Campagne Monoprix : L'Interview sans concession de l'agence Havas City

Publié le 16 novembre 2010 par Darkplanneur @darkplanneur

C'est mon coup de coeur de la rentrée, la campagne Monoprix déclenche des passions tant positives que négatives...c'est bon signe ! Je suis allé à la rencontre dex 2 "Mad Men" chez Havas City : Charlotte David (Directrice Générale) et Florence Bellisson (Directrice de Création), interview uncut !

Darkplanneur : "Comment comprenez vous la réaction négative (Blog/Twitter) contre la campagne Monoprix, on vous reproche d'être difficile à comprendre, et d'avoir "pompé" la marque Delo ?"

Charlotte David  : "C’est le principe même du web 2.0, tout le monde s’exprime, participe au débat, c’est normal de ne pas faire l’unanimité. La marque Delo est une jolie marque distribuée chez Monoprix, son code c’est un code typo de couleurs, celui de Monoprix qui pré-existe à travers la communication ce sont des bandes de couleurs. Donc oui c’est proche, parce que c’est une idée moderne, de l’époque. Ce n’est donc pas étonnant, les bonnes idées sortent souvent en même temps. En revanche, la critique de la complexité est plus étonnante, ce n’est pas si compliqué d’écrire « lait » sur une brique de lait. Cela a le mérite d’être clair !"

Florence Bellisson : "Plus il y a de réactions, mieux c’est. Cela prouve que cette prise de parole ne coule pas comme un robinet d’eau tiède. Les marques et les agences assument totalement cette conversation qu’il y a entre elles et les consommateurs. En ce qui concerne Delo, le langage de la typo en capital en drapeau n’est pas nouveau en tant que tel, nous ne l’avons pas inventé, Delo non plus. Ce langage fait partie de notre culture graphique qui trouve son origine notamment dans la culture américaine. Ce que nous trouvons juste, c’est sont application pour cette gamme de produits pour tous les jours, accessibles, qui va du papier toilette au boudin en passant par les rillettes et le lait démaquillant."


D:  "J'ai deux interrogations : sa déclinaison digitale limitée et l'implication minimum sur le point de vente ? "

FB : "L’affichage est le média des distributeurs. De jouer aussi sur la convention digitale permet à Monoprix d’affirmer sa différence. Nous avons choisi en digital, de proposer du contenu complémentaire à cette campagne, nous avons filmé les réactions de la rue où chacun réagit différemment à la lecture des “accroches”. C’est une autre conversation qui est alors initiée, celle de la réaction… de la critique."

CD : "Nous avons mené la plus importante campagne de bloggeurs jamais réalisée avec plus de 130 bloggeurs impliqués et monté une flash mob digitale. Certains nous ont même reproché d’être trop intrusif ! Ce n’est donc pas si limité que ça. Quant au point de vente, nous avons voulu laisser la place aux produits. Gardons en tête que ce n’est que le début, en effet les produits arrivent les uns après les autres, au rythme des rotations de stock. Nous ne sommes pas dans le cadre d’une gamme collector mais bien d’une marque distributeur. Les produits vont venir nourrir les rayons, le quotidien de chacun et nous pensons que nous aurons d’autres petits films, d’autres bons mots postés spontanément. Les meilleures blagues sont à venir !"


D :  "Cette campagne pourrait-elle fonctionner sans le plan média généreux mis à votre disposition ? "

CD : "Cette campagne fonctionne avant tout en rayon. 2000 produits sont prévus courant 2011, quand ils seront tous là, le réseau d’affichage ce sera les rayons des magasins."

FB : "Certes, la puissance joue un grand rôle. Mais nous avons la conviction que le caractère rupturiste du look des packs fait effectivement son travail en magasin. Comme ce remplissage des rayons s’échelonne dans le temps c’est bien aussi de marquer le coup."

D : "Quelle est l'ambition de Monoprix avec cette campagne ?"

CD : "L’ambition est simple. Affirmer son positionnement d’enseigne de centre ville : un marchand qui s’efforce chaque jour de proposer des produits de qualité, accessibles, pour que le quotidien ne soit jamais quotidien. L’idée était donc de s’appuyer sur la refonte de la marque cœur de marché pour prouver cette proposition. En effet, les 2000 produits de la marque Monoprix sont l’exemple même que l’on peut réconcilier qualité, valeur, accessibilité et proximité."

D : "Si je vous dis que la campagne Monoprix sonne le retour du Pop Art dans la Pub ou mieux est une ode au Marketing de la Poésie ?"

FB : "Pour nous elle est en rupture avec le son et l’image ambiant. Dans notre travail, on s’est attaché a créer un design uniquement appropriable par Monoprix, en travaillant un code (celui des bandes de couleurs et de la typo capitale) que nous avons installé depuis 2 ans. Au final, il y a un air de pop art, et c’est tant mieux, car le pop art rendait hommage à la consommation."

CD : "Monoprix est un magasin populaire, alors oui, c’est un retour de la pop culture ! Une culture qui touche tout le monde, qui est accessible tout en restant intelligente."

 
D :  "Quelle est la stratégie créative employée ?"

FB : "S’appuyer sur le design des packs, pour nourrir l’engagement de la marque : affirmer que Monoprix est une marque qui nous offre du bon et du beau tous les jours, avec esprit et fantaisie."

CD : "Notre idée a été en effet de faire parler les produits : ils nous disent ce qu’ils sont. Les textes de désignation, qui d’habitude sont en mineur versus un visuel prennent ici de l’importance. C’est un effort de transparence, de vérité du produit. Les produits nous disent aussi leur esprit, à travers une accroche qui se cache sur les facings. C’est une conversation nouée entre les produits et leurs consommateurs. Les produits sont donc naturellement devenus des média, ils sont la communication. Les affiches complètent le discours pour porter le positionnement de l’enseigne, les initiatives digitales et évènementielles permettent à chacun de s’approprier le dispositif."


D :  "A quoi ressemble le client Monoprix qui va avec cette Pub ? "

CD :" A vous ? A nous ? A tous ceux qui boivent du lait au petit déjeuner, aiment le beurre et les tomates ! On a reçu beaucoup de mails d’internautes, de passants, de clients, d’inconnus qui nous félicitaient et nous remerciaient, ils ont aimé la simplicité, l’évidence et l’élégance d’une campagne qui ne défigure pas les villes mais les anime. Plus sérieusement, cette campagne s’adresse aux clients de Monoprix, des urbains."

FB : "A tous, à tous ceux qui sont d’accord pour être surpris."


D :  "Beaubourg a t'il été difficile à convaincre ?"

CD : "Beaubourg a été impliqué depuis le début dans l’opération, leur point était simple, il était important d’apporter une dimension artistique au projet. Rémi Guigou, Directeur de l’image et de la marque de Monoprix a eu l’idée de faire appel à Mathieu Mercier, il s’est emparé de la boite de tomate et en a fait à la fois une sculpture, un happening, un rendez-vous pour les familles qui se sont prises en photo au volant du scooter. Beaubourg était ravi, Mathieu Mercier aussi, Monoprix très content, et nous aussi."
CD : "Merci à vous pour votre attention, vos compliments et nous avoir qualifié de Mad Men, car oui ce projet a été un peu fou ! Heureusement que Monoprix est un annonceur audacieux qui croit en la force de la création. Merci à eux."


Charlotte David : Directrice Général d'Havas City


Florence Bellisson :  Directrice de Création