Magazine Culture
Frankie, le premier long métrage de Fabienne Berthaud, nous avait déjà impressionnés. Là, avec Diane Kruger, elle y abîmait l’icône du mannequin et le mythe d’une certaine perfection. Ici, c’est l’image d’une Ludivine Sagnier qu’elle écorche, habituée aux rôles de séductrice, puisqu’elle lui fait incarner une autre sorte de Lily que l’objet de tous les désirs chez Miller, une Lily enfant, aérienne, un peu tarée mais profondément attachante. Une manière différente, mais toute aussi puissante que dans Frankie, de confronter un personnage à la méchanceté du dehors, soit le regard des gens, et les schémas imposés d’une société castratrice, qui étouffe la marginalité. A l’image de l’héroïne, et au travers de cette histoire d’amour sororale, la cinéaste tire un film solaire et drôle, qui respire la vie. Et pourtant, avec le décès brutal de la mère des deux soeurs, l’œuvre débutait dans les larmes et le noir des enterrements. Transcendant le drame et l’opacité latente du récit, Berthaud livre une ode au bonheur, à la liberté, à l’évasion. En pleine nature, les deux femmes vont renaître, dépasser les attentes d’autrui et étreindre à bras le corps une toute nouvelle proposition de vie. Une vie sans étiquette, ni plan. "Un jour après l’autre" comme murmure le personnage de Diane Kruger, lumineuse, nouvellement déliée des poids de son passé et d’une existence toute tracée. Dans sa manière de travailler (lumière naturelle, deux caméras, improvisations), la réalisatrice offre cette même liberté à son propre cinéma, insufflant générosité et profonde justesse à chacun de ses plans. Son film est beau, et tire du plus grave des sujets (la mort) la flamme grandiose d’un soleil plein d’espoir, de rires et de possibles.
Sortie France: 1er décembre 2010.