Gérard Collomb ce matin sur France Inter a ouvertement mis en cause la stratégie de la Première secrétaire et annoncé sa candidature aux primaires. A l’approche de celles-ci les vieux démons ressurgissent. Martine Aubry devra jouer serré pour maintenir l’unité de son parti.
Rien de vraiment nouveau sous le soleil. Les sociaux-démocrates, ils préfèrent désormais être désignés sous le vocable “réformistes”, continuent à reprocher à leurs camarades “radicaux” leur absence de réalisme pour ne pas dire leur propension à tenir des promesses que les socialistes seraient dans l’incapacité d’honorer s’ils venaient aux affaires.
Cette poussée d’urticaire contredit Benoît Hamon qui assure être arrivé à un compromis. Plus que le fond, c’est la méthode qui fait débat. Pierre Moscovici a dénoncé mardi avant le Conseil National (CN) une “forme d’opacité des lieux d’élaboration. Le PS n’a pas à avoir peur des débats, de sa diversité“.
L’aile droite demande un chiffrage et une hiérarchisation quand Martine Aubry et Benoît Hamon jugent par la voix de David Assouline que, “Le chiffrage précis, bien entendu, viendra ensuite. Il y a des étapes. Nous ne sommes pas encore à faire un programme de gouvernement“. Et plus la direction nationale assure qu’il ne s’agit pas demain de raser gratis, plus ses détracteurs pensent le contraire.
Toute en finesse, Ségolène Royal et ses amis sont restés éloignés de la bagarre dans la mesure où l’ancienne candidate des socialistes aux présidentielles de 2012 est parvenue à faire retenir ses propositions sur l’emploi des jeunes et notamment que ce thème soit déclaré grande cause nationale en cas de victoire du PS.
A l’inverse, la Direction nationale (Aubrystes et motion Hamon) a fait le choix risqué d’un passage en force. Stratégie gagnante dans un premier temps puisque le texte a été largement adopté. Le comptage des voix fait ressortir une aile droite très minoritaire mais surtout une trés faible participation puisque adopté avec 59 votes pour et 12 abstentions sur 306 membres.
Une victoire qui risque cependant d’être à la Pyrrhus car c’est le premier texte de convention non adopté à l’unanimité par le parlement du parti. La suite de la procédure sera donc à regarder de près. Suite à l’épisode du Conseil national, les militants auront à se prononcer le 2 décembre avant la convention nationale du 11 décembre censée entériner la version définitive.
Le texte de 45 pages qui doit être l’une des pierres angulaires du projet présidentiel pour 2012 contient plus de 200 propositions sur des sujets très divers allant de l’éducation à la santé en passant par le logement et les services publics.
Les crispations sont liées au calendrier retenu par la direction du PS. Entre la poule et l’œuf, Martine Aubry et ses amis ont fait le choix du second. A savoir, on détermine d’abord la plateforme programmatique de 2012, on choisit le candidat des socialistes après.
Tout naturellement, un certain nombre de candidats déclarés, Valls, Hollande ou putatifs tel Pierre Moscovici ne veulent pas être pris en otage par un texte susceptible de les mettre en porte-à-faux s’ils sortaient vainqueurs des primaires.
Lors du CN, Martine Aubry a dénoncé les critiques et s’est employée à les faire passer pour de simples “postures” de candidats aux primaires. Pas totalement faux mais pas totalement vrai.
La difficulté pour le PS est de trouver un point d’équilibre entre “les réponses nouvelles” et “innovantes” souhaitées par Martine Aubry et les réformistes réalistes qui ne veulent pas prendre le risque d’un atterrissage douloureux en cas de victoire, comme en 1983, du fait des contraintes économiques. Michel Sapin, proche de François Hollande estime ainsi que la méthode Hamon “revient à faire la liste des courses avant de regarder ce que l’on a dans son porte-monnaie“.
Le fossé est encore plus profond. Il existe bel et bien un important clivage sur la place de l’Etat et la puissance publique dans l’organisation de la société. L’aile droite du PS dénonce à cet égard une vision surannée qui considère que l’Etat doit s’occuper de tout et accompagner, sinon prendre en charge, l’individu tout au long de sa vie. Derrière cette vision, les sociaux démocrates redoutent que le PS renoue avec la tentation de l’assistanat dans un contexte marqué par un Etat exsangue.
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