Ce qui était prévu est arrivé : le raz-de-marée républicain s’est produit à la chambre des représentants des États-Unis. Les sondages donnaient depuis quelques mois victorieux, un camp républicain qui a fait campagne rageusement à droite, assimilant à du socialisme un plan de santé audacieux mais en retrait par rapport à celui du Canada, lancé par le président Obama.
Il faut dire que depuis deux ans qu’il dirige la Maison Blanche, Barack Obama a été sous les feux constants d’une campagne particulièrement négative et essentiellement idéologique. Le président des États-Unis est régulièrement dépeint comme un « intruder », un ver dans la pomme américaine, un « fol » socialiste, quand ce n’est pas un chef de je ne sais quelle tribu primitive, une relation raciste à son origine africaine. Et puis, il y a eu les feux roulants de la grande presse, Fox news en tête, mené par l’inénarrable, Glenn Beck, à propos de ses filiations musulmanes. Pour tous ces habiles propagandistes, une créature étrange dirige l’Amérique, un « ET » moins sympathique que celui imaginé par Steven Spielberg qu’ils ont de bric et de broc caricaturé dans l’imaginaire populaire américain.
Un dangereux cocktail de propagande pour une Amérique profonde naïve à souhait et qui est sensible aux mouvements d’humeur, et surtout aux approches manichéennes qui ont empreint profondément sa culture politique depuis le mac carthisme. Mais tout cela n’est pas très nouveau, au lendemain de la guerre, Roosevelt lui-même avait été présenté par une propagande habile comme étant « soft on communism », une accusation souvent à l’origine d’une certaine hystérie patriotique aux Etats-Unis.
Mais le camp républicain est lui-même déchiré entre radicaux et moins radicaux, quant aux modérés, ils sont aujourd’hui, tout simplement, relégués au fond de la classe. Le tea party qui est la nouvelle droite virulente des États-Unis, ne veut plus entendre parler du « conservationnisme de compassion » des Georges Bush et consorts, mais clame sa volonté de faire la révolution conservatrice qui proclame le triomphe des libertés individuelles et viriles sur les gains sociaux perçus comme collectivistes.
Mais la déroute annoncée des démocrates n’est pas uniquement une résultante des attaques farfelues mais têtues de l’extrême-droite américaine. Le président Obama après avoir obtenu deux votes d’une importance historique décisive sur la couverture de santé et l’encadrement de la finance a voulu modérer un peu ses acquis en faisant quelques compromis avec un centre républicain peut disposer envers lui. Le résultat est que le président, une fois ses partisans refroidis, s’est retrouvé seul au milieu du gué dans les eaux tourmentées d’une économie déjà gonflées en amont sous l’administration précédente.
Si l’administration Obama a su empêcher une descente à pic du grand « Titanic »qu’était devenue l’économie mondiale, le paquebot est encore loin du port. Et les avis de tempête se multiplient. Pour l’heure, le président risque d’être piégé par les propositions républicaines de baisses d’impôts qui datent de l’administration Bush, d’autant que les républicains sont revenus en force à la chambre des représentants. Et la quadrature du cercle consiste à faire baisser le taux de chômage en ramenant celui de l’emploi à son niveau d’avant la crise avec moins de ressources publiques.
Quoiqu’il en soit, le président devra trouver la bonne formule pour lui permettre de gérer une cohabitation plutôt ferme avec le camp républicain. Des républicains victorieux mais divisés et qui n’ont pas encore trouvés le rassembleur qui devra mener l’estocade finale contre un président qu’on cherchera à affaiblir sur les deux années qui viennent.
De plus, maintenant qu’ils ont le pouvoir à la chambre des représentants, ils devront montrer autre chose que leur capacité de nuisance.
Il reste bien vingt quatre mois, mais les grandes manœuvres ont déjà commencé. Certains des prédécesseurs du président Obama, Harry Truman et Bill Clinton s’étaient retrouvés dans la même situation et avaient finalement remportés un second mandat.
Qu’en sera-t-il pour une administration Obama qui devra trouver le second souffle nécessaire pour redonner de l’allant au rêve américain ?
Roody Edmé