleillé du mois de mai … et pour le voyage de noces, il a dû être reporté à la dernière minute, hélas !
- il a consécutivement eu deux enfants, deux petites têtes blondes dont il aimerait profiter un peu plus, la semaine, alors qu’il rentre du travail et trouve sa maison déjà endormie,
- et bien d’autres choses encore …
Quatre ans, dix mois et seize jours … sa femme et ses chérubins sont déjà sur place depuis plusieurs jours : une petite propriété louée en Corse, dans un trou paumé, pas de réseau pour le téléphone portable, pas de commerce alentour, rien, à par un petit village typique et la mer … la tranquillité, le bonheur !
Pascal s’est levé tôt, ce matin. Depuis Paris, il a pris un train jusqu’à Nice. Un ferry l’y attend pour traverser la Méditerranée, et lui permettre de rejoindre sa petite famille sur l’Ile de Beauté.
La traversée est un pur régal … jusqu’à la nuit tombée ! Une fois la lune bien haute dans le ciel, Pascal, comme les autres voyageurs, monte sur le pont pour observer le ciel étoilé. Son bagage toujours avec lui (simple précaution …), il observe toutes les lucioles au-dessus de sa caboche. Quelques secondes plus tard, la foule grossit, sur le pont. Elle grossit tellement que Pascal est écrasé contre la rembarre. En tentant de se dégager, un pied vient se heurter sa valise … qui passe littéralement par dessus bord, et finie dans l’eau.
Le lendemain, après avoir passé plusieurs heures à parlementer avec le capitaine du ferry, capitaine qui n’a, finalement, été d’aucune aide, Pascal arrive en Corse. Il vérifie le contenu de ses poches : son portefeuille, son téléphone portable, et juste de quoi payer en taxi le trajet jusqu’à la villa qu’il a loué pour les quinze prochains jours …
Il tente de téléphoner à son épouse, en vain (pas de réseau !). Quatre ans, dix mois et seize heures … trop longtemps qu’il attend ça, et ce n’est pas la perte de ses vêtements qui va tout ruiner ! Non !
Pascal cherche de longues minutes un véhicule susceptible de l’emmener à bon port. Et manifestement, ce n’est pas chose aisé. Ici, on lui dit que la destination est trop éloignée. Là, on lui annonce qu’il faut revenir plus tard, dans plusieurs heures. Heureusement, le 15e taxi hélé est le bon !
En chemin, notre homme discute avec son conducteur. Celui-ci lui prodigue quelques conseils au vacancier, et lui recommande telle et telle ballade … Hélas, trop absorbé par la conversation, Joe le Taxi manque de percuter un fermier et son troupeau de chèvres. Il pile, les pneus crissent, la voiture devient incontrôlable et vient bientôt s’encastrer dans un arbre. Plus de peur que de mal … à ceci près qu’un nid de guêpes a été réveillé (et énervé) par l’impact.
Le conducteur sort en trombe du véhicule, en agitant les mains au-dessus de son visage, comme pour se protéger d’éventuelles piqures. Par réflexe, Pascal le suit, en mimant ses gestes. Le premier, entre deux aïe, se jette dans une marre de boue, remède ultime contre les attaques de guêpes et de frelons. Pascal le suit et plonge tête baissée dans la marre.
Ses vêtements, ses uniques vêtements, sont souillés, et importables. Il se retrouve presque nu, et, alors qu’il râle, qu’il crie, et s’énerve, il se confectionne pour l’occasion un cache-sexe avec un morceau de tissu … parce qu’il le faut !
Quatre ans, dix mois et seize jours … pour ça ! La voiture, hors d’état de marche, oblige Pascal à aller, à pieds, dans le village le plus proche … à la vue de ce gringalet en tenue aussi légère qu’improbable, les habitants prennent peur, et appellent la police.
Son premier jour de vacances, Pascal le passe en garde à vue. Ce qui est sans compter l’inquiétude que doit éprouver sa famille, ni la honte qu’il ressent, ni les vacances - sans affaire - qu’il va devoir passer, ni son exclusion de la villa qu’il a loué (le propriétaire n’aimant pas, pour reprendre ses termes, les originaux, et étant hermétique à toute explication !) …
C’est la loose … S’il avait connu e-loue.com, Pascal aurait pu relativiser et trouver, tout près de son point de chute, des vêtements à louer, un appartement, des jeux de plage, et même, pourquoi pas, un bateau pour aller faire de belles promenades maritimes avec sa femme et ses enfants. Mais, hélas pour lui, il ne connait pas notre plate-forme locative … alors, après quatre ans, dix mois et seize jours, il n’aura pas le mérité pourtant bien mérité …