André Kertész, dans la discrétion et la rigueur d'un labeur inlassable, nous a légué une des plus importantes oeuvres visuelles du vingtième siècle. Sa recherche de la plus extrême synthèse dans la représentation des hommes et des choses s'est appuyée sur un langage direct, dépouillé, admirablement construit et efficace et, en même temps, d'un humanisme profond. Un maître.
Ses reportages photographiques parus dans "Vu" sont des pionniers du genre. Ses images des moines trappistes notamment, sont belles comme des Zurbaràn, austères, sculpturales, imprégnées de mysticisme.
il a également innové par des recherches formelles audacieuses, comme avec de superbes distorsions de corps qui valent autant que ce que Picasso ou Moore obtenaient par le dessin ou la sculpture. Jusqu'à la fin de sa vie, il se remit en question, utilisant étonnamment le Polaroïd.
Sa vie matérielle ne fut pas facile et le succès lui fut chichement compté. Qu'importe : il nous a laissé certaines des plus belles images du siècle passé avec une mention spéciale pour son portrait en compagnie de sa chère épouse Elizabeth et pour le sublime cliché dit "le vendeur de muguet", qui n'est reproduit nulle part et qui vous forcera à aller au jeu de Paume si vous voulez l'admirer. Le regard que le grand mutilé de guerre jette à la businesswoman prenant son métro offre l'une des plus belles images jamais capturées par un homme.
Bref, vous l'avez compris, visite impérative.