Quand Gauguin peint des citrons, ils sont d’un jaune acide comme leur jus. Quand il peint son Christ, il est d’un jaune plus mystique que l’or des icônes byzantines. Les robes des femmes à genoux près du calvaire sont d’un bleu plus proche du lapis-lazuli des atours d’antiques Égyptiennes que de celui des robes brutes des bretonnes bretonnantes.
Les toiles de celui qui fut appelé un temps le génial peintre du dimanche font rêver les amateurs aux pinceaux maladroits. Je rêve donc. Gauguin est mort, mais ses œuvres traversent de temps à autres les murailles de riches propriétaires pour rejoindre leurs sœurs dans les salles toujours trop lointaines des musées.
Peut-être feront-elles rêver aussi certain trader de la Société Générale : l’art ne nourrissant pas son homme, Gauguin fut agent de change et peintre en même temps. Jusqu’à la grande crise de 1882...
Petit rappel du bégaiement de l’histoire : 1882 c’est l’année de la crise de l’Union Générale à Lyon, une banque catholique et légitimiste dans le capital de laquelle le secrétaire du pape d’alors est partie prenante. Croissance rapide, investissements risqués, création de la Société lyonnaise des eaux et de l’éclairage, la banque spécule en bourse. Suite à la manipulation des cours, c’est la faillite. La Bourse de Paris est touchée. La crise gagne l’ensemble du pays et dure plusieurs années touchant durement les mines, la métallurgie, le bâtiment avec l’habituel et désespérant cortège funèbre de misère et de conflits sociaux.
Comme j’ai un peu l’esprit d’escalier, après Gauguin et l’Union Générale je reviens à…