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Tea Party, rejet de la classe politique

Publié le 01 novembre 2010 par Copeau @Contrepoints

Tea Party, rejet de la classe politique

L’article de Janet Daley dans le Sunday Telegraph vaut la peine d’être lu. Elle met en évidence un point que de nombreux commentateurs non Américains ont raté, à savoir que les participants à la Tea Party sont à peu près aussi fâchés avec la vieille garde du parti républicain qu’avec les gaspilleurs démocrates.

Il était largement compris en Europe que la gauche américaine haïssait George Bush pour son aventurisme militaire. Ce qui n’était pas bien compris est que la droite le détestait au moins autant pour avoir vendu son âme sur la dépense étatique, sur le sauvetage des banques et pour n’avoir pas gardé la foi dans le principe républicain fondamental de contenir le pouvoir du gouvernement central.

En effet, c’était dans ce contexte que j’avais pris la décision qui, plus que toute autre, a enragé les lecteurs de mon blog: apporter mon soutien à Obama en 2008 (même si, deux prodigalités plus tard, j’ai admis m’être trompé).

« Ça vaut aussi la peine de regarder autre chose« , nous dit Janet. Elle écrit que « Cette fois-ci, l’oppresseur haï de la Tea Party n’est pas un gouvernement colonial étranger (référence à l’originale de 1773, NdT), mais leur propre classe politique. » La plupart des Américians, et de fait la plupart des Britanniques, se rappellent la guerre américaine d’indépendance en ces termes. Mais presque personne ne voyait les choses comme ça à l’époque.

Les meneurs patriotes dans les années 1760 et au début des années 1770 ne se percevaient pas comme des révolutionnaires, mais comme des conservateurs : tout ce qu’ils demandaient, dans leur esprit, étaient les droits qu’ils tenaient pour des dûs en tant qu’Anglais nés libres. L’idée qu’en 1773 la Grande Bretagne représentait un « gouvernement colonial étranger », aurait frappé la plupart des Américains, loyalistes ou patriotes, comme une absurdité. Et de fait, une des réclamations qu’ils ont exprimé avec le plus de colère dans la Déclaration d’Indépendance, était que George III avait utilisé des soldats « étrangers » (c’est à dire, non Britanniques) contre eux.

Les participants au Tea Party historique de Boston, tout comme leurs successeurs d’aujourd’hui, se soulevaient contre leur propre classe politique, à commencer par celui qui avait la malchance d’être gouverneur du Massachussets, Thomas Hutschinson. Ils le faisaient au nom d’une série de libertés dont ils croyaient que leurs ancêtres les avaient assurées pour tous les Anglais, des libertés qui remontaient au Bill Of Right, et même à la Grande Charte, en allant jusqu’au droit traditionnel que constitue la Common Law Anglo-Saxonne.

Il vaut la peine de noter que l’opinion publique en Grande Bretagne, pour autant que nous puissions le mesurer, était de façon écrasante favorable aux réclamations des colons. En extrapolant à partir des données disponibles, circulation des journaux, résultats des élections, pétitions au parlement, les historiens estiment que seulement un tiers de la population de la mère patrie soutenait la politique de coercition ; à peu près la même proportion que les Tories dans les colonies elles-mêmes (voir ici).

De nombreux officiers Britanniques envoyés en service aux Etats Unis ont refusé le poste; ceux qui ont accepté ont eu tendance à remplir leur mission sans enthousiasme. Sir William Howe a pris le commandement des forces gouvernementales après que trois autre généraux aient décliné, et, alors même qu’il donnait ses ordres dans les règles de l’art, il ne ressentait aucun enthousiasme pour une guerre contre ses propres concitoyens.

La révolution américaine se comprend mieux dans des termes que ses protagonistes eux-mêmes auraient reconnus : comme une guerre civile à l’intérieur d’une même population. Ce n’est qu’une fois la rupture devenue irréversible qu’elle a été interprétée, rétrospectivement, comme un soulèvement national, une « guerre d’indépendance ».

Ce point mérite d’être souligné parce que, jusqu’à nos jours, certains commentateurs des deux côtés de l’Atlantique tendent à voir l’existence d’un mouvement populaire anti-impôts comme une fonction de l’exceptionnalisme Américain, quelque chose qui ne pourrait pas se produire autre part.

Mais la Grande Bretagne a elle aussi une longue tradition de mouvements anti-impôts, de l’opposition à la capitation dans les années 1380 à l’opposition à la capitation dans les années 1980. C’est une révolte de contribuables dans la Grande Bretagne du XVIIIème siècle, pas dans les 13 colonies, qui a démarré la révolution américaine. La guerre de sept ans avait poussé les taxes vers le haut à hauteur de 20 shillings pour le Britannique moyen, contre six pence pour le colon moyen. C’est la déterminaiton des députés de Westminster d’étaler ce coût au delà de leur propre électorat qui a mené, à terme, à la cassure.

Aujourd’hui encore, pour autant que je puisse dire, mes électeurs préfèreraient payer moins d’impôts. Nos contributions forcées à l’Etat sont, pour la plupart d’entre nous, de loin le plus gros poste du budget de notre ménage. Quand j’ai tenu une Tea Party expérimentale dans la circonscription la plus à gauche du pays, Brighton Pavilion, maintenant représentée par mon amie Caroline Lucas, la seule députée verte, c’était plein à craquer : on a du ouvrir une salle attenante, et même avec ça il y a des gens qui n’ont pas pu rentrer.

Non, la seule raison pour laquelle la Tea Party est un phénomène uniquement Américain, c’est que les primaires ouvertes sont uniquement Américaines. Les électeurs ont un mécanisme pour faire entrer au pied de biche leurs opinions dans le corps législatif. Laissez les gens des autres pays, eux aussi, choisir qui devrait être leur candidat, et toutes sortes de points de vue pourraient commencer à se voir exprimés au parlement. Je l’ai déjà dit dans le passé et je le redis encore : il est temps de rapatrier notre révolution.

Un article repris du blog de Daniel Hannan hébergé par le Telegraph, avec l’aimable autorisation de son auteur.


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