Critique en avant-première : Somewhere (par Jango)

Par Jango


Synopsis :

Johnny Marco, auteur à la réputation sulfureuse vit à l'hôtel du Château Marmont à Los Angeles. Il va recevoir une visite inattendue : sa fille de 11 ans.

Critique :
La semaine passée, j’ai eu la chance d’assister à l’avant-première Française de Somewhere, quatrième film de la réalisatrice Sofia Coppola, auréolée (non sans critiques) du Lion d’Or à la dernière Mostra par le jury de Quentin Tarantino. A ce jour, le film n’a été que peu montré hors Festival aussi, aussi, notre critique revêt un petit caractère d’exclusivité.
Après trois superbes réalisations, Virgin Suicide, Lost in Translation et Marie-Antoinette évoquant des sujets semblables, on pouvait penser que Sofia Coppola changerai registre, elle, habituée du traitement de la solitude, de la célébrité et du rapport au père. Des thématiques récurrentes qui se voient au contraire très nettement accentuées dans Somewhere, œuvre de synthèse quasi autobiographique.
Somewhere débute par un plan très long, une Ferrari noire tournant en boucle sur un circuit. Elle s’arrête, notre personnage sort, générique. Tout est dit, et tout pourrait se résumer à ce plan. Johnny Marco fait du surplace et le film n’est que le témoin de ce piétinement. Le film évoque la solitude d’un acteur hollywoodien, la monotonie de sa vie au-delà des paillettes. La mise en scène de Coppola, volontairement peu dynamique, s’apparentant d’ailleurs presque à de la photographie, nous emmène dans cette vie fondamentalement triste. En ayant accès à tout, cet acteur se lasse des filles, couche tous les jours avec une nana différente, se paye des gogo danseuses de bas étages et n’a même pas réussi à s’acheter sa propre maison, ce dernier résident au célèbre hôtel du Château Marmont, lieu prisé de Los Angeles par les stars d’Hollywood.

Par l’arrivée de sa fille (Elle Fanning, sœur de Dakota), ce dernier va progressivement sortir de cette boucle sans fin en découvrant quelqu’un à aimer vraiment, quelqu’un provoquant cet électrochoc inconscient permettant d'aller de l’avant, à l’image du plan final faisant directement écho à celui de l’introduction.
On peut sans mentir dire que dans Somewhere il ne se passe pas grand-chose. Et pourtant, le film se révèle passionnant, hypnotique, drôle et émouvant. Il est certainement le film le plus personnel de Sofia Coppola, celui révélant le plus cette personnalité sensible, timide, presque fragile. Fille de, célèbre dès ses premiers mois, elle y évoque avec ironie le statut de célébrité notamment par l’intermédiaire de plusieurs séquences issues de la tournée promo de Johnny pour son nouveau film. De la conférence de presse et ses questions souvent stupides aux réceptions hors de prix en passant par les photoshoots hyprocrites, l’occasion d’apercevoir Michelle Monaghan quelques secondes, Coppola nous montre un envers du décor que l’on ne souhaite pas voir, des acteurs faillibles et finalement, terriblement humains malgré les millions de différences qui nous séparent d'eux.

A l’image de ses précédentes réalisations, Somewhere demeure un long-métrage très stylisé, parfois presque trop. La photographie et le jeu sur les couleurs sont des personnages à part entière s’exprimant parfois plus que les acteurs eux-mêmes. Sofia aime les films avec peu de dialogues et cela n’est pas étonnant de la part de la réalisatrice, peu à l’aise avec la parole dans l’exercice des conférences de presse ou des master class. Ce nouveau film semble être une synthèse de ses maux de l’enfance, un élément indispensable pour passer à autre chose, à un autre cinéma. Récemment mère, Sofia Coppola est véritablement Johnny Marco, personnage tournant en rond révélé par l’arrivée de son enfant.
Il est clair que le film ne fera pas l’unanimité et on est en droit de se demander si le lion d’or à la Mostra était vraiment mérité. Ceci étant, il marque une étape fondamentale dans la carrière de la réalisatrice, un film que l'on espère aux vertus thérapeutiques pour elle, en parfaite cohérence avec ses trois premiers long-métrages.
Si vous êtes fans de ce cinéma, vous adorerez, les autres, passez votre chemin…vous risquez de vous ennuyer.
A lire également, les critiques de Sandra d'Inthemoodforcinema et de Rob Gordon.
Ci-dessous, quelques photos de la présentation du film par Sofia Coppola lors de l'avant-première française. Voir toutes les photos ici.




Sortie officielle française : 5 janvier 2011