Sarko a décidément bien du mal à revêtir les habits présidentiels. Le discours à la mémoire du Général en apporte une preuve supplémentaire.
L’ensemble de la célébration laisse une drôle d’impression : Sarko essaie de “faire” président, mais n’y arrive visiblement pas : gerbe déposée au pas de course, discours lu sans la moindre émotion, hommage au Général se transformant en un réquisitoire pro-domo, servant à justifier pêle-mêle la réforme des retraites, l’hyper-présidence, la régulation financière. Tout au long du discours (texte intégral), le président ne peut d’ailleurs s’empêcher de décocher des sourires déplacés de bateleur de foire. L’impression qu’a été rendu hommage au Général par un nouveau genre de président, mélange contre nature du pizzaiolo et du ravi de la crèche.
Le discours commence bien mal :
Qui ne se souvient, parmi les gens de ma génération, de cette soirée du 9 novembre 1970 où la France apprit que le général de Gaulle venait de mourir ? Il y eut comme une grande stupeur qui saisit le pays tout entier.
Sarko évoque la nuit de la mort du Général. Or, raté Guaino, si ce dernier est bien mort dans la soirée du 9 Novembre, la nouvelle ne fut rendue publique que le …10 Novembre. Ce matin, les journalistes soulignaient la bourde, notant avec une certaine ironie que la date du 9 Novembre avait déjà joué des tours à Sarko qui avait prétendu être allé à Berlin cette date-là avant que ne soit démontré qu’il n’en était rien. Une affabulation de plus, dont la geste sarkozienne est truffée.
Suit une longue évocation de la vie et l’oeuvre politique du Général, que Guaino a cru judicieux – pour faire solennel – de truffer d’imparfaits du subjonctif, que l’on est en droit de douter que ce grand amateur de La Princesse de Clèves et indécrottable fan de Johnny qu’est Nicolas Sarkozy n’ait appréciés à leur juste valeur.
Suit une longue justification par Nicolas Sarkozy de sa politique, par une lecture toute personnelle de l’oeuvre politique du Général. L’hyperprésidence ? En germe dans les institutions voulues et bâties par le Général. La réforme des retraites ? Un signe de détermination en droite ligne de l’héritage gaulliste. La régulation financière ? Implicite dans la célèbre tirade du Général sur la politique de la France ne se faisant pas à la corbeille de la Bourse.
Captation d’héritage éhontée, digne de François-Marie Banier.
Mais, là où – pour reprendre les termes de Villepin – le “problème de la France” prend toute son ampleur c’est quand ce dernier déclame :
Mais le devoir du Président de la République, responsable devant la Nation, c’est de décider sur le seul critère de l’intérêt général.
Un instant…Oubliée la fête de la victoire au Fouquet’s un soir de mai 2007 ? Oubliés le bouclier fiscal, la politique menée favorable à l’excès aux riches et puissants ? Oubliée la honteuse affaire de népotisme, digne de chefs d’Etat africains, du parachutage de Sarko Junior à l’EPAD ? Oubliées les nominations de proches du président à la tête, qui d’une banque, qui de l’opérateur historique de télécoms ? Oubliée la mise sous tutelle de l’audiovisuel public ? Oubliées l’affaire Woerth-Bettencourt ou encore les écoutes de journalistes ?
L’époque a le président qu’elle mérite. Gageons que De Gaulle, lui, ne méritait pas que lui fût rendu hommage par un tel président.