La semaine dernière, je vous proposais une colle que nos amis Photoeil et Lbadikho ont très vite résolue.
Il s’agissait en effet du tombeau de IBN BATOUTA, né à Tanger en 1304 et décédé à vraisemblablement en 1369.
Bien modeste monument, perdu dans une petite ruelle de l’ancienne médina de Tanger, au coin d’un escalier menant à la Casbah, signalé par une plaque en céramique portant simplement les mentions : « TAMBEAU D’IBN BATOUTA ضريح إبن بطوطة » Notons que le mot « tambeau » est écrit avec une faute d’orthographe.
Est-ce tout ce que les autorités locales tangéroises ont trouvé pour honorer cet homme exceptionnel ?
Est-ce tout ce que les associations de Tanger ont pu réaliser pour perpétuer la mémoire de ce fils de leur ville ?
Le local qui abrite le tombeau de Ibn Batouta ne doit pas mesurer plus d’une dizaine de mètres carrés.
Aucun objet personnel, aucun manuscrit, aucun livre ! Rien qui puisse personnaliser l’endroit, lui donner une âme !
Bien sûr, cela ne fait pas partie de notre culture. Mais Ibn Batouta dépasse la culture marocaine et musulmane.
On peut dire qu’il fut l’un des premiers citoyens du monde.
Intéressé essentiellement par les pays musulmans, en fait PAR TOUS LES PAYS MUSULMANS de son époque, Ibn Batouta voyagea pour des raisons intellectuelles, contrairement à Marco POLO, l’autre grand voyageur de ces temps anciens, poussé lui par des motivations mercantiles.
Il a silloné le monde musulman de Tanger à la Mecque bien sûr, mais aussi de l’Afrique Noire à l’Inde et la Chine, de l’Asie Centrale aux Iles Maldives.
Pour Ibn Batouta, ces voyages étaient l’occasion de découvrir les pays musulmans, leurs systèmes de gouvernement, leurs traditions et leurs modes de vie. Durant ses séjours dans les diverses contrées visitées, il s’est souvent intégré à leur population, n’hésitant pas à se marier et à créer une progéniture.
A cet égard, il convient de citer l’article de Joseph CHELHOD, intitulé « IBN BATOUTA, ETHNOLOGUE » paru en 1978 dans le numéro 25 dans la Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée.
Au cours de ses longues pérégrinations, Ibn Batouta aurait perdu les notes qui lui auraient permis la rédaction de la relation de ses voyages.
Sur l’injonction du sultan Aboû Inân, il consentit à en dicter le récit à Aboû Abd Allah Mohammed El-Djozaï. L’ouvrage ainsi rédigé a pour titre « Tohfat en-Noddhâr fi Gharâïb el-Amçâr wa Adjâïb el-Asfâr », plus connu sous le nom de «RIHLA» (Voyage).
On peut découvrir la version française de la « Rihla », dans une traduction de C. Defremery et B.R. Sanguinetti, réalisée en 1858, avec une introduction et des notes de Stéphane Yerasimos, des cartes de Catherine Barthel, éditée en1982 par la Librairie François Maspero dans la collection « FM/La Découverte ».
Si notre voyageur-explorateur n’a pas la notoriété internationale de son presque contemporain le marchand vénitien Maroc POLO (1254 -1324), il faut signaler que le nom d’Ibn Batouta a été donné à un cratère situé sur la lune, précisément dans la mer de la Fécondité.
Plus terre-à-terre, Dubaï lui a consacré un immense centre commercial thématique portant son nom inauguré en 2005.
Le Maroc pour sa part avait baptisé « Ibn Batouta » le premier ferry-boat battant pavillon marocain et assurant la liaison Tanger-Malaga.
Le hall d’entrée de l’aéroport international desservant la ville du Détroit arbore tout naturellement le nom du grand voyageur que fut Ibn Batouta.
Des timbres postaux ont été émis par Barid Al Maghrib, notamment en 2004 à l’occasion du 700ème anniversaire de la disparition du grand voyageur-explorateur.
Un établissement scolaire à Tanger porte le nom de ce personnage, dont bien peu de tangérois connaissent l’histoire.
Le nouveau stade de Tanger pourrait se voir affecter le nom de « Stade Ibn Batouta ».
Est-ce suffisant pour perpétuer la mémoire de ce voyageur-explorateur hors du commun ?
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