Par Catherine
A découvrir au musée du Louvre jusqu’en janvier 2011, une manifestation de l’année France-Russie 2010 à l’origine de nombreux rebondissements politico-artistiques : Contrepoint. L’art contemporain russe…
Une exposition menacée
Les rapports tendus entre la Russie et ses artistes vivants, sont désormais intégrés comme des réalités indiscutables : Directeur de musée et commissaire d’exposition condamnés pour « incitation à la haine » (musée Sakharov - Art interdit 2006), artistes menacés, exilés, censurés… Quelques cas notoires sont évoqués sur le blog louvrepourtous dans l’article Artistes en Russie entre rébellion et répression.
En accord avec cette « politique » les autorités russes censurent tout d’abord l’artiste Adveï Ter-Oganian, et s’opposent fermement à la présentation de son œuvre dans le cadre de l’exposition prévue au Louvre. D’autres artistes programmés menacent de boycotter l’exposition en Solidarité à Ter-Oganian. Des « négociations » -qui auront tout de même fait couler beaucoup d’encre- avec le Musée du Louvre calment le jeu et la Russie accepte de laisser sortir de son territoire les œuvres jugées provocantes et incitatrices « à la haine et à la violence ». Les œuvres abstraites de l’artiste sont trop « parlantes » :
Adveï Ter-Oganian • Radical abstractionism, n°5, 6, 7 et 8, 2004.
Au final, la surprise est créée par l’artiste lui-même le jour du vernissage. Il demande que ses toiles soient décrochées par solidarité avec d’autres créateurs russes forcés de s’exiler. L’histoire se termine bien : le galeriste, propriétaire des toiles de Ter-Oganian, assure qu’elles seront exposées, comme prévu, pendant toute la durée de la manifestation. Et, selon le Louvre :
avec l’ensemble des artistes et des œuvres que nous nous proposions d’inviter pour cet événement
Erik Boulatov • Liberté, 1992, 155 x 295 cm Huile sur toile
Collection Olivier et Bertrand Lorquin, Photo : Jean-Alex Brunelle © Adagp, Paris 2009
Encore aujourd’hui, comme le précise Marie-Laure Bernadac (conservatrice générale)
Il y a des libertés très réduites et certains artistes connaissent des situations difficiles.
Être un artiste contemporain ne signifie pas seulement être vivant aujourd’hui !
C’est avant tout témoigner, interpeller le public. Sa mission est de porter la parole au-delà des murs et des frontières, de libérer la pensée trop souvent opprimée. L’œuvre est fondée sur le message, la nécessité d’apostropher, de forcer la réflexion, de susciter l’intérêt chez le visiteur. L’art, c’est sa réalisation. Comme le dit si justement, Marie Laure Bernadac :
Une œuvre doit avoir un contenu immédiat, un sens, un message, ce n’est pas gratuit. Ces artistes sont capables de répondre à un art lisible, efficace qui pose des questions et arrête la pensée.
Toutes générations confondues
Cette exposition rassemble une quinzaine de créateurs multi-générationnels mais tous désireux de libérer la pensée par le biais de leurs œuvres. L’identité intrinsèque des différentes compositions jaillit devant le visiteur éclairé, quant à la diversité des styles et des supports elle ne manquera pas de ravir les amateurs !
Une œuvre d’art en Russie ce n’est jamais l’art pour l’art. Il y a toujours un lien à l’histoire avec un arrière-fond sociologique, politique… En France c’est plus formaliste.
(Marie-Laure Bernadac)
L’art contemporain s’immerge dans le Louvre et y côtoie huit siècles d’histoire.
Le Musée aborde une transition. Il secoue les habitudes, dépoussière, innove, ose, se démarque. Il se libère peu à peu de ses chaînes. Le Louvre Médiéval, choisi pour exposer ces artistes, offre un écho particulier à leurs œuvres. Des liens se créent, une nouvelle histoire est en train de naître…
A voir, donc si comme nous vous avez un peu pris du retard, et pour poursuivre l’aventure de l’art contemporain Russe en France, à partir du 15 et jusqu’au 21 novembre prochain : Le festival d’art contemporain russe « Sibérie inconnue » se déroulera à Lyon la Fondation caritative privée Mikhaïl Prokhorov, organisatrice du festival.
Contrepoint. L’art contemporain russe, de l’icône à l’avant-garde en passant par le musée. Exposition du 14 octobre 2010 au 31 janvier 2011.
Musée du Louvre