Saint Ignace de Loyola nous donne un premier outil pour décider juste. Il conseille de ne jamais prendre une décision en période de désolation. Quand tout va mal, lorsque nous sommes au fond du gouffre, il est fort tentant de souhaiter tourner la page, définitivement. De là à jeter le bébé avec l'eau du bain, il n'y a qu'un pas ! L'ultime audace réclame, face à l'épreuve, d'essayer pour un temps la non-décision, d'user de circonspection et d'oser ne rien décider, mais rien, avant qu'une intuition claire et limpide ne vienne au jour. Rien de pire que l'agitation pour nous embarquer dans de funestes aventures. Les périodes de tristesse ne sont pas toujours propices à la réflexion. La réalité, voilée, n'offre alors plus de prise solide. Attendre que la vague passe pour nous risquer à des choix, voilà le courage et la patience. Cette vertu, ici, ne congédie pas l'action, au contraire. Il s'agit seulement de s'abstenir de vouloir changer de cap sans une saine et féconde maturation.
Pour nous avancer vers le choix libre, il sied donc d'oser une descente en nous-mêmes pour désobéir aux impératifs, à l'immédiat, à la spontanéité qui, bien souvent, nous éloignent de notre intérêt propre. Que dois-je faire ici et maintenant ? Sans hâte, épouser la réalité, nous ajuster au mieux à ces exigences avec les moyens et les ressources du jour.Source : "La Vie" 3 Juin 2010