À Avignon, la commissaire européenne en charge de la société de l'information et de l'agenda numérique a plaidé pour une révision du système du droit d'auteur en Europe. En particulier, Neelie Kroes veut harmoniser certains domaines, comme la taxe pour copie privée.
Est-ce le prélude à un mouvement de fond en Europe ? À l'occasion des rencontres internationales de la culture, de l'économie et des médias à Avignon, Neelie Kroes a certainement bousculé les ayants droit et les professionnels des industries du divertissement. En effet, la commissaire européenne en charge de la société de l'information et de l'agenda numérique a jugé que le droit d'auteur était en décalage avec la réalité."Aujourd'hui, notre système du droit d'auteur est fragmenté et mal adapté à la véritable essence de l'art, qui n'a pas de frontières. À la place, ce système a fini par donner un rôle plus important aux intermédiaires qu'aux artistes. Cela agace le public qui souvent ne peut pas accéder à ce que veulent offrir les artistes, laissant un vide qui est comblé par les contenus illicites, privant les artistes d'une juste rémunération".
"Et l'application du droit d'auteur est souvent entravée par des questions sensibles sur la vie privée, sur la protection des données personnelles ou encore sur la neutralité du net. Cela peut convenir à certains intérêts d'éviter un débat, ou de cadrer le débat sur le droit d'auteur en des termes moralisateurs qui diabolisent des millions de citoyens".
"Mais ce n'est pas une approche durable. Nous avons besoin de ce débat parce que nous devons agir pour promouvoir un marché unique numérique et légal en Europe. Ma position est que nous devons regarder au-delà des intérêts nationaux et corporatistes pour établir une nouvelle approche vis-à-vis du droit d'auteur. Nous voulons une 'Europe des cultures' et pour cela nous avons besoin d'un débat à l'échelon européen".
"La Commission européenne fera bientôt des propositions législatives sur les œuvres orphelines et sur la transparence et la gouvernance des sociétés de gestion collective. Nous examinerons les divergences sur la taxe pour copie privée. Nous allons également nous pencher sur les licences multi-territoriales et paneuropéennes. Et nous n'arrêterons pas d'explorer de nouvelles pistes tant que le système ne sera pas fonctionnel".
Au mois d'avril, la Cour des comptes avait donné un coup de pied dans la fourmilière en publiant un rapport au vitriol concernant les comptes des sociétés de gestion collective de droits d'auteur et de droits voisins. La commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits a vertement critiqué les SACEM, SACD, SPEDIDAM et autres SCPP. Ce rapport avait d'ailleurs suscité l'ire d'un député UMP, qui avait réclamé l'ouverture d'une commission d'enquête.
L'Europe souffre également d'une absence d'harmonisation des montants de taxe pour copie privée entre les pays européens. Ce décalage entraîne mécaniquement une hausse de l'importation par les consommateurs français de CD, DVD ou Blu-ray vierges depuis d'autres pays européens. Sans parler des dispositifs de stockage, également concernés par ce prélèvement. Un dossier sur lequel les organismes de perception ne sont pas enclins à bouger.
Article diffusé sous licence Creative Common by-nc-nd 2.0, écrit par Guillaume Champeau pour Numerama.com