Magazine Culture
Depuis May (2002) et sa relecture moderne, féminine et adolescente du mythe de Frankenstein, les amateurs de fantastique voit en Lucky McKee la relève d’un cinéma de genre qui revendique très clairement des influences majeures : l’horreur politisée d’un Sam Raimi, ou l’atmosphère troublante d’un Dario Argento. Preuve en images avec The Woods, passé totalement inaperçu faute à une pression des studios pour remanier la fin (qui plus est ratée), qui emprunte le Bruce Campbell et la double lecture politique (toujours cet arrière fond qui s’oppose à l’autorité, et, au conventionnel en général chez Raimi) du premier, l’imagerie sixties et le décor du pensionnat pour jeunes filles du second. Soit l’histoire d’une ado pyromane qui entend les voix de la forêt, contrainte par ses parents de demeurer dans une étrange et oppressante demeure, au milieu d’une directrice inquiétante (excellente Patricia Clarkson), de gardiennes muettes et effrayantes, et de fantômes de sorcières venus du passé. Tout comme dans May, McKee se sert du fantastique comme point d’accroche à une thématique plus profonde : les troubles de l’âge ingrat, la méchanceté d’autrui, la solitude éprouvée au cœur de la différence. Son personnage (incarnée par la très crédible Agnes Bruckner) est tout aussi paumée que May, exclue par le groupe, troublante parfois, mais refusant- dans ses excès- toute idée de bienséance. Pour le reste, on reste en terrain connu, soit un jeu constant avec le lieu du récit (bruissements des feuilles, obscurité, forêt possédée et sorcellerie), qui n’apporte rien de neuf sinon cette seconde lecture bienvenue autour de l’adolescence, marque de fabrique d’un McKee à l’aise pour insuffler sa patte au milieu d’un univers mille fois vu et revu.