En ce jour de Toussaint, j'ai eu envie de rendre un petit hommage à un réalisateur qui est mort il y a tout juste 20 ans, Jacques Demy ; réalisateur, mais également scénariste, dialoguiste, parolier, producteur et acteur.
En tant que réalisateur, Demy est proche de la Nouvelle Vague. On lui doit notamment les films Lola, Peau d'Âne, Une chambre en ville et les Les Parapluies de Cherbourg. Ces quatre derniers sont des films musicaux, tout comme celui dont je vais vous parler dans cet article, Les Demoiselles de Rochefort, sorti en 1967.
C'est avec Les Parapluies de Cherbourg que Demy a connu le plus de succès et, cerise sur le gâteau, la Palme d'Or au festival de Cannes, en 1964. Mais j'ai un petit faible pour les deux jumelles charentaises :
Ceux d'entre vous qui me connaissent ou me lisent régulièrement savent que mes goûts musicaux sont éclectiques, en voici une nouvelle preuve. J'aime ce film pour ses couleurs, son ambiance bon enfant, sa luminosité, son côté kitch et bien sûr sa musique.
Celle-ci est signée par le complice de Jacques Demy (photo ci-dessus) sur presque tous ses films musicaux (sauf Une chambre en ville), le grand Michel, je veux dire Michel Legrand. C'est un des plus talentueux compositeurs de musique de film (et pas que...).
Legrand (photo ci-contre) a composé plus de 200 trames pour le cinéma et la télévision, plusieurs comédies musicales et a à son actif plus de 100 albums. Il a gagné 3 Oscars (sur 13 nominations), 5 Grammys et... aucun César.
Il faut dire qu'il a beaucoup travaillé pour le cinéma américain. Son premier Oscar, il l'a obtenu en 1969 pour la musique de L'Affaire Thomas Crown, avec Steve McQuenn et Faye Dunaway. On y trouve notamment une chanson magnifique, Les moulins de mon cœur (The Windmills of your mind). Si vous êtes amateur de jazz, patientez jusqu'à la troisième minute de la vidéo suivante, vous entendrez une performance au piano :
Legrand a joué et enregistré avec les plus grands jazzmen, Miles Davis, Bill Evans, John Coltrane ou encore Stan Getz. Le voici avec le pianiste québécois Oscar Peterson, presque 10 minutes de pur jazz !
Pour en revenir aux Demoiselles de Rochefort, il y a une autre raison pour laquelle j'adore ce film, c'est sa distribution exceptionnelle. Vous connaissez beaucoup de films qui réunissent des comédiens aussi divers que Catherine Deneuve et sa sœur, disparue trop tôt, la belle Françoise Dorléac, Michel Piccoli, Danielle Darrieux, Jacques Perrin, George Chakiris et surtout Gene Kelly (photo ci-contre).
Ah, Gene Kelly, l'homme aux multiples talents, acteur, chanteur, danseur, réalisateur. Il est probablement, avec Fred Astaire, la personnalité masculine la plus marquante de la comédie musicale hollywoodienne des années 50. Un clin d'œil sympa de Jacques Demy à ce genre cinématographique qui connut un vif succès dans la décennie précédente, notamment grâce à Vincente Minnelli.
Voici la scène où Andy Miller (Gene Kelly) rencontre la belle Solange (Françoise Dorléac) dans les rues de Rochefort.
Le film a été tourné simultanément en français et en anglais. Je n'ai malheureusement pas trouvé d'images de la version anglaise et c'est bien dommage car, dans la version française Danielle Darrieux est la seule comédienne non doublée pour le chant.
Même Gene Kelly, qui avait un emploi du temps trop chargé pour apprendre des chansons en français, a été doublé par un chanteur anglophone dont l'accent entretenait mieux l'illusion que c'était Kelly qui chantait réellement. Quel dommage !!!
Il avait pourtant une superbe voix. Souvenez-vous de la scène qui le rendit immortel :
J'aime beaucoup aussi George Chakiris, un excellent danseur, et sa présence dans ce film constitue un autre clin d'oeil de Demy aux comédies musicales américaines. Il joue le rôle d'un forain débarquant en ville :
Chakiris est également doublé. Pourtant, lui aussi a une belle voix, comme on a pu le constater 6 ans plus tôt dans le film musical le plus célèbre des années 60 :
J'espère vous avoir convaincu de l'intérêt de ce film, souvent dénigré. Quant à moi, si je devais retenir une seule chose, c'est qu'il s'agit de l'avant-dernier film de la superbe Françoise Dorléac (photo ci-contre), le deuxième où elle partage l'affiche avec sa sœur, Catherine Deneuve.
Alors en pleine gloire, elle meurt dans un accident de voiture près de Nice trois mois après la sortie du film. Elle était en retard pour prendre l'avion qui la conduisait à Londres où elle devait assister à la première de la version anglaise du film.
Même si c'est du play-back, je ne me lasse pas de cette scène, avec laquelle je conclurai cet article :