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Par Laurence Addario AP - Lundi 7 janvier, 17h45
CLERMONT-FERRAND - En élisant son président d'université lundi à Clermont-Ferrand, le conseil d'administration de l'université d'Auvergne a marqué formellement son passage vers l'autonomie conformément à la loi Pécresse, devenant ainsi l'une des toutes premières universités en France à l'appliquer.
L'université d'Auvergne, l'une des deux universités auvergnates, n'a donc pas attendu la date-butoir du 11 février 2008 pour modifier ses statuts, suivant l'exemple de la première, l'université Paris Descartes (Paris V) qui a élu à sa tête dès le 20 décembre dernier le généticien Axel Kahn.
Concrètement, cette nouvelle loi se traduit notamment par la mise en place d'un conseil d'administration resserré. Ainsi, celui de l'université d'Auvergne passe de 60 membres, dont 15 étudiants, à 27 membres, dont trois représentants étudiants et cinq chefs d'entreprise de la région nommés par le président de l'université Philippe Dulbecco. Cette forte présence de l'univers de l'entreprise est une des grandes nouveautés de la loi Pécresse qui en prévoit un au minimum au sein des CA des universités.
Elu une première fois en juin 2007 à la tête de l'université, M. Dulbecco, par ailleurs professeur d'économie de l'innovation et du développement, a donc rapidement fait sienne cette loi. "Elle correspond à mon projet de modernisation de la gouvernance de l'université", a-t-il expliqué lundi à l'Associated Press.
Le président réélu se veut rassurant en affirmant qu'il n'est pas question "de transformer l'université en école de commerce ou en école d'ingénieurs. Nous sommes avant tout des enseignants-chercheurs. Cette réforme est nécessaire car elle nous donne des outils pour maintenir cette spécificité qu'est la recherche à l'université". Avant d'ajouter, pragmatique: "Seulement, il est vrai qu'il faudra sans doute faire des choix, on ne pourra sans doute pas soutenir autant de formation en mastères".
Marie-Anne Denis, étudiante élue UNEF, s'inquiète de la faible représentativité étudiante au contraire de celle de l'entreprise. Pour elle, "on parle toute de même de l'avenir des étudiants et là, on va gérer leurs études 'd'en haut', alors que la gestion de l'université les concerne directement". Une réticence partagée par le syndicat SNES-Sup, son représentant au sein du CA, Antonio Freitas, jugeant que la loi "va soumettre les universités aux intérêts du privé".
Du côté des chefs d'entreprise, cette participation à la gestion des universités est une approche jugée "intéressante". André Malet, directeur des sites Michelin de Clermont-Ferrand, confie à l'AP que "c'est l'occasion d'ajuster les formations à nos besoins". Pierre Pagesse, président de Limagrain, ne dit pas autre chose quand il évoque la disparition en France d'un cursus concernant la physiologie des plantes. "Il n'en existe qu'aux Pays-Bas. Dans le cadre des réseaux universitaires et en participant aux décisions, aux orientations des formations, on pourrait par exemple initier le retour de ce type d'enseignement".
La prochaine étape pour une plus grande autonomie de l'université d'Auvergne passera par la création d'ici mars prochain de la Fondation de l'université d'Auvergne qui permettra ainsi "la levée de fonds privés", a précisé Philippe Dulbecco. AP
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