Deux ans après la première édition des Prix Pinocchio du développement durable, les Amis de la Terre, Peuples Solidaires et le CRID (Centre de recherche et d’information pour le développement) ont lancé l’édition 2010 des Prix Pinocchio. Le vote, ouvert du 13 octobre au 9 novembre, aura comptabilisé 7094 voix. Les résultats sont tombés hier, mardi 9 novembre 2010, lors d’une cérémonie publique de remise de prix. Qui sont les grands vainqueurs 2010?
- Pourquoi le prix Pinocchio ?
Les prix Pinocchio du développement durable, organisés par les Amis de la Terre – France , ont pour but d’illustrer et de dénoncer les impacts négatifs de certaines entreprises françaises, en totale contradiction avec le concept de développement durable qu’elles utilisent abondamment.
Aloys Ligault, chargé de campagne Responsabilité des entreprises aux Amis de la Terre, constate : « Deux ans après la première édition, les Prix Pinocchio démontrent encore malheureusement leur utilité. Tout le monde parle de capitalisme vert et d’économie verte, mais sur le terrain, la réalité est encore une fois bien différente ». Les Prix Pinocchio mettent en lumière de nombreux abus concrets. Dans le cadre de la campagne du Forum citoyen pour la responsabilité sociale des entreprises, Peuples Solidaires, les Amis de la Terre et le CRID demandent un encadrement juridique des impacts environnementaux et sociaux des multinationales, pour que cesse leur quasi impunité de fait dans les pays du Sud.
- Les nominés 2010
Pour rappel, cette année, les entreprises nominées étaient les suivantes :
- Dans la catégorie Droits de l’Homme : Sodexo, GDF Suez, Vilgrain et Orange
- Dans la catégorie Environnement : Total, Eramet, AXA et Alstom
- Dans la catégorie Greenwashing : le Crédit Agricole, Renault, l’aéroport de Beauvais-Tille, et la SNCF
- Les lauréats 2010
Prix Pinocchio Droits Humains
• 1ère place : JL Vilgrain – Somdiaa – Sosucam avec 32% des votes
L’entreprise camerounaise Sosucam (filiale du groupe français SOMDIAA, elle-même filiale du Géant JL Vilgrain) a signé avec le gouvernement camerounais en 1965 puis en 2006, deux baux de 99 ans concernant des milliers d’hectares afin d’y développer ses activités de production et de transformation de la canne à sucre. Ces deux projets ainsi que le montant des indemnités lié aux transactions de terres ont été validés au détriment des populations locales. Si le premier contrat prévoyait des indemnités, les familles n’en ont jamais bénéficié. Dans le cadre du deuxième contrat, la Sosucam a accepté de verser une indemnité annuelle : chaque famille peut ainsi toucher 5 euros par an !
• 2ème place : Sodexo avec 28% des votes
• 3ème place : GDF-Suez avec 24% de votes
• 4ème place : Orange avec 17% des votes
Prix Pinocchio Environnement
• 1ère place : Eramet avec 39% des votes
Eramet emporte haut la main le prix Pinocchio Environnement pour ses exploitations de nickel en plein de la forêt tropicale primaire de Nouvelle-Calédonie et bientôt en Indonésie ! Il faudra donc compter sur la destruction de milliers d’hectares de zone boisée, mettant ainsi en danger la biodiversité très riche de la forêt indonésienne et compromettant la survie des populations locales dépendantes de la forêt. Ainsi, ce ne sont pas moins 4 espèces d’oiseaux et 7 espèces d’amphibiens en voie de disparition qui peuplent la future zone d’extraction minière.
• 2ème place : Total avec 29% des votes
• 3ème place : Alstom avec 19% de votes
• 4ème place : AXA avec 13% de votes
Prix Pinocchio Greenwashing
Pour mémoire, le terme Greenwashing est utilisé par les groupes de pression environnementaux pour désigner les efforts de communication des entreprises sur leurs avancées en termes de développement durable, avancées qui ne s’accompagnent pas de véritables actions pour l’environnement. Le prix Pinocchio « Greenwashing » est remis à l’entreprise ayant mené la campagne de communication la plus abusive et trompeuse au regard de ses activités réelles parmi les nominés.
• 1ère place : Crédit Agricole avec 55% des votes
55% des votes : cela a de quoi faire réfléchir. Pourquoi une telle levée de boucliers contre le Crédit Agricole ? L’entreprise mérite une telle récompense grâce à se publicité « It’s time for Green Banking » qui met en scène Sean Connery dans un décor d’apocalypse.Mais grâce au « sens commun » du Crédit Agricole, un monde harmonieux fait d’éoliennes et de villes entourées de nature est rendu possible. Néanmoins, selon un rapport publié en 2007 par les Amis de la Terre, la banque était responsable en 2005 de l’émission d’environ 200 millions de tonnes de CO2 induites (c’est-à-dire provoquées par les projets financés par la banque), soit l’équivalent des émissions d’un petit pays africain. Et c’est sans compter, les investissements douteux de la banque, du point de vue respect de l’environnement. Celui pour la méga-centrale à charbon de Medupi en Afrique du Sud consitute un bon exemple
• 2ème place : Renault-Dacia avec 20% des votes
• 3ème place : Sncf Zéro Carbone avec 16% des votes
• 4ème place : Aéroport de Beauvais-Tillé avec 9% des votes
- L’avis Sequovia
Si de nombreuses entreprises communiquent sur leurs engagements en faveur de la RSE et de l’environnement, les abus sont aussi très nombreux. Ainsi, comme nous l’avions souligné dans l’article portant sur l’enquête menée par Limelight Consulting sur le thème de la communication responsable, 31% des répondants, au sein même des entreprises, estiment que le risque d’être taxé de Greenwasing est élevé ! Respecter les valeurs du développement durable et savoir communiquer justement dessus sont deux tâches bien différentes auxquelles les entreprises ne se prêtent pas toujours.
Pour aller plus loin : Formation Détenir les clefs de la commmunication responsable