Stupéfaction. Le compte Facebook « Villefluctuante » vient d’être désactivé pour avoir enfreint la « Déclaration des droits et responsabilités » qui interdit à une personne morale de posséder un compte sur ce réseau social.
Travaillant sur l’inclusion des lieux dans l’espace des flux, cette exclusion est cocasse. L’assertion qui veut que désormais la société en réseaux détermine les rapports sociaux de manière binaire entre inclusion et exclusion trouve ici une application pratique plus efficace que n’importe quelle expérience sur le terrain pour deux raisons.
La première est que les 4.700 « amis » de Villefluctuante avaient quelque chose de factice. Le compte avait été créé en janvier 2010 et avait grossi au rythme des demandes que nos « nouveaux amis » nous faisaient. Peu farouche, le compte acceptait presque toutes les demandes, soit une dizaine par jour. Peu à peu nous avions quitté les frontières françaises pour accepter des « amis » espagnols, italiens, russes et depuis peu israéliens, chinois… Cela avait quelque chose de Babelien sachant que ce compte ne proposait rien d’excitant hormis son profil rappelant nos thèmes de recherche que bien peu d’Internautes devait consulter avant de faire leur demande. La tour de Babel s’est donc effondrée ce matin.
La deuxième raison réside dans l’espace même des flux. Facebook reste une entreprise privée qui donne l’illusion d’ouvrir un espace public de relation. Cela pose la question de la nature de l’espace public aujourd’hui. Si la culture européenne s’est construite sur un espace public porteur de l’intérêt général et propice à la rencontre, force est de constater que celui-ci s’est déplacé vers l’espace privé. Aujourd’hui, on se donne rendez-vous bien plus dans les supermarchés et autres galeries commerciales, ou encore dans les lieux de transport. Or ces lieux sont régit par le droit privé et obéissent aux règles de leur propriétaire. Il en va de même pour les réseaux immatériels.
J’avais prévu de rendre compte de l’expérience Villefluctuante d’ici quelque semaines en faisant le bilan d’une année d’activité et en géolocalisatant sur la carte du monde tous nos « amis ». Facebook vient de donner un tournant bien plus intéressant à l’expérience : la rupture de contrat par la faute de l’utilisateur. L’exclusion définitive du réseau. Un bannissement!