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Petit précis de résistance contre les abrutis de l’Etat

Publié le 13 novembre 2010 par H16

L’abruti niche partout, bien malheureusement. Mais donnez-lui du pouvoir, mieux, accompagnez-le de celui de l’Etat, et l’abruti peut devenir une nuisance telle qu’à moins de disposer d’une force de frappe conséquente, on ne pourra en venir à bout. L’actualité illustre fort à propos cette triste constatation.

Plaçons-nous dans une société comme la France en connaît, heureusement, des douzaines : une entreprise en plein essor, dont le chiffre d’affaire augmente régulièrement ainsi que le nombre d’employés.

Dans cette entreprise, le patron n’est (bizarrement) pas un de ces personnages en haut de forme, ventripotent et malsain, qui surcharge ses salariés sous une masse de travail frôlant l’esclavagisme et qui profite de la moindre incartade des cours de bourse pour virer un chapelet de prolétaires : en fait, c’est même un type plutôt bien, aimé de ses employés.

Tous ? Presque tous : l’un d’entre eux, habilement délégué du personnel, aime tellement son entreprise qu’il y vole jusqu’à 50.000 euros de matériaux divers, pour refaire un peu la décoration intérieure de son modeste foyer ainsi que l’aménagement de son jardin.

Le vol est constaté. Le dépôt de plainte acté, la gendarmerie prévenue, le suspect appréhendé, les aveux enregistrés. L’étape suivante consiste, avant la prison, en un licenciement, parfaitement logique.

Mais patatras : l’Inspection du Travail décide que voler n’est pas jouer, et qu’en conséquence, ce n’est pas un motif suffisant de renvoi. Oui, vous avez bien lu : l’Inspection du Travail casse la procédure de licenciement pour motif insuffisant. Et non, ce n’est pas une erreur de procédure qui aboutit à cette décision ubuesque, c’est bien la nature de la faute qui est jugée insuffisante :

C’est ici que la leçon de résistance contre les abrutis de l’état commence.

Car en effet, pour pouvoir effectivement se rebeller contre l’Inspection du Travail et obtenir gain de cause, il est absolument et rédhibitoirement utopique de croire que lancer une procédure en référé au tribunal administratif servira à quelque chose.

Il faut du lourd, du costaud : comme le patron, si vous devez faire valoir votre bon droit, vous devrez passer par la case « grève de la faim ».

Evidemment, ça ne suffira pas. Il vous faudra ensuite trouver le support de plusieurs centaines de personnes. Heureusement pour lui, ce patron a eu le bon goût de ne pas trop fouetter ses salariés qui ont (probablement sous la menace, n’en doutons pas) accepté de mener des actions pour montrer leur sympathie avec leur employeur.

Très concrètement, cela se traduit par des opérations escargots, ce qui revient à emmerder des centaines de personnes supplémentaires aux accès de Rouen un mercredi midi histoire de faire connaître l’iniquité de la situation.

A la suite du gentil bordel obtenu, presque mécaniquement, les journalistes vont s’en mêler ; la prise en sauce étant assurée, la suite est presque naturelle : l’Inspection du Travail – qui a poliment refusé de commenter toute l’affaire dès qu’on est venu la chercher – s’est bien vite rétractée. Le salarié indélicat pourra bien être licencié, le patron va pouvoir recommencer à se nourrir.

Cette affaire est consternante sur une multitude de niveau et illustre très bien l’état de pourrissement grandiose des relations sociales dans ce pays.

Il semble ainsi manifeste que la notion de « salarié protégé » donne des privilèges exorbitants. On peut toujours imaginer un monde magique où ce privilège n’est pas employé bien au-delà de ce qu’il permet, mais la réalité force à constater que bien nombreux sont les abus.

Il semble que l’Inspection du Travail ne fasse pas preuve ou bien de toute la rigueur ou bien de toute la lucidité nécessaire au traitement des cas qui lui sont soumis. Ou alors, le quotient intellectuel moyen des gens qui y travaillent est notoirement trop bas (un mélange de ces différentes options est plus que possible : il est probable tant le nombre de cas hallucinants à l’instar de celui de ce patron sont nombreux tous les ans). On ne peut pas écarter aussi une vision assez idéologique dans la décision initialement prise de refuser le licenciement, puisqu’après tout – et tout le monde le sait – les patrons sont naturellement des menteurs et des exploiteurs : toute demande de licenciement sur un motif de vol ne peut être que suspecte.

Mais au-delà même du droit du travail et de sa vision de combat prônée par l’Inspection du Travail, on peut noter que la seule action qui ait permis une résolution rapide du problème aura consisté en une opération escargot et en une intervention des médias ; autrement dit, pour faire bouger quelque chose en France, il semble qu’il faille emmerder le maximum de personnes et donner à cet emmerdement le retentissement le plus grand possible.

Enfin, on notera la rapidité de réponse de l’administration quand, justement, des milliers de personnes se retrouvent coincées. On aimerait tant que les problèmes rencontrés avec le fisc, les assistantes sociales, les administrations de la sécu, les opérations farfelues sur les lignes France Télécom, les plaintes pour colis délicatement écrabouillés par la Poste, ou les milliers de bureaucrates dé-bor-dés se résolvent avec la même rapidité !

Finalement, c’est peut-être ça, le secret du bonheur en France : savoir organiser des flash-mobs massives dans les locaux des administrations fautives dès qu’on est emmerdé ou pouvoir mobiliser des centaines de fans sur un thème fédérateur comme « Faire Comprendre A La Sécu Qu’on N’Est Pas Mort » ou « Mon Homonyme Vous Entube, Moi Pas, Merci De Faire Les Corrections Nécessaires ».

Pas de doute : la France va devenir un vaste espace de jeux où, pour échapper aux abrutis de l’Etat, l’amusement principal consistera à emmerder le plus de monde possible.


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