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Entretien avec Erwan Lecœur : L’extrême droite, entre croyance et politique [Audio] #2

Publié le 14 novembre 2010 par Vogelsong @Vogelsong

“Le Front National n’aurait jamais pu gérer le pays, et J. M. Le Pen le sait pertinemment” E. Lecœur

E. Lecœur dans un entretien fleuve décrit les rouages du Front National, ses liens avec le reste du monde politique français, en particulier de la droite républicaine. Il éclaire aussi par sa connaissance sociologique du vote FN, en tempérant nettement les allégations des “fast-thinkers” qui sévissent sur les médias mainstream. Enfin, il spécule sur une perspective pacifique aux luttes internes qui secouent le parti frontiste. Un parti encore efficace, très vivace, qui sans nul doute fera encore parler.

  • La sociologie d’un vote

Retour sur le choc de 2002. E. Lecœur soutenait sa thèse au moment de l’élection présidentielle. Il subodorait une présence au 2nd tour du Front National. Pour lui, plus qu’une probabilité, une alternative au regard des signes avant-coureurs d’une campagne totalement indigne. Dont le ressort principal fut l’insécurité, “quand on prononce quarante fois le mot insécurité dans un journal télévisé” s’indigne-t-il.

E. Lecœur propose aussi une sociologie électorale du Front National. Une typologie par âge, par classe, par niveau d’éducation, par sexe mais aussi une répartition spatiale dans l’hexagone. Le vote FN ne situe non pas en banlieue, une idée erronée largement répandue, mais plutôt dans des zones enclavées, loin des centres urbains et distantes des axes de communications et des services publics. On y apprend aussi que les analyses soutenues à longueur d’antennes sur le vote ouvrier “d’anciens communistes” ne sont pas sérieuses, “il n’y a pas de gaucho-lepenisme”. De plus, il soutient que les “pauvres ne votent pas FN”. Les jeunes non plus. Entre P. Perrineau et N. Maier, c’est N. Maier qui l’emporte. Les raisons de ce vote ne reposent pas sur le désespoir, mais sur l’anxiété. Non pas issu d’une population qui a tout perdu, mais qui a peur de perdre ce qu’elle a. Toujours à contre-courant des analyses servies par les politologues de sondages. Le vote FN serait donc surtout un vote conservateur. Ultraconservateur.

  • Une histoire des droites extrêmes et de leurs rapports avec la droite (dite) “respectable”

Un portrait historique d’E. Besson au-delà de sa personne. Qui pour E. Lecœur est une figure typique des sociaux-démocrates des années 1890-1900. Ils quittent le giron progressiste pour rejoindre un des fascismes. Comme F. Amarra (dans une moindre mesure) il considère E. Besson avec d’autres, comme des “personnages de cette variabilité sous le sceau d’une primo volonté, une volonté extrême qui vaudrait tout et tout le temps”.

E. Lecœur dépeint aussi le Front National comme une petite entreprise familiale (très lucrative) de spectacle. Avec J.M. Le Pen, bon client des médias nouvellement épaulé par sa fille au moins aussi douée. Ils jouent de leurs différences pour obnubiler journalistes et téléspectateurs. Des registres différents, mais complémentaires, où le petit jeu consiste à discerner les variantes, et finalement à intérioriser les points communs. Un spectacle perpétuel parce que lorsqu’un Le Pen est sur un plateau il se passe toujours quelque chose. De nauséeux, de risible, de révoltant. Toujours porteur. On ne saurait refuser leurs largesses médiamétriques.

La petite affaire FN a construit un succès sur des recettes simples, à base de Reaganisme, modernité, tempérance vis-à-vis des ultras et une parfaite communication qui a fait de ce fourre-tout idéologique (à base de referendum de “bon sens”) qu’est le Front National, une très efficace machine électorale. Une machine en pleine accélération. Dont on pressent la capacité de nuisance lors des échéances à venir.

Enfin, il décrit les luttes intestines entre courants pour la direction du navire. Une lutte de clans datant des origines. La scission entre les idéologues Gollnischien et les pragmatiques Le Penistes. E. Lecœur prévoit une victoire des Le Pen, et un compromis avec les dogmatiques. Pour faire valoir une cohésion en perspective des échéances de 2012.

Vogelsong – 13 novembre 2010 – Paris


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