Le Japon a vu la semaine dernière son premier ministre Hatoyama démissionner. Il était le premier démocrate après plus d’un demi siècle de pouvoir conservateur ininterrompu, mais aussi le cinquième ministre d’affilée à rester moins d’un an. Son projet de « relocalisation » d’une des bases américaines d’Okinawa l’a coincé dans un étau, une situation inextricable. Ceux qui espéraient ainsi prendre un peu d’indépendance vis-à-vis des Américains ont été amèrement déçus. Les autres prirent peur dès le départ de froisser l’allié américain et de se faire engloutir par la voisine Chine. Tous vouèrent le premier Ministre aux gémonies. Mais pourquoi abandonner pour autant ? Même au plus bas dans les sondages, qui imaginerait Nicolas Sarkozy quitter son poste ? Cette tradition de se retirer peut être interprétée comme un seppuku symbolique. Sacrifier sa personne pour montrer qu’on assume son échec. Mais plus trivialement, c’est évidemment aussi un calcul politique. Avec M. Hatoyama à moins de 30% d’opinion favorable, les élections à venir auraient été une catastrophe pour les démocrates. Le nouveau Premier ministre Naoto Kan, qui caracole à plus de 60% dans les sondages, pourrait redonner un coup de fouet positif au Parti démocrate et sauver la mise.
Si j’ose la comparaison – très mégalomane je l’assume – , ce n’est pas le seul départ que connaît le Japon. Ce billet est le dernier, pendant un bout de temps, a être rédigé depuis Tokyo. Ce blog nippon touche donc à sa fin. Le rythme de publication a souvent été irrégulier mais mes élucubrations nippones ont toujours rencontré un lectorat fidèle. Je reviendrai un jour à Tokyo. Je ne sais pas encore ce qu’il adviendra de ce blog d’ici mais je continuerai, au moins sporadiquement à y publier depuis la France. Après tout, il existe depuis bien avant mon séjour au Japon, il n’a pas de raison de mourir. Je laisse donc le Japon, en ce 15 juin 2010 très ensoleillé, entre les mains de M. Kan, en espérant qu’il réussisse à sortir le Japon de cette crise et redonne lui un peu de stabilité politique. Je prends l’avion dans quelques heures, mais avant, j’ai juste envie de lui dire « Yes We Kan ».