Laisse-moi entrer est un excellent roman de " old school ".
Il est devenu difficile, à l'époque de la " Bit-Lit " et des séduisants tels qu'Eric Northman, Edward Cullen, Bill Compton, Bones, Mircea, Gabriel etc., de trouver un bon livre de dans lequel les morts-vivants sont de véritables monstres, quelle que soit la part d'humanité qu'ils ont pu se conserver.
Ce livre, écrit dans les années '80, nous réserve donc d'agréables surprises, mais attention, c'est un livre de avec tous les codes qui peuvent s'appliquer à ce genre !
L'histoire, fort sombre, se déroule dans une petite banlieue désenchantée de Stockholm. L'ambiance à elle seule est déjà grisâtre. Ici, tous les habitants sont écrasés par les soucis et se débattent au quotidien avec leurs problèmes. Peut-être est-ce pour cela qu'au début personne ne se rend compte de QUI emménage en leur milieu.
Au centre de l'histoire nous trouvons le jeune Oskar, un garçon rondouillard de douze ans, harcelé à l'école par des garçons de sa classe, qui vit seul avec sa mère. Oskar est timide et intimidé.
L'un de ses voisins du même âge est Tommy, un garçon qui supporte mal le nouveau petit-ami de sa mère, un policier, et commet donc des petits larcins comme pour se rebeller contre celui-ci.
Nous trouvons également dans ce quartier Lacke, un homme alcoolique, ainsi que ses amis et Virginia, dont il est amoureux. Le groupe se retrouve quotidiennement dans un restaurant chinois pour boire à moindre coût, tentant de trouver de quoi payer la prochaine tournée.
La vie est dure dans ce quartier.
Et une nuit emménagent donc Eli et Hâkan, qui se présentent comme le père et sa fille. Seulement, Eli est un vampire de plus de deux cents ans - un vampire dont l'apparence est celle d'une fillette de onze ans. Hâkan, un ancien professeur de Suédois, a perdu son travail en raison de ses penchants pédophiles qu'il maîtrise pourtant parfaitement, il n'est jamais passé à l'acte, ni avec un enfant humain ni avec Eli, qu'il aime pourtant profondément et pour qui il fait tout ce qu'elle désire.
Eli, de son coté, vit cette situation difficile abordée dans maints livres de : qu'arrive-t-il lorsqu'un enfant préadolescent devient vampire et doit vivre éternellement avec ce corps d'enfant ? On pense immédiatement à " Entretien avec un vampire " d'Anne Rice, ou encore à l'interdiction faite dans " Twilight " de créer des à partir d'enfants ( j'ai du mal à seulement citer cette Saga que je n'ai pas du tout aimée, mais elle sera plus connue à l'heure actuelle et c'est donc une référence inévitable).
Ici, le problème est abordé sans qu'une réponse ne soit réellement apportée. Eli a simplement ses propres problèmes. Mais une chose est certaine : elle est un véritable monstre. Elle doit impérativement boire le sang frais d'humains et pour cela tuer, elle n'a pas le choix. Soit elle le fait par ses propres moyens, soit elle parvient à convaincre Hâkan de le faire pour elle afin de recueillir le sang de sa victime. Et par amour, ce dernier tue ses semblables, bien malgré lui, devenant ainsi un assassin, poussé par un amour pervers et aveugle.
Avec l'arrivée de cet étrange couple dans la banlieue, les meurtres commencent donc logiquement, et bientôt tout le voisinage est terrifié par le meurtrier en série y sévit, qui n'épargne ni les jeunes, ni les adultes.
Dans ce contexte difficile une chose improbable se produit : Eli se lie d'amitié avec Oskar, elle lui apporte son soutien, croit en lui, et Oskar tente de découvrir ce que cache cette petite fille étrange, de la réveiller à la vie.
Très lentement, la peur s'insinue dans tous les foyers, les meurtres se rapprochent, les indices sur l'assassin pointent dans la direction de la bonne personne. Tout aussi lentement, Oskar prend conscience qu'il faut absolument qu'il réagisse pour se libérer de son statut de souffre-douleur, mais il n'y parvient pas pour autant. Le groupe d'amis entourant Lacke n'est pas épargné, un de leurs copains disparaît, et là encore, ne faudrait-il pas se réveiller da la léthargie ambiante ?
Chaque habitant du quartier est touché d'une façon ou d'une autre. Et pourtant, l'arrivée du vampire - ou plutôt de l'assassin - ne change pas véritablement les choses dans cette banlieue, c'est juste un problème de plus que chacun doit affronter à sa façon.
On a l'impression que c'est plus une impulsion donnée à tous, accentuant les problèmes préexistants. Mais il n'est pas certain que cette impulsion suffise à changer quoi que ce soit!
J'ai adoré ce livre.
Si c'est bien un livre d'horreur, on s'aperçoit aussi que l'auteur dépeint avec justesse le quartier de Stockholm, le désenchantement généralisé, l'absence de perspectives. Ici, le plus important dans la vie d'un homme peut être un trophée qu'il a gagné à une époque désormais révolue.
Et le vampire lui-même est si ambigu : Eli a des cotés humains et pourtant elle n'en demeure pas moins un véritable monstre, parfaitement consciente de l'être.
Autant j'adore la Bit-Lit, autant un bon livre de me fait du bien et me fait retrouver mon enfance ! Ici, on a peur, on n'a pas du tout envie de rencontrer le vampire, et surtout, on n'a pas du tout envie de devenir un vampire, car les inconvénients sont énormes.
Pas de " fangbangers " dans Laisse-moi entrer !!
Et il y a un petit bonus pour les nostalgiques des années '80 : vous retrouverez dans ce livre non seulement le Rubik-Cube, mais aussi les baladeurs " Walkman ", les cassettes qu'on enregistre ou encore les 33-tours.
Un livre à lire pour tous ceux qui aiment ce genre !