08 nov, 2010 par Philippe Fabry
Les rencontres nationales du etourisme institutionnel approchent à très grand pas, et sont devenues au fil des ans un événement incontournable dans la profession, signe que les technologies de l’information et de la communication sont désormais au cœur des réflexions. Cette année un nouveau cap est franchi car plusieurs semaines avant la manifestation, les inscriptions sont closes. Une liste d’attente a même été mise en place ! A quand les entrées au marché noir ?
Les professionnels du tourisme ne peuvent en effet plus ignorer Internet tant en matière de communication, d’information, de promotion et de distribution. En 2009, et si on se base sur l’étude de PhocusWright, le marché du etourisme représente environ 69 milliards d’euros en Europe, contre un peu plus de 146 milliards pour la vente hors ligne. Malgré la crise, les ventes en ligne continuent de se développer et Internet représente désormais approximativement un tiers du tourisme en Europe. La France n’échappe pas à ce phénomène avec une progression de 15 % en France, soit 8 milliards d’euros selon le Baromètre de Raffour Interactif de juin 2010.
La crise économique et financière mondiale depuis le deuxième semestre 2008 incite les professionnels à revoir leurs stratégies et à réduire leurs coûts. Internet dans ce domaine est une opportunité essentielle de développement tant pour les prestataires que pour les organismes touristiques.
Les enjeux pour les acteurs sont nombreux, et on peut citer en vrac quelques problématiques et chantiers à lancer.
Créer les conditions pour adopter les normes internationales d’échanges des données
A l‘ère de la mondialisation et plus encore à la montée du commerce en ligne, il est de plus en plus nécessaire de mettre en place des protocoles informatiques qui permettent à tous les professionnels du tourisme de pouvoir communiquer entre eux : accéder aux offres en ligne simplement, connaître les disponibilités, récupérer les descriptifs des offres etc.
Il s’agit simplement de construire des entreprises « étendues » par des alliances qui leur permettent de valoriser les investissements en compétences et en infrastructures d’autres acteurs, chacun travaillant dans son domaine d’excellence dans un réseau à valeur ajoutée. La différence avec une simple externalisation se situe dans la qualité des relations avec des partenaires stables, créant une synergie productrice de valeur ajoutée là où l’externalisation brute ne fait qu’additionner de façon arithmétique des ressources, sans accroissement de la valeur totale produite par les membres de la chaîne, faute précisément de synergies.
Le consommateurs/citoyen cherche de plus en plus à économiser son temps et sous-traiter à des prestataires tout ce qu’il ressent comme une corvée afin de se réserver des plages de loisir. Il appartient aux fournisseurs de produits et de services de comprendre cette attente afin d’agréger dans un seul endroit ces produits et services issus de filières de production différentes. Cette approche fait le succès actuel des grands sites touristiques tels que Voyages-SNCF en France ou ceux du groupe Expedia à l’international.
Avec les réseaux, il est possible d‘étendre la sphère marchande et de valoriser les services de proximité. Plus généralement l’utilisation des réseaux permet une augmentation du de taux de rotation du capital des entreprises en faisant diminuer le capital fixe nécessaire en étendant la zone d’interactions et d’influence de l’entreprise qui devient plus grande que sa surface financière et physique.
Le recours aux packages dynamiques ou plus simplement la commercialisation en marque blanche sur les principaux sites d’agences de voyages en ligne : Open Travel Alliance (OTA) pour marché nord américain, eXchange for Travel (XFT) chez quelques opérateurs en Europe, suppose des échanges en temps réels ayant recours à des standards XML internationaux tel que la norme OTA. Seuls les prestataires de services capables de dialoguer à l’aide de ce type de langage pourront être « visibles » sur Internet, d’autant plus qu’il est désormais nécessaire d‘être diffusé auprès de différents canaux. La prise en compte du multicanal est désormais une impérieuse nécessité.
La question de la standardisation des échanges de données nécessaires à une information touristique de qualité et à des ventes en ligne sécurisant le client comme le prestataire est essentielle au développement du e-tourisme. Assurer la convergence des ces différents standards (XFT, OTA, Tourinfrance) et leur adaptation permanente à l’évolution des échanges au sein de la filière nationale comme avec ses partenaires promotionnels et commerciaux étrangers conditionne le maintien d’une part de la valeur ajoutée de notre production touristique, si ce n’est de nos systèmes de distribution.
