La diversité de l'information : le vrai problème de la démocratie que la gauche continue d'ignorer.

Publié le 09 novembre 2010 par Leunamme

On a tous en tête l'histoire du watergate avec ces 2 journalistes qui vont réussir à faire tomber le président des Etats-Unis. Cette image là a consacrée l'idée que les médias, et particulièrement la télévision, constituaient ce que l'on appelle désormais communément, un quatrième pouvoir. Avec toutefois deux bémols, le watergate n'avait pas empêché dans un premier temps la réélection de Nixon, et surtout, cela se passe aux Etats-Unis.

Eh oui, parce que de ce côté-ci de l'Atlantique, l'indépendance de la presse envers les pouvoirs politiques et économiques est loin d'être une évidence. C'était déjà flagrant en 2005 lors de la campagne pour le référendum sur le traité constitutionnel européen, où 90 % des éditorialistes de tous poils avaient ouvertement plébiscité l'approbation du traité, quand 55 % des Français s'y sont opposés, malgré l'absence de relais médiatique.

Cela devrait relativiser l'importance des médias, me direz-vous. Sauf qu'en réalité, ce qui apparaît surtout c'est un renforcement du fossé entre le peuple et ses élites, et malheureusement toutes ses élites, puisque lorsqu'il y a méfiance, il a généralisation et amalgame et la différenciation entre ceux défendent la pensée unique et ceux qui portent une autre voie ne se fait plus. D'autant que loin de se remettre en question après 2005, le monde médiatique a persisté dans son erreur. Rappelons nous que sans l'aide des médias et des sondages Mme Royal n'aurait probablement pas été candidate en 2007, et qu'en suite sans une campagne infamante orchestrée contre elle, elle aurait probablement été élue.

Mais si je parle aujourd'hui de l'influence des médias sur l'opinion, c'est parce que depuis le mois de mars et au travers de deux évènements, leur indépendance éditoriale se pose de nouveau de manière visible.

Je veux évidemment parler en premier lieu de l'affaire Woerth-Bettencourt. Cette affaire qui dans n'importe quelle démocratie aurait aboutie à la démission du ministre, si ce n'est à celle du gouvernement tout entier. Il est notable qu'avant qu'il y ait emballement médiatique, c'est sur Médiapart, un site internet réellement indépendant que l'information est sortie, et que le principal relais ensuite fut Marianne, un des rares hebdomadaires qui soit politiquement inclassable. D'ailleurs le pouvoir ne s'y est pas trompé, lui qui n'a pas eu de mots assez durs contre internet et contre Médiapart particulièrement. Autre phénomène remarquable, durant tout l'été, c'est la presse écrite qui globalement a été à la pointe des révélations, comme si poussée par la concurrence d'internet, elle se réveillait et retrouvait un peu de verve. Mais dans le même temps, il est consternant de constater que la télévision et la radio, premières sources d'information n'ont quasiment pas mené d'investigations, se contentant d'être à la traîne. Pour mieux noyer le poisson ?

Le deuxième évènement me tient encore plus à coeur, il s'agit de la réforme des retraites et du formidable mouvement que nous venons de vivre (et qui n'est peut-être pas fini). Là aussi, quel constat ! Quand la quasi-totalitéquasi-totalité des éditorialistes économiques et politiques défendent le texte de loi et le gouvernement, 70 % des Français s'y opposent. Quand des millions de Français descendent dans la rue, ce que l'on entend principalement c'est l'incompréhesion de la caste médiatique face à cette colère profonde. Caste qui pendant deux mois ne va avoir de cesse de parler de division du monde syndical, d'essoufflement du mouvement ou encore de nécessité de faire de la pédagogie (sic !). Aujourd'hui, alors que la mobilisation s'estompe, que le carburant afflue de nouveau dans les pompes, les jeux sont faits, et on a l'impression que ce qui s'est passé, n'est rien qu'un épiphénomène du à une supposée tradition française. A la vérité, le pouvoir et son bras armé médiatique pousse un grand ouf de soulagement, mais s'inquiète désormais pour le futur et l'élection présidentielle qui arrive.

Jamais dans un pays où les journalistes font correctement leur travail, Eric Woerth ne bénéficierait de la paix relative qui est la sienne aujourd'hui. Dans aucun pays où l'information est libre et indépendante (en existe-t-il encore ?) les mots de juste et équilibré n'auraient pu être associés à la réforme. Les médias ont constamment joué contre le mouvement en démoralisant les gens et en les démobilisant.

Pourtant, il est un fait curieux qui ressort de ces deux épisodes et que peu de personnes ont noté : c'est le silence de la gauche face à cette mainmise du système sur les médias, et le refus jusqu'à présent des partis politiques et des syndicats de vouloir mener cette bataille de l'information, bataille qui aurait permis de gagner sur les retraites.

A l'exception de Jean-Luc Mélenchon, qui fait des propositions à gauche sur cette question ? Personne ou presque. Pourtant il s'agit d'un sujet qui tient à coeur aux Français. C'est après une polémique télévisée que la côte de François Bayrou a décollé en 2007. Il ne peut y avoir aujourd'hui de politique clairement anti-capitaliste sans une réflexion profonde sur la l'indépendance de la presse. Si la gauche ne mène pas la bataille sur ce sujet, elle est condamnée à rester dans l'opposition ou bien à mener les politiques de droite une fois au pouvoir, ce qui revient au même.

Sur le web :

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