Je précise en passant que j'aurais du publier ce compte-rendu bien plus tôt mais que suite à des problèmes de connexion (vu que je n'ai plus du tout Internet depuis quelques jours), je suis donc en retard dans ma publication !
4e de couverture : Où naissent les rêves des jeunes filles? Hérodiane, orpheline vivant à Paradi, un bidonville de Port-au-Prince, rêve du prince charmant à la peau claire et aux yeux bleus. Est-ce parce qu'une religieuse lui a lancé sur un ton haineux : "Noire comme tu es, comment veux-tu que Jésus t'aime?" ou parce que Estevèl, son frère adoré, salué à sa naissance par l'écume d'une vague de mer, s'adonne à d'autres plaisirs? Le rêve s'incarne en Yvan, riche mûlatre d'une des grandes fortunes du pays, et se révèlera un cauchemar quand Hérodiane commencera à découvrir l'envers des mythes et des discours. Si les âmes corrompues des vivants peuvent faire basculer les cœurs fragiles dans l'enfer sur terre, les rêves brisés des jeunes filles créent l'espoir d'un autre avenir.
Il s'agit donc du récit d'Hérodiane, jeune fille noire et pauvre dans l'Haïti d'aujourd'hui, gangréné par le racisme et la corruption d'État. Après la mort de leurs parents, Hérodiane et Estevèl sont contraints de quitter leur village pour se réfugier à Port-au-Prince. Leur maigre bourse ne leur permet que de se loger dans un bidonville étrangement nommé "Paradi". Alors que la jeune fille rêve à son prince charmant, forcément au teint clair et aux yeux bleus, son frère se bat pour leur permettre de survivre.
C'est le genre de roman qui provoque en moi des sentiments contradictoires. J'ai beaucoup aimé, notamment l'écriture (même si quelques tournures de phrases m'ont un poil gênée mais c'est vraiment marginal) mais j'ai aussi été dérangée par certains éléments du récit. Vous me direz, peut-être que c'est bien, au fond, qu'un livre puisse déranger, mettre mal à l'aise, cela prouve en tout cas que le récit a la capacité de faire naitre des émotions, même si ces émotions ne sont pas toujours positives (j'essaie de relativiser, là, parce qu'au fond, j'ai quand même apprécié le roman). Plusieurs aspects m'ont donc dérangée, notamment la relation complexe et à la limite de l'inceste entre Hérodiane et son frère.
J'ai quand même lu Le sang et la mer d'une traite (heureusement qu'il y a 5h30 de train entre Toulouse et Paris ;-)) La trame sociale du récit est à la fois intéressante et effrayante. On plonge dans le Haïti des bidonvilles, de la misère et de l'injustice. Celle-ci touche de manière encore plus accrue les jeunes filles et les femmes noires, qui n'ont bien souvent que le recours à la prostitution pour survivre. Cet aspect social m'a d'ailleurs un peu rappelé le récit de Véronique Ovaldé dans Ce que je sais de Vera Candida.
La partie "surnaturelle" (oui, il y en a une) du roman (le frère d'Hérodiane a un lien privilégié avec la mer), ne m'a en revanche pas dérangée (et pourtant, généralement, je ne suis pas trop fan) ; ce lien hors du commun participe, avec un soupçon de poésie, à l'atmosphère générale du roman, à la fois un brin irréelle et pourtant très ancrée dans une réalité sociale saisissante.
Pour conclure, une petite citation ; ce n'est pas mon habitude, mais là, j'ai trouvé ça particulièrement à propos : "Lui, il avait rappelé à mon souvenir que sa famille, comme toutes celles qui trônaient aux commandes de la première république noire, était au dessus des lois, que j'étais une inexistante, une nouvelle forme d'esclave qui avait moins de valeur qu'au temps de la splendeur de ses pères blancs. Aujourd'hui, je ne valais que par ma soumission, que par mon corps, mon sexe offert sans réticence à la jouissance des nouveaux maitres. Et les nouveaux esclaves, on ne les achetait plus. On les extrayait à volonté d'une mine inépuisable. Celle de la misère. Celle de l'exclusion."
Je remercie