En gros, il s’agit de la campagne Advanced Dungeons & Dragons niveaux 18 – 1000 de base mais version anime : c’est plutôt cliché tout le long mais pas si manichéen que ça, et puis le scénario propose quelques coups de théâtre plutôt bienvenus… J’aurais apprécié plus de développement psychologique chez les personnages dont certains sont carrément occultés à ce niveau-là, pour ne pas dire franchement stéréotypés – comme le magicien ou le clerc, voire le voleur…
Si les personnages sont au nombre de six, le focus se fait sur le chevalier Parn (1), sa copine elfe Dido et dans une certaine mesure le nain Ghim – qui transporte sa part de tragique, au passage. Et parmi ces trois-là, l’histoire se concentre surtout sur Parn, qui souhaite reprendre le flambeau de la chevalerie pour faire honneur à la mémoire de son père disparu lors d’une guerre précédente en combattant au nom du roi, et sur sa relation avec Dido, qui redouble d’ardeur pour s’attirer les faveurs de l’aspirant-chevalier mais celui-ci n’a pas l’air de la voir, tout obsédé qu’il est par sa quête personnelle – et pourtant elle est charmante : quand je parlais de clichés…
Le problème principal de la narration est qu’elle se montre un peu confuse, mais à partir du moment où on sait que cette production se réclame plus de Donjons & Dragons que de Tolkien, ça passe assez bien. Il y a ce qu’il faut de combats – qui tombent souvent un peu du ciel d’ailleurs : quand je disais AD&D, le scénariste donne toute l’impression d’avoir été un Dungeon Master qui usa et abusa des tables de rencontres ; voir les notes en fin de billet pour plus de détails – des combats et donc ce qu’il faut d’action pour garder le spectateur accroché à l’histoire, mais on y trouve aussi un minimum de sentiments et de développement psychologique pour plaire à un public plus « féminin » si je peux dire… On aurait aimé en voir un peu plus sur ce plan, ou en tous cas qui concerne davantage de personnages parce-que l’ensemble reste bien peu satisfaisant au niveau du développement psychologique mais bon, c’est quand même assez « court » pour une série et relativement « long » pour une OVA – 13 épisodes quand même – de sorte qu’on peut pas trop en demander non plus.
Le bestiaire est bien fourni et on retrouve avec plus ou moins de bonheur l’ensemble des monstruosités classiques du genre illustrées de manière assez fidèle mais dans un style graphique plutôt réussi. C’est là le point fort des Chroniques de la Guerre de Lodoss : les visuels sont accrocheurs et bien travaillés, peut-être pour mieux convaincre une audience qui a l’habitude d’illustrations très abouties dans le genre médiéval-fantastique. On ne peut pas en dire autant de l’animation qui est assez simpliste, voire carrément nulle au moins sur le plan technique : on retrouve à foison les glissements de cellulos les uns sur les autres pour donner une illusion de mouvements ou bien des zooms et dézooms sur des détails du décor pour simuler des effets de profondeur ; bref, toutes les techniques décriées dans Les Chevaliers du Zodiaque mais que le spectateur moyen tend à ne pas remarquer, surtout lorsqu’il est habitué aux planches d’illustrations très abouties évoquées plus haut, tout obsédé qu’il est par les petits détails… Si on garde à l’esprit que c’est une OVA, on se dit que le compromis reste correct, surtout pour l’époque de réalisation, mais vers la fin ça commence tout de même à devenir un peu lourd…
Les lieux proposent ce qu’il faut de magie pour être convaincants : ruines brumeuses, paysages fantastiques, châteaux aux architectures démentielles, villages miteux,… Tout comme le bestiaire, Chroniques de la Guerre de Lodoss présente très bien sur ce point précis, ce qui permet de relever considérablement l’ambiance générale sans pour autant tomber dans le contemplatif gratuit – c’est appréciable. Le character design ne prête pas à sourire non plus et, en dépit de certains « stéréotypes » qui ont au moins le mérite du classique, participe beaucoup à l’ambiance : ça devient presque du roman « de cape et d’épée » par moments et ce n’est pas une mauvaise chose.
Avec toutes ces caractéristiques du genre réunies dans une seule et même production d’assez bonne facture pour ne pas déranger ni même susciter le dédain, Chroniques de la guerre de Lodoss se présente comme une réalisation sympathique et assez charmante sous bien des aspects pour offrir un week-end tranquille entre amis rôlistes et/ou fans de médiéval-fantastique classique.
(1) dont le nom ne va pas sans évoquer Le Cycle de Pern d’Anne McCaffrey.
Notes :
Cette OVA est tirée d’une série de romans d’heroïc fantasy qu’écrivit Ryo Mizuno sur la base de travaux développés pour un système de jeu de rôle ; l’intrigue générale suit les grandes lignes et les conventions du système propre au Dungeons & Dragons déjà évoqué à plusieurs reprises, en présentant un groupe de personnages de classes différentes mais lancés dans une même quête. Cette série de romans est disponible en édition française chez Calmann-Lévy (quatre tomes publiés à ce jour).
Chroniques de la guerre de Lodoss, Akinori Nagaoka, 1990
Kaze, 2001
13 épisodes, env. 50 € l’édition ultime intégrale
- un court dossier sur Otaku-Attitude
- l’avis d’AFDS.tv
Cette chronique fut à l’origine publiée sur le site Animeka