Markus Zusak
Titre original : The Book Thief
Traduit de l'anglais (Australie) par Marie-France Girod
Oh! Editions, 2007 pour la traduction en langue française, 632 pages
Quatrième de couverture :Leur heure venue, bien peu sont ceux qui peuvent échapper à la Mort. Et, parmi eux, plus rares encore, ceux qui réussissent à éveiller Sa curiosité.
Liesel Meminger y est parvenue.
Trois fois cette fillette a croisé la Mort et trois fois la Mort s'est arrêtée.
Est-ce son destin d'orpheline dans l'Allemagne nazie qui lui a valu cet intérêt inhabituel ? Ou bien sa force extraordinaire face aux évènements ? A moins que ce ne soit son secret... Celui qui l'a aidée à survivre. Celui qui a même inspiré à la Mort ce si joli surnom : la Voleuse de livres...
Ce livre est original tant sur le fond que sur la forme. La narratrice est la Mort et le récit est parsemé de petites qui sont des précisions apportées par la narratrice, sous forme de réflexions des extraits de livres, de lettres ... on trouve même deux mini-contes enchâssés dans le récit. Le roman contient également quelques termes en allemand, voire, ce qui m'a fait sourire, de verbes allemands conjugués à la française.
Les phrases sont en général assez courte, le style est fluide et très poétique, riche en métaphores. Malgré la personnalité originale de la narratrice, le ton n'est absolument pas macabre. C'est un livre dont il émane, malgré la gravité du thème, beaucoup de tendresse et de douceur.
En janvier 1939, Liesel a neuf ans, presque dix. Sa maman la fait placer dans une famille d'accueil de Molching, une petite ville près de Munich. C'est ainsi que Liesel est confiée à la famille Hubermann, rue Himmel (qu'on pourrait traduire par rue du Paradis en français).
Les Hubermann attendait deux enfants, seule Liesel arrivera à destination, son jeune frère Werner décède pendant le voyage en train. Pourquoi Liesel et son jeune frère devaient-ils être confiés à une famille d'accueil ? Nous apprendrons que les parents de la fillette étaient communistes, donc ennemis de l'Allemagne nazie.
Elle l'avait souvent entendu prononcer au cours des dernières années.
Il y avait des pensions de famille bondées, des pièces emplies de questions. Et ce mot. Ce mot bizarre était partout, debout dans un coin, ou en train d'espionner dans le noir. Il portait un costume, un uniforme. Il était partout présent à chaque fois qu'on parlait de son père. Elle avait son odeur dans les narines, son goût sur les lèvres. Simplement, elle ne savait ni l'épeler, ni le définir.
La rue Himmel se situe dans un quartier modeste de Molching. Et c'est au travers du microcosme de cette rue que nous allons suivre le déroulement de la seconde guerre mondiale : le quotidien de Hans Hubermann et sa femme Rosa, qui dissimule sa tendresse et son bon coeur sous une mauvaise humeur et des insultes chroniques... leurs voisins Frau Holtzapfel et les Schneider dont le fils Rudy deviendra le meilleur ami de Liesel, Frau Diller, la propriétaire de la boutique au coin de la rue, une Aryenne pure et dure ...
Il (Hans Hubermann) exerçait la profession de peintre en bâtiment et jouait de l'accordéon. C'était très utile, notamment en hiver, quand il pouvait se faire un peu d'argent en se produisant dans les bistrots de Molching, comme le Knoller.[...]
Hans Hubermann n'était pas le genre de personne qu'on remarque. Il n'avait rien de spécial. Certes, c'était un bon peintre et ses dons musicaux étaient au-dessus de la moyenne. Mais il pouvait faire partie du décor même quand il était sur le devant de la scène, si vous voyez ce que je veux dire. Il était présent, sans plus. Quelqu'un qu'on ne considère pas comme ayant une valeur particulière.
Or les apparences étaient trompeuses. Car Hans Hubermann était un homme de valeur et cela n'échappa pas à Liesel Meminger.
Une nuit, un étranger mystérieux, Max Vandenburg, vient rejoindre la famille Hubermann.
Lorsqu'elle s'éveilla complètement, elle observa l'étranger couché dans le lit d'en face. Seules ses mèches de cheveux, toutes sur le même côté, dépassaient de la couverture et il ne faisait pas le moindre bruit en dormant, comme s'il était entraîné à être silencieux jusque dans son sommeil.
Le livre s'articule autour de la fascination exercée par les mots et de leur pouvoir, de leur puissance : mots mystérieux et inquiétants surpris par une enfant de 9 ans qui n'en comprend pas le sens mais en pressent le danger (communiste), mots qui préservent un secret, mots qui doivent être réprimés sous peine de mettre leur auteur en danger - Les mots rebondirent sur les marches et Liesel sentit un flot de colère lui envahir le ventre. "Je hais le Führer, dit-elle. Je le - mais aussi mots synonyme de voyage dans les livres, d'évasion pour un homme dont la présence doit rester un secret ou de personnes qui se terrent dans un anti antiaérien le temps d'une alerte... mots synonymes d'amer paradoxe : hais. (...) Ne répète jamais ça !" (...) Tu peux dire ça à la maison. Mais ne le dis jamais dans la rue, ni à l'école, ni à la BDM, jamais!"... . Pour le sauver. Quelle ironie !
Les mots contribueront également à tisser un lien puissant entre Liesel et son père nourricier Hans Hubermann, puisqu'il lui apprendra à lire et à écrire ... et viendra lui lire des histoires la nuit, pour l'apaiser, quand elle se réveillera en proie à des cauchemars.
La Voleuse de livres est une fable poétique et bouleversante qui m'a énormément touchée.
Elle s'adresse aussi bien aux adultes qu'aux adolescents.
J'ai lu ce livre dans le cadre d'une lecture commune avec Georges Sand, Mango Ellcrys Canel Valérie Clara ,