Isabelle Aubry est l’auteure de La première fois j’avais 6 ans, paru en 2008. Elle y livre un témoignage édifiant sur l’arrivée insidieuse de l’inceste dans la famille. À l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage, Comment j’ai surmonté l’inceste, MCE est allé à sa rencontre
Victime d’inceste de 6 à 16 ans, Isabelle Aubry trouve un jour le courage de parler et décide de lutter pour survivre. Elle fonde, en 2000, AIVI, L’Association Internationale des Victimes d’Inceste.
Isabelle, comment l’inceste est-il entré dans votre vie ?
Comme beaucoup de prédateurs, mon père a utilisé le jeu pour m’agresser, en me demandant de jouer avec son sexe dans le bain quand j’avais 6 ans. Le jour où ma mère le quitte, j’ai 12 ans, et il a le champ libre pour passer au viol. Puis il m’emmène dans des soirées échangistes pour me prostituer. Je ne peux pas lui dire non, car il est violent, il a des armes blanches et il me menace. À 16 ans, j’essaie d’en parler à une copine de classe qui ne mesure pas du tout ce que je lui dis. C’est seulement ma voisine qui s’apercevra de mon état et me questionnera.
Comment vous est venue l’idée de votre dernier livre ?
Il est issu des groupes de parole créés par AIVI et de l’expérience, non pas de quelques victimes, mais de centaines, et ça, c’est nouveau aujourd’hui. Le problème en France, c’est qu’on ne fait pas le lien entre l’inceste et ses conséquences. Anorexie, boulimie, tentatives de suicide, alcoolisme, toxicomanie… L’inceste fait des ravages. Je voulais rassurer les victimes, et informer les praticiens également, car beaucoup sont dans l’ignorance.
Avez-vous des conseils pour les étudiants qui ont été victimes ou proches de victimes ?
Le mieux est de venir dans les groupes de paroles. Ils peuvent s’inscrire anonymement sur le site pour échanger avec d’autres victimes, s’entraider via le forum, et lire Révéler l’inceste à son entourage (disponible sur la boutique du site uniquement) pour connaître les implications, car malheureusement, on a tendance à croire que tout le monde va nous plaindre alors que neuf fois sur dix, c’est le contraire qui va se passer. Il faut être préparé à ça.
Lauren Clerc
Photo CC @Editions J.Lyon