Pourquoi le dialogue social n’est pas français ?

Publié le 03 novembre 2010 par Rsada @SolidShell

Selon la définition de l’Organisation Internationale du Travail, le dialogue social est : « …toutes formes de négociation, de consultation ou simplement d'échange d'informations entre représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs sur des questions d'intérêt commun liées à la politique économique et sociale ».

Selon la traduction franco-française, le dialogue social est : « le Gouvernement propose, le MEDEF ronchonne, les syndicats grognent, le Peuple s’indispose, le Parlement suggère et le Gouvernement impose ».

Conclusion : le dialogue social n’est pas français.

Le sujet de la réforme des retraites peut-il encore être qualifié de débat ? Laurent Fabius a estimé que ce point a constitué le fiasco le plus retentissant du Sarkozysme, mais le président de la République est-il réellement le seul et unique fautif ?

Depuis l’entrée dans le XXIème siècle, la France a manqué deux grands rendez-vous avec son Histoire. Le premier, demeure à mes yeux le NON au référendum sur le Traité Constitutionnel Européen qui n’a débouché sur rien d’autre qu’un blocage de l’Union Européenne et de ses institutions. A défaut d’un vote positif, le dialogue a eu lieu et le débat s’est étalé durant de longs mois. Le second restera sans conteste celui sur la réforme des retraites qui a prouvé une fois de plus aux yeux du monde, que les français ont perdu définitivement le sens du dialogue et de l’écoute mutuelle.

Même s’il s’est défendu en début de quinquennat de ne pas disposer du mandat pour mener la réforme des retraites, Nicolas Sarkozy a le mérite d’avoir lancé une initiative maintes et maintes fois renvoyées aux calendes grecques. Son échec est d’avoir, une fois de plus, proposé un texte qui : propose tout, ne change rien et qui ne résout pas le fond du problème.

Cette réforme ne pouvait pas être entendue comme celle de l’UMP, en pêchant par excès d’arrogance et en usant à la corde l’arme fatale de la provocation. Le devoir du Gouvernement était d’écouter, celui-ci s’est contenté de jouer du flashball dans la rue comme au Parlement.

L’opposition, de toute nature, bien que présente et vaillante lors des débats au Parlement, n’a pas convaincue et ne s’est pas démarquée par un projet alternatif crédible. Les français sont assez mûrs, ils l’ont clairement montré, pour accepter le principe d’une réforme qui exige obligatoirement des concessions de toute part. En se bornant tantôt sur les 60 ans, tout en confirmant un allongement de cotisation, tout en affirmant vouloir tout re-réformer une fois les élections passées, le message s’est brouillé et l’occasion…ratée !

Les syndicats quant à eux semblent être les seuls à tirer quelques bénéfices de cet épisode social au demeurant, le plus important depuis plus de trente ans. De leur propre aveu, ils se sont laissés débordés par la mobilisation souhaitée par la base.

Les français ont eux-mêmes initié les très fortes mobilisations, faut-il y voir un signe ? Si aucun n’a remis en doute l’impérieuse nécessité d’une réforme, tous souhaitaient que celle-ci soit juste et équilibrée. L’échec de Nicolas Sarkozy est bel et bien celui-ci ! En minimisant le principe égalitaire de la pénibilité de l’emploi, en écartant –une fois de plus- les régimes spéciaux et en misant sur un pourrissement de la situation, ce conflit marquera les esprits par le fossé séparant les citoyens de leurs gouvernants.

Tout le monde a parlé mais personne n’a pris soin d’écouter les autres. Une société qui ne s’écoute plus est une société en déroute. Les retraites méritaient un vrai débat tant elles engagent l’avenir des français et donc, celui du pays. L’idée même d’égalité de tous, d’égalité pour tous, inscrite pourtant au cœur de notre pacte républicain, n’a pas été respectée. Nos anciens ne sont pas satisfaits, les actifs se sentent floués et nos enfants peuvent s’estimer déshérités. Le dialogue social n’est pas français.

Les promesses du « travailler plus pour gagner plus » ou du « ensemble tout devient possible » sont passées du stade d’imposture à celui de mensonge caractérisé.

A la manière d’Oden Nash : « Si vous ne voulez pas travailler, il vous faudra travailler pour gagner l'argent qui vous permettra de ne pas travailler ».