Un fil conducteur, Marie Cogère, professeur en langue amérindienne à l’université Nowu part pour la belle saison au pays de son enfance : A-t-on idée, pensa-t-elle de passer des vacances estivales à douze cents kilomètres de la civilisation ? Loin du Museum of Modern Art, du National Museum of American Indian ? Loin des hommes les plus attirants, des meilleurs restaurants, des boutiques les plus sophistiquées ? A-t-on idée de quitter New York, l’état de New York ? Mais Marie Cogère aimerait bien vendre la maison paternelle. Un colloque à Harvard en septembre, dont elle sera une des conférencières la fera patienter son exil.
«L’autobus roula durant quatre heures et dix-sept minutes, soit quatre cent soixante-quinze kilomètres, dont les deux tiers dans une forêt d’épinettes noires, essence formant quatre-vingts pour cent du couvert végétal de cette région dont l’immensité rappelait un continent. Elle n’était pas revenue pour s’y installer, pas question de se terrer en banlieue du continent, en périphérie de la pensée, de l’art et du savoir.»
L’auteure nous présente les voisins du 64 Mgr-Bourget, village Des Rangs, la famille Lambert et ses quatre fils, Ric, Éric et Ulric qui avait quitté le village dans des conditions plutôt curieuses et finalement Bénédic dit le philosophe. En alternance, entre ce village de bord du fleuve et la mégalopole, on rencontre Pedro et sa petite amie Lolita, et leurs jumeaux de trois mois Jerry et Jimmy, des êtres attachants, cherchant désespérément, également, un ailleurs, un bonheur.
Récipiendaire du prix Robert-cliche 2010, un court roman presqu’un recueil de nouvelles, qui explore tour à tour ces différents personnages. J’aurai sûrement une petite pensée pour Éteignez, il n’y a plus personne, titre tellement pertinent, en effleurant au passage un de ces villages dépeuplés de la Côte-Nord ou de Gaspésie. Un propos singulier, une réflexion plutôt défaitiste, mais combien réaliste, une plume très personnelle, une langue recherchée, enjouée, colorée. Un petit plaisir.