L’agrégation de la donnée touristique
La standardisation des échanges des données répond également à une nécessité. L’information doit en effet pouvoir être diffusée sur différents canaux de diffusion en ligne. Pour un institutionnel du tourisme, il ne s’agit plus simplement de diffuser les contenus sur son propre site Internet mais de proposer l’information à différents diffuseurs. Il s’agit en quelque sorte d’adopter une logique de fournisseur de contenus “labellisés”. Un internaute pour faire son choix a à la fois besoin de disposer d’une information précise et à jour sur les produits (contenu marchand) mais aussi de toutes les informations annexes : avis des internautes, contenus créés par les utilisateurs etc. Un diffuseur doit donc pouvoir enrichir des contenus en agrégeant des informations produites par d’autres. Ceci n’est possible qu’a partir du moment où il y a une standardisation des échanges. La conséquence pour les institutionnels du tourisme est de faire en sorte que leur système d’information touristique soit ouvert vers l’extérieur et permettre de diffuser les contenus le plus largement possible.
Professionnaliser et adapter les ressources humaines des organismes publics du tourisme
La révolution e-touristique est apparue il y a peu de temps : en dix ans, les offices de tourisme sont passés de l’accueil physique au comptoir et de l’envoi du catalogue d’hébergement par courrier au web 2.0 et aux brochures électroniques.
Cette mutation profonde de la consommation entraine une évolution considérable des métiers du tourisme dans ces organismes. Un office de tourisme, un CDT ou un CRT doit disposer aujourd’hui d’un ensemble de compétences liée au numérique en interne.
Or, même lorsque les structures publiques touristiques au niveau local sont regroupées, même lorsque les comités départementaux ou régionaux du tourisme disposent de budgets conséquents, cela ne veut pas dire que la question des ressources humaines est résolue.
Alors qu’un un touriste sur deux prépare ses vacances sur le web, les organismes de gestion de gestion de destination sont loin de consacrer 50% de leurs budget action à l’Internet. Il en est de même pour les ressources humaines. Les métiers du e-tourisme sont souvent absents des équipes, ou peu représentés, même si des territoires ont massivement revus leur organisation à l‘ère de l’internet. Lorsqu’on a recruté un webmaster, il agit de façon verticale, alors que l’e-tourisme devrait être totalement transversal.
Il s’agit avant tout d’engager une véritable politique de formation professionnelle au sein des équipes en place de manière à faire muter les métiers. On peut estimer que l’ensemble des métiers opérationnels des organismes publics du tourisme ont fondamentalement évolué ces dix dernières années. Des programmes de formation commencent à émerger, on peut parler par exemple des Animateurs numériques du territoire.
Créer et diffuser un kit pédagogique sur l’Etourisme
Le corollaire du point précédent suppose de disposer d’outils pour former et accompagner les professionnels. L’essor d’Internet et les technologies de l’information et de la communication a produit d’importantes mutations dans le secteur du tourisme en bouleversant les méthodes de promotion et de communication, en ouvrant des champs importants de développement et de nouvelles opportunités de marché et en induisant donc aussi de nouvelles méthodes de travail.
Pour de plus en plus d’acteurs, Internet est au cœur des stratégies, des préoccupations, les TIC jouant un rôle majeur dans le processus de réflexion et d’achat des voyageurs, aujourd’hui nombreux ont conscience qu’il convient d’être présent et actif sur Internet pour être considéré.
Tous les métiers du tourisme ont été touchés par cette évolution. A chaque niveau (du personnel d’accueil au responsable marketing) il s’agit de s’adapter, de se former. Pourtant, tous les professionnels n’ont pas forcément suivis le rythme et ne possèdent pas les clés pour accéder aux ressources. Manque de formations, absence de budget, ressources humaines insuffisantes en sont des raisons. Bien souvent d’ailleurs, on ne compte qu’un seul webmaster dans les structures pour une dizaine de personnes dédiées à la promotion et à la communication d’une destination !
Les acteurs du tourisme sont sujets à un manque d’appréhension de ces domaines entraînant leur retard, une perte de réactivité et la conception de sites Internet pas toujours adaptés aux attentes des touristonautes.
La création et la diffusion d’un kit pédagogique destiné aux acteurs du tourisme pourrait combler ce manque. Ce kit, accessible a tous (institutionnels et du acteurs secteur privé) et si possible gratuitement, serait une solution pour fournir des recommandations et conseils pratiques sous la forme de tutoriels.
Il pourrait prendre la forme de fiches, réparties en grands thèmes (e-marketing, référencement, outils…), donnant une aide concrète sur toutes les questions liés à l’etourisme et à la gestion d’un site Internet (par exemple : réussir ses campagnes Google Adwords, comment écrire un mailing, les sources de veille pour l’etourisme, comment améliorer sa visibilité sur le web 2.0…) et adapté aux différents niveaux de publics : débutants, confirmés, avancés.
Une démarche de ce type a déjà été initiée par l‘Etat Australien qui propose en téléchargement libre (Australian Tourism Data Warehouse, plate-forme nationale de gestion de l’information) le « Tourisme e-kit », des fiches méthodologiques au format .pdf, pour les prestataires touristiques.
Vous et l’etourisme, où en êtes-vous ?