Il est président du deuxième parti de l’opposition au conseil municipal de Montréal. Le maire Gérald Tremblay, dans un geste d’ouverture, lui avait offert, suite à la dernière élection, de siéger au comité exécutif de la ville. Richard Bergeron vient d’être remercié de ses services et quitte le comité avec fracas.
Lors de l’élection de 2009, Bergeron et son parti Projet Montréal ont créé une surprise en obtenant un pourcentage élevé de suffrages. Je l’avais appuyé publiquement dans mon blog malgré l’image loufoque d’un illuminé que les médias faisaient de lui. Sa biographie, son programme politique, ses discours m’avaient persuadé qu’il y avait là une possibilité de relancer Montréal. Je croyais qu’il était l’homme de l’heure, car le maire-sortant Tremblay était prisonnier dans un tourbillon d’accusations de patronage et le parti Vision Montréal, avec Louise Harel, n’était devenu que le porte-étendard du Parti Québécois.
Richard Bergeron avait lié sa participation au comité exécutif à celle de son projet pour l’échangeur routier Turcot. Il a ses propres idées, puisqu’il est urbaniste, et a tout fait pour influencer la ville et le ministère des Transports du Québec de modifier le plan original. Le ministère à accepter plusieurs des modifications proposées en changeant le trajet, ajoutant un tram-train, une piste cyclable, des espaces verts, etc.., mais, il ne s’est pas plié à toutes les suggestions de Bergeron qui consistaient, entre autres, à rétrécir les voies pour freiner le nombre d’autos qui accèderont à la ville afin de réduire la production de pollution sur la métropole. Le gouvernement n’accepte pas cette approche radicale puisqu’il a la responsabilité de répondre aux besoins futurs et croit inconcevable de bâtir un si important échangeur sachant d’avance que ceux qui entreront à Montréal devront subir de longues heures d’attentes pour y accéder. Si, dans 10 ans, le besoin de diminuer la pollution persiste, le ministère pourra toujours installer des ralentisseurs pour réduire le volume de véhicules. Par contre, il estime que la venue des nouvelles autos électriques et hybrides réduira sensiblement le niveau de pollution, mais pas nécessairement le nombre d’automobilistes. Et, à ce moment-là, avec son projet, les routes auront la capacité requise pour les absorber.
Le nouveau projet est flexible, intelligent et économiquement acceptable puisqu’il est évalué à 3 milliards $, alors que celui proposé par la ville a été estimé à 6 milliards $.
Richard Bergeron a publiquement menacé le maire de démission si le projet final du ministère était approuvé par la ville. Il s’est montré un peu fanfaron. Tremblay a aussitôt répliqué en exigeant son ralliement à la décision future si elle devait être majoritairement acceptée par le comité exécutif. Il n’exigeait pas que Bergeron vote pour, mais qu’il soit solidaire. Incapable de l’être, Richard Bergeron a été renvoyé. Lors de la conférence de presse qui suivit, ce dernier a traité le maire de Montréal de tous les noms : « sournois, malhonnête, manipulateur, traître, vendu au parti libéral du Québec, infidèle aux Montréalais, vision frileuse et passéiste, cowboy » et encore. Il a même menacé le maire de le déchirer sur la place publique. Pourtant, c’est le même maire avec lequel il a travaillé main dans la main durant la dernière année, copain-copain.
La vigueur et la rigueur intellectuelles sont les qualités importantes pour les hommes et femmes politiques. Cela fait partie intégrante de l’honnêteté intellectuelle. Je n’ai jamais aimé ceux qui par opportunité utilisent n’importe quel argument disponible pour mousser leur personne et leur parti au lieu d’appuyer leur argumentation sur des positions de principe et des faits réels. Cette situation est devenue beaucoup trop fréquente, de nos jours, en politique québécoise. Cependant, nul ne peut être complètement certain de ses présuppositions, surtout dans des projets de cette nature car il y a plus d’une solution valable. C’est pourquoi, ajuster ses convictions personnelles à l’évidence du bon sens, de la solidarité, de l’intérêt public, du compromis raisonnable et mettre de côté toute partisannerie politique est aussi agir avec rigueur.
Les mots flamboyants et méchants de Bergeron démontrent qu’il n’est finalement qu’un politicien qui ne cherche qu’à marquer des points politiques. Pour lui, il a raison et tous les autres ont tort et sont des « pas bons ». Au lieu de chercher à rallier l’opinion publique en expliquant et en répétant souvent, le plus clairement possible et sans insinuations mensongères, ses objections techniques à ce gigantesque et complexe projet qu’est l’échangeur Turcot avec ses multiples facettes : développement urbain, transport public, environnement, espaces verts, expropriations, etc.., Bergeron a choisi la facilité, le chemin de l’insulte et de la politicaillerie pour se justifier, se grandir. Chemin faisant, il a sali volontairement la réputation du maire.
Richard Bergeron a donné l’impression de vouloir s’élever en diminuant son adversaire en vue de la prochaine élection de 2013. Ce sont des attaques malicieuses et injustifiées comme celles qu’il a faites qui font que de plus en plus de Québécois et Québécoises perdent confiance dans leur classe politique. Agir de façon irresponsable en accusant ses adversaires de tous les péchés d’Israël n’est pas dans l’intérêt de notre collectivité. Nos leaders politiques sont importants et il faut les respecter, quelque soit leur parti ou leur option politique. On peut être en désaccord sur certains aspects de leur pensée politique et le dire très haut, mais on se doit de respecter chaque individu qui nous dirige, qu’il soit au pouvoir ou dans l’opposition. Le débat doit être sur le fond des choses.
Je suis fortement déçu de cet homme politique qui promettait beaucoup mieux.
Claude Dupras