Etat chronique de poésie 1045

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C’est un temps qui ne nous fait grâce de rien.

Il manipule la mémoire, fraude allègrement avec les souvenirs, puis nous laisse, essoufflés au bord d’un chemin creux.

C’est un temps suspendu, et on rêverait, se retournant qu’il fut en droite ligne d’un passé sans fossés ni ravins, sans pierres d’achoppement.

Mais il fallait bien que vie se fasse, et la conscience que nos actes ne sont que résultat de nos aveuglements, parfois, ne vient, hélas, que trop tard.

On se retrouve donc sur le seuil de l’âge.

Le temps a commis ses outrages en plaies et bosses indélébiles.

Non qu’il faille se complaire dans cette tyrannie, mais se l’approprier.

Ni meilleur ni pire, chacun mène sa barque, entre des récifs plus ou moins acérés.

Et, soudain, le naufrage nous guette.

C’est alors, dans le silence des âmes qui se prétendaient attentives, que, comme une lame de fond, monte l’instinct de survie.

C’est lorsque la lumière blanche d’un au-delà indicible se présente, que, brutalement, on se retourne : il faut alors revenir sur ses pas, non pour les pleurs feints, mais pour la vie elle-même.

C’est elle qui nous façonne à son envie, nous prend et nous lâche selon ses caprices.

Mais toujours elle nous donne quelques fragments d’une beauté qui nous pousse en d’ultimes espérances.

Nous ne savons rien de ce qu’elle nous dessine.

Nous pouvons en infléchir le cours, si nous savons entendre cette musique des profondeurs, celle qui est nôtre, qui ne supporte aucune dictature.

D’elle nous pouvons tenir secrète espérance, qui joue sur un destin, avec la certitude, la seule certitude d’avoir rempli le vase, pour y accueillir les fleurs de l’existence.

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Manosque, 9 octobre 2010

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