Il s’agit d’un consensus : les règles régissant la représentation élue du personnel dans les entreprises sont complexes et coûteuses. Les partenaires sociaux, qui sont en phase de délibération sociale sur ce thème depuis octobre 2009, n’ont toujours pas officiellement prévu de lancer une véritable négociation.
Espérons que le rapport « 10 propositions pour simplifier la représentation élue du personnel », adopté le 23 septembre 2010 par la CCIP, les aiguillonne s’ils décident d’ouvrir une véritable négociation lors de leur prochaine réunion, prévue le 12 octobre 2010.
Des chiffres qui donnent le vertige
En 2008, le rapport Attali avait démontré que le passage de 49 à 50 salariés entraînait l’application de 34 réglementations supplémentaires pour un coût avoisinant 4% de la masse salariale. Autre donnée frappante : la représentation élue du personnel se complait actuellement dans 466 articles législatifs, auxquels il faut ajouter les articles réglementaires et la jurisprudence, foisonnante sur le sujet. Je ne me risquerais pas à donner une estimation de la quantité globale de normes applicables : avis aux amateurs de calcul…
De fait, ces règles engendrent un effet de seuil : de nombreux chefs d’entreprises se refusent ou hésitent à embaucher de nouveaux salariés en raison de ces contraintes réglementaires. Conséquence : au 1er janvier 2008, 98,9% des entreprises françaises avaient moins de 50 salariés et seules 6,7% d’entre elles employaient au moins 10 salariés. En comparaison de leurs consœurs germaniques et britanniques, les Entreprises de Taille Intermédiaire françaises font figure de Petits Poucets, alors que ce sont justement les entreprises les plus dynamiques et qui ont le mieux résisté à la crise économique.
La CCIP formule donc un ensemble de propositions pour alléger ces carcans et libérer ainsi le potentiel de croissance des entreprises. Leur substantifique moelle tient en deux idées phares.
Premièrement : une représentation unique du personnel au fonctionnement simplifié
En clair, il s’agit de fusionner les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène et de sécurité des conditions de travail au sein d’une Représentation Unique du Personnel (RUP) dans l’ensemble des entreprises d’au moins onze salariés.
Précisons que, dans ce schéma, la fusion n’entraîne ni une diminution du droit à représentation des salariés ni une augmentation des obligations des chefs d’entreprises. En effet, les attributions et les missions de cette nouvelle instance seraient similaires à celles, combinées, des différents représentants élus, et ce aux mêmes seuils qu’actuellement.
Deuxièmement : une simplification « donnant-donnant »
- Pour les salariés
Les salariés et leurs représentants ne sont pas oubliés dans ce rapport qui porte une simplification totalement respectueuse de leur droit à représentation. Les représentants du personnel y gagneraient notamment une approche plus transversale des problématiques de l’entreprise, revendication qu’ils formulent de longue date.
Surtout, la structure en charge de l’hygiène et la sécurité des conditions de travail tirerait de sa mutation en une commission de la RUP une légitimité supplémentaire grâce à l’élection directe de ses membres. Dans ce cadre, elle bénéficierait aussi de moyens accrus, la commission ayant de facto à disposition une part du budget de la RUP.
- Pour les chefs d’entreprise
Point clef du rapport : l’allègement des contraintes réglementaires. Cela devrait, in fine, aboutir à une atténuation des effets négatifs du franchissement des seuils du nombre de salariés.
D’aucuns se cristalliseront vraisemblablement sur la proposition n° 10, qui prône une diminution mesurée des représentants élus du personnel dans l’entreprise.
Indubitablement, l’habit ne fait pas le moine car cette proposition n’a ni pour objet ni pour effet de diminuer l’efficacité de la représentation des salariés. En effet, cette réduction est justifiée par le bon sens, eu égard aux gains automatiques d’effectivité générés par la fusion. Cette baisse du nombre de représentants élus existe déjà dans le système de la délégation unique du personnel, qui plus est dans des proportions plus importantes que celles proposées dans la RUP. En outre, dans le schéma retenu, il y a maintien du volume d’heures de délégation. Chaque représentant aurait donc individuellement plus d’heures à consacrer à ses attributions et serait ainsi plus performant.
Pour ceux qui voudraient débattre de la question sur ce blog ou simplement prendre connaissance du contenu du rapport, je vous rassure tout de suite : il existe aussi, aux côtés de sa version intégrale, une synthèse très didactique.