Nassira Belloula, écrivaine algérienne auteure du livre « Le massacre des innocents » déjà commenté, vient de recevoir le trophée « Arts et culture -- Femmes arabes du Québec pour 2010 « . Elle n’est pas seulement écrivain mais est toujours restée une grande journaliste algérienne. Elle a défendu la cause des enfants massacrés, traumatisés innocents durant les années noires dans son pays et continue à militer pour la cause des enfants dans le monde. Ses articles sont la source de ce commentaire.
Omar KHADR, 11 ans, embrigadé par son père dans un camp d’Al-Qaida, fait prisonnier en Afghanistan à l’âge de 15 ans, grièvement blessé, accusé de meurtre par la justice américaine.
Un crime de guerre est une violation des lois et coutumes d’une gravité exceptionnelle. Dans les accords internationaux et en particulier le Statut de Rome, article 8, alinéa 59, régissant les compétences de la Cour Pénale Internationale (CPI) ou la Convention de Genève, il est bien spécifié qu’il s’agit de cas où les objectifs sont soit civils, soit prisonniers de guerre, soit blessés.
Ces cas ont été largement explicités lors du procès des criminels nazis de Nuremberg.
Or, qu’en est-il du cas d’un enfant de 15 ans, arrêté lors d’une opération d’acte militaire dans une guerre de représailles déclarée en 2001 par les États-Unis qui s’ingéraient depuis déjà une longue période dans un conflit interne en Afghanistan, grièvement blessé (deux balles tirées dans son dos et une grave blessure à la face qui lui fit perdre un œil), il est accusé d’avoir tué un soldat américain par jet de grenade.
Omar avait presque 11 ans quand son propre père le fit enrôler dans un camp d’Al-Qaïda en Afghanistan. On ne parle pas du destin du père. On a capturé le fils après qu’il eût subi 4 années d’endoctrinement et de formation. Il se trouvait dans une cache qui a été attaquée par des moyens terrestres à l’arme lourde et aérien avec bombardements, il n’était pas seul, son compagnon est mort, lui a été blessé par un tir dirigé alors qu’il tournait le dos a ses adversaires … déjà blessé à la face … dans les décombres de son abri. Une vraie victoire à mon avis !
Omar KHADR est né à Toronto, Canada en 1986, il est canadien. Il a été emprisonné à Guantanamo en 2002, il y a 8 ans, il y a subi les mêmes traitements que les autres prisonniers, il a été soumis au même régime que les adultes, tels qu’ils ont été largement commentés dans la presse mondiale.
Le dossier d’accusation mentionne les circonstances de sa capture et le témoignage de celui qui lui a tiré dessus alors qu’il était de dos. Diverses pièces du dossier, selon ses avocats ont été omises ou sont disparues, enfin les choses habituelles dans ces cas, surtout quand il s’agit d’un procès militaire, car il ne sera pas jugé par une cour civile mais par un tribunal d’exception militaire. L’affirmation officielle selon laquelle le jeune Omar aurait lancé la grenade a été contredite par des témoins américains et le véritable lanceur aurait été tué (difficile de lancer une grenade avec une blessure à la face … essayez de vous bander les yeux et de viser en lançant une patate et vous verrez le résultat)
Comme il n’y a pas eu d’autres survivants à cet assaut, il n’y a pas de contradicteurs. Quelle est la valeur de cette accusation ?
Il a 24 ans maintenant, il est diminué, handicapé, moralement détruit, il en avait 15 au moment des faits, il en avait 11 quand son père l’a donné à Al-Qaïda. Quelle est cette sorte de justice ? Qui est coupable ? Qui sera le plus coupable si on le condamne ?
Les ONG, Amnesty International, l’Unicef, tous ces organismes estiment que ces poursuites devant un tribunal militaire (d’exception) qui n’est pas soumis aux normes représentent un précèdent « dangereux » pour la protection des centaines de milliers d’enfants-soldats engagés involontairement dans des conflits partout dans le monde.
Quelle capacité doit avoir un enfant de 11 ans pour refuser d’aller là où son père lui ordonne ? Comment peut-il résister à l’embrigadement, au lavage de cerveau systématiquement appliqué dans ces organisations criminelles ? Comment peut-on le qualifier de combattant ennemi ?
Partout en Afrique, en Amérique du Sud on rééduque ces enfants perdus, on essaie de leur donner une chance de vivre dans une normalité toute relative compte tenu de leur vécu. Mais pas aux États-Unis ! Mais pas dans un pays qui se dit « le défenseur de la Démocratie » ?
Omar KHADR, étant Canadien, on se serait attendu à ce que son pays agisse comme l’ont fait l’Angleterre, la France, l’Allemagne et même l’Algérie, qu’il intervienne comme il est toujours intervenu dans des cas semblables. Cela n’est pas.
Dix huit des plus grands juristes du monde, dont Robert Badinter ont déclaré que » en tant qu’enfant-soldat, Omar KHADR n’est pas un combattant volontaire, il est d’abord une victime. Il n’y a pas d’État civilisé dans lequel on traite les mineurs comme des majeurs. Et que Guantanamo Bay n’est pas hors du monde. Guantanamo Bay ne se trouve pas en dehors du champs de droit ».
Pour ma part, j’estime qu’il ne peut et ne doit plus exister de cause ou de religion pour laquelle on s’arroge le droit de disposer de la vie des enfants.
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