2010 a clairement été pour moi l’année de la biographie : après celle d’Aimé CESAIRE et celle de CAMUS, voilà que j’ai enfin pu trouver le temps de me lancer dans celle de BONAPARTE (qui traine dans ma PAL depuis… près de 2 ans !) Ou plutôt dans la première partie de sa vie, car Le Soleil noir de la puissance traite de la période allant de 1796 à 1807.
Et je dois le reconnaître, ce n’est pas sans une certaine appréhension que j’ai parcouru les premières pages. Certes la passion de Dominique de Villepin pour l’empereur est connue, mais un homme politique qui écrit, c’est une espèce en voie de disparition… (même si beaucoup publient en période électoral, rappelons que ce sont des entretiens rapportés la plupart du temps… à part le sieur Galouzeau et François BAYROU, à brûle pourpoint, je ne peux citer d’autres contemporains). Il faut cependant bien vite se rendre à l’évidence : l’ancien Premier Ministre a une plume qui évite de rendre le sujet rébarbatif, grâce à un sens de la formule lapidaire :
« l’aurore de Lodi se lève sur le crépuscule de Thermidor »
ou encore :
« une victoire, Marengo, et un attentat à la machine infernale ouvrent le bal ; la paix d’Amiens fonde le Consulat à vie, le complot de 1804 assure l’Empire ».
Même s’il n’évite pas quelques envolées qui frôlent la caricature :
« Pour réussir à sortir de l’anonymat, Bonaparte n’en a pas moins dû tremper ses mains dans le fleuve sanglant de la guerre civile, marée rouge dont il redoute les éclaboussures et les effluves mais qui lui permet pour l’instant de parfaire sa réputation de républicain ardent alors même qu’il a perdu toutes ses illusions sur le devenir du régime ».
N’étant pas un spécialiste, ni même un amateur éclairé de la période, j’ai appris pas mal de chose notamment sur la campagne d’Egypte (qui ne fut pas seulement la brillante expédition scientifique qu’on continue à perpétuer dans le souvenir collectif…). Mais ce qui a suscité mon intérêt d’emblée, c’est l’angle sous lequel l’auteur aborde la biographie napoléonienne : à savoir celui de la hantise de la chute, dès le début et qui ne le quittera plus, même une fois son pouvoir légitimé et affermi. Car dans mon esprit – et je ne dois pas être le seul – je ne voyais l’empereur qu’en conquérant sûr de lui, grâce à ses nombreuses, et rapides, victoires, à l’image d’un Alexandre le Grand, chef militaire victorieux et non d’un Jules César qui avait d’autres ambitions. En effet, on peut vite oublier que l’empereur était aussi un politique et que les victoires militaires, à elles seules, ne suffisent pas à asseoir un pouvoir dans la durée… Et Dominique de Villepin ne fait pas l’économie ni l’impasse d’analyses politiques qui permettent de mieux comprendre les difficultés et les pièges d’un changement de régime, et qui mettent en avant un Bonaparte cynique et désabusé qui n’a pas grande foi en l’homme…
Je ne peux donc que fortement recommander cette lecture à qui souhaite se replonger dans l’épopée napoléonienne. Quant à moi, je sens que le tome 2 ne restera pas longtemps dans ma PAL.