L'été de la vie

Par Placebo
J. M. COETZEE, L'été de la vie, traduit de l'anglais (Afrique du Sud) par Catherine Lauga du Plessis, Seuil, 2010, titre original Summertime, (320 pages).
Je ne croyais pas pouvoir trouver un livre plus idéal pour ma semaine à Cayo Largo, moi dont la concentration est, telle l'écoute freudienne, flottante, surtout à la plage. En revanche, difficile d'y apporter son nécessaire de lecture, dictionnaire, cahier de notes, crayons, et impossible d'annoter un livre emprunté à la bibliothèque.Faisons donc confiance à la mémoire.

À l'heure où la fiction française souffre encore des pires débordements de « l'auto-fiction », il est fort intéressant de constater comment un auteur anglophone s'y prend pour se raconter tout en se mettant délibérément en fiction. Je le dis d'entrée de jeu : la technique de l'auteur est stupéfiante, et pourtant coule comme de source naturellement.


Le récit/roman s'ouvre sur une série de fragments de carnets tenus par J. M. COETZEE dans les années 70 dont on saisit mal ce qui les unit. Suivent cinq entretiens menés par un jeune universitaire qui travaille à la biographie du romancier dont on apprend qu'il est décédé avec cinq personnes qui ont connu celui-ci dans ces mêmes années. Cinq personnes très différentes dont la perception de COETZEE est forcément très différente. Le regard de la maîtresse plus ou moins insatisfaite n'est en effet pas le même que celui de la cousine, de la collègue de travail ou de la mère d'une de ses élèves. D'autant plus que leurs rapports ont tous été relativement limités dans le temps, d'une part, et, d'autre part, remontent à plusieurs années. Ce qui, au passage, en dit beaucoup sur l'objectivité du travail biographique. L'ouvrage se referme sur une nouvelle série de fragments, mais non datés cette fois.


Présentation de l'éditeur :
« Après Scènes de la vie d'un jeune garçon et Vers l'âge d'homme, voici le troisième volet de l'entreprise autobiographique de Coetzee : il a atteint la trentaine et, de retour au pays natal, partage avec son père vieillissant une maison délabrée dans la banlieue du Cap. Autobiographie fictive puisque l'auteur confie la tâche d'un portrait posthume à un jeune universitaire anglais qui recueille les témoignages de quatre femmes et d'un collègue qui auraient compté pour l'écrivain en gestation dans les années 1970.
Ce quintette de voix laisse entrevoir un homme maladroit, mal à l'aise, brebis galeuse de la famille afrikaner qui peine à ouvrir son coeur. La femme adultère, la danseuse brésilienne, la cousine chérie, l'universitaire et la maîtresse française s'accordent à faire de lui un amant sans chaleur, un amoureux indésirable, un enseignant sans charisme. Ces entretiens sont encadrés de notes et fragments extraits de carnets où l'écrivain s'interroge et se cherche.
Dans ce récit où se mêlent le comique et le ridicule, la mélancolie et le désespoir, Coetzee se livre avec prudence et dévoile peu à peu un coeur en souffrance sous la cuirasse. Il invite une nouvelle fois le lecteur à une superbe méditation sur la condition humaine.»