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Nationalités, races, handicap, et vocabulaire...

Publié le 14 novembre 2010 par Pascal_oudot

Nationalités, races, handicap, et vocabulaire...

Je ne sais pas en ce qui vous concerne, mais moi il m'arrive d'avoir de drôles de réflexions quand je suis dans mon bain. Vous aussi? Me voilà rassuré.
Tenez, je vais vous exposer les intensives élucubrations dans lesquelles j'ai été plongé par mon endormissement progressif dans un m³ d'eau chaude...
Je pensais à la facilité avec laquelle on désigne les habitants d'un pays: en France on est français, en Italie on est Italien, en Espagne on est espagnol, au Brésil brésilien, au Japon japonais, etc. Je me suis promené ainsi sur tous les continents! Roumanie? Roumain! Chine? Chinois! Egypte? Egyptien. En Bolivie on est bolivien, au Rwanda rwandais, en Finlande finlandais, aux Fidji fidjien, en Afrique du Sud sud-africain, au Royaume-Uni... ah crotte, ça ne marche pas! Royaume-unien? Beeeerk!
Cela ne m'étonne pas vraiment, ces gens-là n'ont jamais rien su faire comme les autres. Nous devons les appeler "anglais". Allez dire à un écossais et à un gallois qu'ils sont anglais, tiens, vous allez vous faire recevoir.
Pareil pour les autres anglo-saxons de cette planète, je parle bien entendu des Etats-Unis. Etats-uniens? Raaaah, quelle horreur! Non, ces gens là se définissent par leur continent, puisqu'il nous faut parler des "américains". Avec leur orgueil et leur habituelle pensée hégémonique, ils ont avec allégresse colonisé à leur profit le continent entier...
Ceci dit, cela n'a rien d'étonnant non plus. Les américains ont toujours eu des problèmes avec leur vocabulaire. Prenez par exemple la façon dont ils définissent les races humaines. Pour les béotiens, qui n'ont jamais rien su de la nomenclature des espèces, je dois expliquer que -oui- les races existent et se distinguent par des caractères physiques. L'espèce humaine est une et indivisible, on la reconnait par ce qu'elle peut se reproduire. Au même titre qu'il y a des races de chiens qui peuvent se croiser entre elles, mais se distinguent parfaitement physiquement. Le nier ne même à rien. C'est même la pire des idées qu'on puisse avoir. Effectivement, je pense qu'il est plus intéressant de connaître les différences que de vouloir les gommer. Au même titre que chaque individu a ses propres caractéristiques qui permettent de le distinguer d'autrui, et donc justement d'en faire un "individu", et non un clone. Fin de la parenthèse.
Les américains, donc, comme le reste du monde, dénommaient les populations d'origine africaine "nègres". Ce mot signifie "noir" dans beaucoup de langues, en particulier en latin, langue morte à l'origine de nombreux langages. Vous me direz, et je suis d'accord, que c'est parfaitement impropre: vous connaissez des noirs noirs, vous? La gamme des teintes selon l'origine géographique de ces populations est très étendue, et va de l'Afrique à l'Inde, voire plus loin en Asie, mais je crois que je n' ai jamais vu de noir noir. Ou alors c'est qu'il était saoul.
Les américains ont été gênés par la connotation péjorative attachée au mot "nègre" (nigger, en anglais), ceci certainement suite à la longue période d'esclavage que les Etats-Unis ont connue jusqu'en 1865. Comme les pays européens d'ailleurs. Rappelez-vous bien que la France ne les avait précédés que de peu! Si la traite des esclaves a été abolie en 1815, l'esclavage lui-même ne l'a été chez nous qu'en 1848 -merci Victor Schoelcher.
Du coup, les américains -et nous les avons suivis, nous suivons toujours les américains (sob!)- ont abandonné le terme "nègre" pour celui de "noir". Pas mieux. D'autant que ça veut dire la même chose. Ils sont alors passés -nous aussi- au mot "coloured" (colorés? Je ne sais pas s'il faut rire...), que nous avons traduit par "de couleur". Hmmm... Nous en sommes encore là. Un crayon noir est-il un crayon de couleur? Quand on broie du noir, broie-t-on de la couleur? Travailler au noir... Bon, en plus, dans l'inconscient collectif, le noir est attaché au mal, à tout ce qui est désagréable, au pire. Bref, cela s'appelle au mieux botter en touche, au pire aller de mal en pis. Nous aurions conservé le terme historique "nègre", tout serait plus simple. Car moi, personnellement, je ne mets derrière ce mot aucune connotation péjorative.
Du coup, les américains appellent maintenant les populations d'origine africaine des afro-américains... Franchement, c'est de pire en pire! Cela signifie certainement dans l'esprit des WASP (White Anglo-Saxon Preotestant) que leurs concitoyens nègres/noirs/de couleur ne sont pas complètement des américains. Finalement, c'est peut-être là que ça coince, au fond. En France, nous parlons maintenant des afro-américains (beeerk!) lorsqu'il s'agit des nègres/noirs/de couleur américains. Nous sommes en revanche restés en partie au terme "noir", mais nous évoquons souvent maintenant l'origine géographique ou tribale: nous parlerons d'Africains, de Congolais ou de Bambaras… et nous opérerons une distinction avec les antillais, les guadeloupéens, les martiniquais et les guyanais. Ce n'est dans un sens que justice, ces quatre derniers étant souvent français depuis plus longtemps que la la plupart de nos compatriotes métropolitains -tiens, notre omni-président, par exemple...-.
Il se cache en fait, à mon avis, un racisme latent derrière cet usage étrange et inconfortable du vocabulaire. Ne pas appeler un chat un chat, c'est vouloir cacher notre pensée, la déguiser avec des mots qui ne devraient choquer personne. Les gens bien-pensants cachent leur ostracisme et leur xénophobie sous des dehors accueillants et humanistes. On peut observer le même phénomène avec le handicap. Quand on refuse d'admettre sa gêne ou son refus -et ce sont des émotions très humaines-, une fois de plus on déguise sa pensée avec des propos lénifiants et qui nous paraissent mesurés. C'est ainsi que les aveugles sont devenus des non-voyants ou des mal-voyants (je suis très myope, suis-je un mal-voyant?), les sourds des mal-entendants, les gros des ronds ou des enveloppés, les nains et les lilliputiens des personnes de petite taille, etc. Que peut-il y avoir de pire que de définir une personne par la négative? C'est un refus du handicap qui se cache sous des atours devenus désormais ridicules. Stop à la négation! Stop au refus de la différence! Nous aurons sinon bientôt des non-blancs, des non-français, des non ce que vous voulez... des non-conformes!
Voilà ce que à quoi je pense dans mon bain. Je l'ai déjà écrit ici, je ne dois pas être tout à fait normal. Publié par Pascal Oudot le Nationalités, races, handicap, et vocabulaire... Nationalités, races, handicap, et vocabulaire...

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