Je n'ai jamais aimé mes mains. D'aussi loin que je me souvienne, jamais. J'ai toujours rêvé d'avoir des mains de femmes, avec de longs doigts élégants. A la place, j'ai hérité de mains "de petite fille", aux doigts plutôt courts et trop forts à mon goût. Autant dire que si on m'avait proposé de faire des photos de mes mains, comme ça, sans un solide projet derrière, j'aurais immédiatement refusé. Mais voilà, la vie réserve de jolies surprises, parfois.
En fait, depuis que je tiens ce blog, j'ai eu la chance de pouvoir rencontrer tout un tas de gens intéressants. Certains dont j'appréciais déjà le talent avant et d'autres que j'ai découverts au gré des rencontres qu'occasionne la gestion de mon petit morceau de toile, justement.
Marlène aka Balbc par exemple. Elle est blogueuse elle aussi (Le petit monde de balbc) et elle a un projet photo qui m'a immédiatement séduite. Dès qu'elle m'en a parlé. "Inked" (c'est le nom du projet) consiste à prendre en photo des mains sur lesquelles sont inscrits des mots. Des mots qui sont choisis par le sujet soit parce qu'ils ont un sens pour lui, soit parce qu'ils participent à une mise en scène particulière...
Quand est venu mon tour de participer après qu'elle ait accepté ma "candidature" (2nde moitié d'octobre pour être précise), j'avais deux options en tête :
La première, que je n'ai finalement pas choisie, consistait à placer mes deux mains l'une dans l'autre et à inscrire sur le dos de la main qui se serait trouvée au-dessus "dans la". Pour illustrer l'expression "main dans la main"; cette idée de partage, cette idée que du collectif peut naitre une force qu'aucun individualisme ne saurait égaler, pour défendre cette valeur de solidarité qui m'est chère encore que je sois bien loin de la défendre vraiment bec et ongles au quotidien.
La deuxième option, celle qui a eu ma faveur au moment d'inscrire les mots qui devaient illustrer ma photo, consistait à inscrire deux mots, un sur chacune de mes paumes. Je voulais quelquechose de personnel. Alors j'ai écrit "apprend" dans l'une et "(se) cherche" dans l'autre. Deux verbes à l'impératif qu'on peut comprendre comme des injonctions mais qui en fait n'en sont pas. Le "(se)" est là pour le signaler. C'est seulement moi que je caractérise à travers ces deux mots. Je n'ai pas la prétention de me croire en position de donner des conseils à qui que ce soit.
Oui, j'essaie de lancer une mode : celle de l'écharpe doublée d'un foulard pour la réveiller un peu (trop triste sans ça).
Pour l'instant je suis seule. Bientôt, on sera des milliers? (Je double aussi mes foulards l'été...avis aux amateurs(trices))
"Apprend" parce que c'est ce qui me définit le mieux au quotidien : dans mon métier j'apprends aux autres mais j'apprends aussi sans cesse des autres. Tout le temps. J'aime cette idée d'être en constante évolution et de me construire petit à petit, au fil des rencontres que réserve la vie. J'aime l'idée que je grandis sans cesse. C'est peut être pour cette raison que l'idée de vieillir ne m'effraie pas trop et que je suis intimement convaincue d'être plus proche aujourd'hui de ce que je suis vraiment que je ne l'étais à 20 ans.
Ce qui m'aide à ne pas regretter mes plus jeunes années, c'est la richesse tirée de mes expériences passées. Je me suis trompée, souvent, comme tout le monde sans doute, mais je suis persuaduée que l'erreur n'est pas grave en soi. Ce qui l'est c'est de rester dans l'erreur et de ne pas savoir en tirer enseignement.
C'est la raison pour laquelle la deuxième inscription est "cherche" parce que c'est cette quête permanente qui me définit. A travers les autres, leurs oeuvres ou leur personnalité propre, c'est un peu de moi que je cherche. Ce qui fait que j'ai l'impression persistante d'être toujours en chantier. Tantôt c'est un chantier de démolition. Tantôt de reconstruction. J'ai parfois l'impression d'en être aux finitions mais je pense et j'espère que cette phase là ne cessera jamais : Que je serai toujours en train d'évoluer. Lentement mais sûrement.
J'aime aussi beaucoup la mise en scène de ce cliché. Ces mains projetées vers l'extérieur, tournées vers les autres, vers l'Autre. C'est une idée de Marlène. Une très bonne idée. C'est qu'ils me passionnent les autres. Avec leurs qualités mais aussi leurs faiblesses et leurs défauts. Tout entiers. C'est qu'elles m'attendrissent les petites failles des autres. Alors que les miennes m'horripilent. Ils m'intéressent terriblement même si je souffre au fond du poids de leur regard dont je n'arrive pas (encore) à m'affranchir et qui fait que je reste condamnée à me définir en partie à partir de l'image qu'ils me renvoient de moi ou de celle qu'ils projettent sur moi.
J'aime l'idée de croiser des routes multiples alors que je suis mon propre petit chemin et, s'il me semble que j'ai quelquechose à partager alors, de "frapper à des portes". A cela, chacun réagit selon son propre sentiment. Il y a les méfiants qui laissent la porte close et se contentent de jeter un oeil par le judas sur l'air du "qu'est ce qu'elle me veut celle là?". Il y a les frileux qui entrouvent la porte mais prennent soin de garder l'entrebailleur, pour ne pas se laisser envahir. Et puis il y a ceux qui ouvrent grand leurs bras et m'accueillent dans leur petit chez-eux avec chaleur. Alors bien sûr que dans la vie, pendant que de nouvelles portes s'ouvrent, il y en a d'autres qui se ferment mais ça n'est pas triste au fond. Au contraire. C'est générateur de renouveau.
J'espère longtemps rester dans cette dynamique même si je sais qu'on ne peut rien prédire quant à ce que la vie nous réserve et au fond, j'espère qu'elle me surprendra encore, qu'elle saura m'emmener là où je n'avais pas prévu de mettre les pieds.
D'ailleurs, sur la photographie, j'aime l'idée que c'est moi qui me dessine derrière ces mains et donc derrière ces mots. Mais j'aime surtout le fait que c'est une image floue que l'on aperçoit, pas figée. Comme j'espère l'être un peu au fond. Sans cesse en train de changer, avec l'espoir de chaque jour un peu m'améliorer. Ou au moins d'essayer.
Je termine en musique avec une chanson pas assez connue à mon sens, écrite par Anne Sylvestre et reprise par Vincent Delerm, Jeanne Cherhal et Albin de La Simone pour la tournée de V. Delerm " Les gens qui doutent". Pépite.
Si tu n'as pas encore cliqué sur un des liens de cette page, déjà c'est moche mais sache que tu peux retrouver toutes les photos de ce projet et même contacter Marlène si éventuellement tu es intéressé par le projet "inked" : Clique donc là.
A noter que le jour de la prise de vue, j'étais accompagnée de Vanessa du blog La vie de Lilie et qu'elle a aussi participé au projet. D'ailleurs je ne résiste pas et je mets sa photo aussi, là: (on peut retrouver le billet sur son blog à propos de ces photos ici) .
Merci à Marlène pour m'avoir permis de participer à ce projet que j'aime. Sincèrement. Et longue vie : Que ton escarcelle soit remplie de mains pleines de sens et qu'elle déborde de projets en tous genres...