Christian Estrosi, ministre de l'Industrie répondait aux questions de Jean-Michel Aphatie mi-octobre et déclarait:
"Le 7 octobre dernier, "la stupéfaction", c'était son mot de Jean-Louis Borloo, par exemple, le ministre de tutelle des Transports en France : la société Eurostar, détenue à 55% par la SNCF, a préféré commander dix trains à grande vitesse à l'Allemand Siemens plutôt qu'au Français Alstom. Ceci a été vécu comme une claque pour l'industrie française. Est ce définitif, Christian Estrosi ?
Je le dis très clairement dans cette affaire, rien n'est joué. Rien n'est joué, et l'affaire n'est pas terminée. Pourquoi, parce qu'il se trouve que le cahier des charges de l'appel d'offre, n'a pas pris en compte toutes les exigences en matière de sécurité. Notamment la circulation sur le territoire français des règles très précises qui existent dans le cahier des charges ou dans la réglementation, pardon, de la circulation de l'Eurostar, et ensuite aller dans le tunnel sous la Manche. A partir de là, le gouvernement français est fondé à faire remarquer que ces règles n'ayant pas été respectées dans l'appel d'offre, nous demandons à ce que soit suspendu cet appel d'offre.
Que l'appel d'offre soit suspendu, c'est-à-dire que le contrat ne soit pas signé entre Eurostar et Siemens ?...
Il ne peut pas être signé, dès lors que le gouvernement français considère, alors que c'est pour nous, une priorité, vous empruntez peut être quelque fois le tunnel sous La Manche, je pense que tout le monde a besoin d'avoir toutes les garanties en matière de sécurité. Celles ci ne sont pas conformes à l'intérieur du cahier des charges."[...]
La SNCF est d'accord avec vous ?
Mais la SNCF, qui a 55% actionnaires d'Eurostar et dont le gouvernement français est à 100% actionnaire, n'a pas la possibilité forcément de constater les choses différemment. D'ailleurs, je m'en suis entretenu très clairement la semaine dernière, avec le président de la SNCF, monsieur Guillaume Pepy et qui en convient. "
Bon, soyons honnête, il n'y a pas qu'Estrosi. Sur LCI Dominique Bussereau, le secrétaire d'Etat français aux Transports a sèchement jugé la décision d'Eurostar de faire circuler des trains fabriqués par Siemens dans le tunnel sous la Manche "nulle et non avenue". Il a fait valoir que les trains proposés par Siemens n'étaient pas suffisamment longs et posaient, aux yeux des autorités françaises, des risques en termes de sécurité, notamment en cas d'incendie. "On dit depuis le début aux dirigeants d'Eurotunnel, qui gère le tunnel, et d'Eurostar, qui exploite, (...) que les matériels autres que les matériels Alstom actuels ne peuvent pas passer".
Oui mais voilà, comme le rapporte la BBC, une fois de plus le gouvernement français prend ses désirs pour des réalités:
"Alstom perd son procès contre Eurostar dans le cadre du contrat de trains allemands.
Un tribunal britannique a rejeté la demande d'ALSTOM d'arrêter l'achat par Eurostar de trains Siemens pour 600 millions d'euros.
Eurostar, l'unique opérateur de trains de voyageurs à travers le tunnel, a utilisé jusqu'à présent le matériel roulant d'Alstom.
La commande d'Eurostar de 10 trains Siemens soulevé des questions de protectionnisme entre la France et l'Allemagne.
Alstom avait demandé un réferré [suspension immédiate avant décision de justice sur le fond, NDLR] pour empêcher Eurostar de réaliser la transaction pour les trains de Siemens à grande vitesse.
Mais à la Haute Cour de Londres, le juge a déclaré qu'Alstom aurait très peu de chances d'obtenir l'obtention d'une ordonnance du tribunal annulant la décision d'Eurostar d'octroi du contrat à Siemens.
Il a dit qu'il refusait d'accorder un réferré parce que ce serait une menace pour Eurostar dans l'acquisition de nouveaux trains ainsi que dans son projet de développement, puisque tout procès pourrait entraîner d'importants retards.
[...]
Toutefois, M. Vos [le juge, NDLR] a déclaré que, bien qu'il y avait eu des violations de la procédure d'appel d'offres, celles ci avaient peu de chances d'avoir fait une différence dans la décision d'Eurostar de choisir des trains Siemens."
Il faudrait arrêter de prendre les gens pour des idiots.
Et pourtant même les journalistes animateurs sont parfois de la partie. Dans l'émission Mots Croisés sur France 2, Christian Estrosi, qui tente d'enfumer les téléspectateurs, affirme qu'ils pourront partir plus tôt [avant 62 ans]. "Faux", s'exclame Chérèque. Qui a raison ? Pour Yves Calvi qui anime le débat, Chérèque "ne peut pas dire au ministre qui vient de dire ça "vous mentez" !" Et pourtant... vidéo de ce grand moment à voir sur le site d'Arrêt sur images.