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Depuis trois semaines, le Président Préval est partout. Il a pris en main le dossier de la lutte contre le choléra et il s'est évertué à traverser le pays en deux jours pour diminuer la catastrophe de l'arrivée de Tomas. Cetout n'en revient pas ! 'C'est presque indécent !!' qu'il tempête.
- On ne l'a pas vu depuis 5 ans, au moment du tremblement de terre il a pris quatre jours avant de parler à la population pour venir nous dire : ' My palace collapsed.' On ne l'a pas vu pendant des mois et là, bang, il réapparaît. Le calcul politique et l'indécence s'abreuvent à la même mamelle.
- C'est vrai que tout le monde avait fait ce constat. Absent, complètement absent.
- Là, on le voit partout. Tous les jours à la télé pour venir enfin assumer sa responsabilité de chef d'État, trois mois avant la fin de son mandat.
- C'est trois mois avant la fin de son mandat, ou c'est un mois avant l'élection présidentielle ?
- Ouais, peut-être bien. C'est vrai que par la bande, cette forte présence médiatique et cette implication soudaine participent au discours principal de son dauphin, la continuité et la stabilité politique.
- Ce qui est particulier, c'est que ce changement de façon de faire n'impose pas vraiment un nouveau discours.
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- En fait, on l'entend depuis trois semaines donner des conseils au gens sur la façon de bien se laver les mains ou de mieux fixer les feuilles de tôle ondulée à la structure de la maison, mais il continue de répéter également que l'État ne peut pas faire grand chose pour eux.
- C'est vrai qu'il répète que l'État n'a pas les moyens d'aider la population et qu'il s'en remet encore une fois à la communauté internationale pour offrir l'aide et les services à la population. Mais la chose qui a changé, et de ce point de vue là il gagne sûrement des points, c'est qu'il réussit à donner l'impression que cette fois-ci, c'est l'État haïtien qui gère les crises. On le voit à la télé animer une réunion de la cellule nationale responsable de la gestion des urgences, avec les dirigeants de la sécurité civile, avec des ministres … Que des haïtiens ou presque. Alors que dans les faits, 98% de l'aide et des services sont assurés par la communauté internationale. C'est elle qui gère tout.
- Au plan de l'image de la responsabilité d'un chef d'État, c'est quand même nettement mieux que ce qui s'est passé dans les suites de bagay la !
- Effectivement, c'est nettement mieux au plan de la fonction. C'était quand même assez absurde dans le derniers jours de l'entendre répéter à tous 'd'évacuer', d'évacuer les abris temporaires, d'évacuer les maisons trop proches des ravines ou des rivières. Où pensait-il que les gens pouvaient aller ?? Ça me fait toujours rire ce genre de discours simpliste, pour ne pas dire imbécile, où on répète aux gens pauvres qu'ils n'ont qu'à se sortir de la pauvreté. 'Aussi simple que ça mon homme, deviens riche !' Faut peut-être se consoler, on a maintenant un Président dans la forme. Pour le contenu, il ne faut sûrement pas être trop impatient.
- La patience, c'est vous qui l'avez inventé.
- Labadie, tu t'en viens un peu trop diplomate.