La carte et le territoire II

Par Placebo
Michel HOUELLEBECQ, La carte et le territoire, Flammarion, Paris, septembre 2010 (428 pages).

Trêve d'atermoiements, je ne parlerai pas, ou seulement un peu, du HOUELLEBECQ : à quoi bon en rajouter au concert d'éloges ou aux diatribes ?
Au rang des « contre », j'ai bien aimé l'éreintement de Pierre JOURDE  You Know What? Houellebecq is the hero dans son blog du Nouvel Observateur. Du côté des « pour », je n'ai pas beaucoup aimé la quasi générale glose sur la quatrième de couverture. Et à quand, de part et d'autre, un véritable commentaire sur le style, sur l'écriture ?
Si je tiens encore l'auteur pour une sorte de BALZAC contemporain, ce roman m'a semblé assez moyen. Les deux premières parties tiennent la route, pour peu qu'on ne soit pas allergiques aux descriptions détaillées -- telles celle du Samsung ZRT-AV2 (page 162)  ou sa dissertation sur la langue de modes d'emplois (page 163) -- dont voici un exemple :
« Le Sushi Warehouse de Roissy 2 proposait un choix exceptionnel d'eaux minérales norvégiennes. Jed se décida pour la Husqvarna, plutôt une eau du centre de la Norvège, qui pétillait avec discrétion. Elle était extrêmement pure -- quoique, en réalité, pas davantage que les autres. Toutes ces eaux minérales ne se distinguaient que par un pétillement, une texture en bouche légèrement différents; aucune d'entre elles n'était si peu que soit salée, ni ferrugineuse; le point commun des eaux minérales norvégiennes semblait être la modération. Des hédonistes subtils, ces Norvégiens, se dit Jed en payant sa Husqvarna; il était agréable, se dit-il encore, qu'il puisse exister tant de formes différentes de pureté. »
On s'amusera peut-être d'entendre Frédéric BEIGBEDER, qualifié de SARTRE des années 2010, entonner le Blues du businessman des PLAMONDON/BERGER (page 77). On appréciera sans doute la construction du récit de la vie et de la carrière du personnage principal, Jed MARTIN. On sourira vraisemblablement du commentaire de la société médiatique et libérale. Mais quid de la troisième partie, sorte de polar, où HOUELLEBECQ se voit assassiné et son corps dispersé telle une toile de Jakson POLLOCK ? Et de la conclusion téléphonée ?
Ma conclusion : bon divertissement, mais comme les bons livres ne manquent pas, je songe ici au dernier COETZEE, on ne perdra rien à faire l'impasse sur La carte et le territoire.