Valhalla rising, film sorti en mars 2010 dans une indifférence quasi générale est une bonne illustration de cet adage. Il faut reconnaître que sur le papier, rien de transcendant.
Un guerrier silencieux, surveillé comme le lait sur le feu par des gardiens sadiques et terrorisés par ce dieu vivant. Jour après jour, le guerrier défend sa vie lors de combats sauvages au milieu d'une lande boueuse. Un jour, il réussit à s'échapper, suivi par un jeune garçon qui devient vite son compagnon de route (les résumés que j'ai lu ça et là affirment que l'enfant aurait aidé le héros à s'échapper, qu'on me permette d'en douter). Ce drôle de tandem croise le chemin de Chrétiens en route pour la Terre sainte. Ils les suivront dans leur croisade à bord d'un drakkar qui les conduira vers leur destination après avoir traversé un étrange océan de brouillard. Arrivés à destination, ils sont confrontés à l'hostilité de mystérieux autochtones invisibles.
Voilà pour le synopsis, un banal film de vikings pourrait-on croire. Mais dès les premières images, pas de doute: on est plus devant un film d'auteur qu'un film de genre. Valhalla rising crée une nouvelle catégorie, le film d'action contemplatif! Les images sont magnifiques et de nombreuses trouvailles visuelles jalonnent le film (au hasard la lumière qui émane de certains personnages leur conférant une aura mystique). Les scènes de combat sont assez peu nombreuses par rapport à un film d'action traditionnel mais elles sont d'une efficacité et d'une violence redoutables. La première demi-heure est un révélateur. Le réalisateur semble y avoir concentré toute la violence visuelle. L'ensemble du film est très dur, mais le début est particulièrement terrible. Le réalisateur de ce film, le Danois Nicolas Winding Refn, n'en est pas à son coup d'essai, la plupart de ses films sont interdits au moins de 16 ans. Vous voilà prévenus!
Mais si la vue du sang et le son d'un crâne brisé ne vous dérangent pas, alors toute la beauté de ce film pourra vous saisir. Le personnage principal est interprété avec talent par Mads Mikkelsen, acteur aperçu dans Casino royal, l'avant-dernier James Bond, dans lequel il interprète le très méchant Chiffre qui perd honteusement au poker contre le beau James. Dans Valhalla rising, le personnage qu'il joue est bien plus complexe. Borgne et muet, il est baptisé One-Eye par le garçon qui l'accompagne. On ne sait rien de One-Eye, à part qu'il est un combattant féroce et imbattable. Le film tourne autour de sa quête. Quête de sens, quête d'absolu, quête d'un combat à sa mesure. Les combats sont filmés au plus prêt et n'épargnent rien au spectateur. Toutefois, pas de voyeurisme morbide, One-Eye n'est pas un guerrier cruel et sa méthode de combat est d'une efficacité et d'une sobriété dont les films d'action ne nous avaient pas habitués.
Le film est partagé en plusieurs chapitres, chaque partie étant annoncée par un titre. Les scènes sont souvent entrecoupées de visions de One-Eye dont je ne parlerai pas plus pour ne rien gâcher mais qui sont une des réussites de ce film. La bande-son, oppressante et assez moderne, ajoute encore à l'atmosphère de violence omniprésente. Le réalisateur voit dans ces temps d'expansion du christianisme une période barbare et cruelle, une période de rejet de l'autre et de fanatisme. Le héros rédempteur, One-Eye, semble un monstre pour ces semblables mais il est pourtant le seul à communiquer et à pouvoir maîtriser son environnement.
Ce film est déjà présent dans les rayons de la médiathèque, à voir de toute urgence.