J'avais envie d'écrire sur ces lectures, mes désirs de livres, mais trouver le temps... Et puis, certains l'auront remarqué, j'écris peu à propos de lectures. En fait, il faudrait trouver le temps idéal pour dire, par exemple, les plaisirs effrayants venus de David Peace et de sa tétralogie (1974, 1977, 1980 et 1983) dite The Red Riding Quartet (d'ailleurs portée à l'écran sous le titre The red riding trilogy...). Mais, outre qu'il faut trouver le temps, c'est vachement dur. Pour éviter le pensum d'une analyse de ces histoires de crimes en série dans le nord de l'Angleterre en proie à une crise morale, économique,
Les livres de David Peace sont publiés en France par Rivages Noirs, l'excellente collection dirigée par François Guérif qui accueille aussi le grand James Ellroy à qui, entre parenthèses, Peace a trop souvent été comparé et le magnifique James Lee Burke).
Parmi les livres de la rentrée, j'évite pour l'instant Tokyo ville occupée, le nouveau Peace, suite d'une trilogie tokyoite démarrée avec Tokyo année zero et que je lirai plus tard, quand le dernier volume sera disponible. Je reviendrai alors, je l'espère, à David Peace, à cette noirceur, à ce style qui m'auront accordé une de mes plus belles et authentiques émotions littéraires de l'année.
Histoire de désordonner l'histoire de cette rentrée littéraire commencée pour moi sur un lit d'hôpital, un perfusion plantée dans le bras et qui se terminera, j'imagine, avec un verre au bout de ce bras et un Goncourt (d'ailleurs mérité) pour Michel Houellebecq, je commence la chronique de cette année de lecture prometteuse, non par un livre que j'ai lu et aimé (il y en a déjà plusieurs et pas des daubes), mais par un livre qui reste encore pour moi de l'ordre du pur désir, grâce à la librairie du coin qui, hier, ne l'avait pas (Les tropiques, mon ancienne librairie du quartier où on trouve tout, est loin...).
Je parlerai de temps en temps des livres que j'ai aimés, mais aujourd'hui, ce sera le livre que je vais aimer : Just kids de Patti Smith, 2 € chez Denoël.
Quel rapport avec le livre de Patti Smith ? La jeune femme avait promis à son ancien compagnon Robert Mapplethorpe, alors que celui-ci allait disparaître, de faire un jour le récit de leur histoire commune et singulière, jeunes artistes en devenir dans un New York qui semblait devoir servir de cadre à la réalisation de tous les possibles, Depuis, Mapplethorpe est devenu cette icône vénéneuse de la photographie américaine, sorte de Genet argentique. Patti est devenue cette artiste multiforme qui semble exceller en tout avec la grâce et la modestie des vrais innovateurs et qui, malgré le temps salopard en planque dans les coins sombres, n'a jamais rien renié. Alors, quel rapport entre la sortie attendue de Just Kids et la déferlante des pavés pré-emballés pour être offerts en fin d'année à des gamins boutonneux qui ne lisent pas par des grands parents nostalgiques et maladroits ? Aucun. Aucun rapport, mais je tenais à évoquer ce contexte viral de sorties consacrées à de vieilles stars disparues ou c'est tout comme, au moment même où arrive en France ce Just Kids attendu comme une nouvelle extension de cette littérature américaine que nous aimons tant, ici.
Comme je n'ai pas lu (sinon des extraits en anglais) le livre, je ne vais pas trop m'y étendre. Juste un mot. Je n'y étais pas, on me l'a dit, mais donnant au Théâtre de l'Odéon une lecture de Just Kids, en duo avec sa complice Isabelle Huppert (pour la version française), elle a à nouveau bouleversé et hypnotisé son public. Vers la fin, elle s'est, parait-il, envolée vers des sommets de poésie et d'émotion avec une version a capella de Because the night. Je me contenterai de vous offrir (ce n'est pas très original) la version en studio de cet hymne emblématique écrit pour Patti Smith par Bruce Springsteen.
Et deux photos :
Deux portraits de Patti Smith par Robert Mapplethorpe.
Celui de droite est le plus célèbre.
Quelques photos sur un site bien foutu consacré à Rob. Mapple
(qui a également signé la pochette de l'album Horses).
A LIRE
pour ceux qui aiment la littérature américaine
Les inrocks 2 permettent de réchauffer, après un reclassement thématique, des articles déjà publiés par le magazine, ce qui est parfois une grande idée. C'est le cas pour cette livraison dont le Festival America de Vincennes, cette année en présence de quelques figures de tout premier plan de la jeune et moins jeune littérature américaine (Ellis, DeLillo, Mc Inerney, James Grady...) a été le prétexte.
Le choix a été fait de présenter la littérature américaine à travers 20 de ses représentants. La talentueuse Nelly Kaprielan s'exprime ainsi : "Vingt figures qui ont scruté les cahots de leur époque et ont contribué à la décrypter. A la croisée des lettres et de la pop culture, à travers eux ce sont les contours d'un territoire qui se dessinent. Un territoire qui nous parle de l'Amérique d'hier et d'aujourd'hui. Mais aussi des travers, du tumulte et du génie du monde contemporain".
Le choix de 20 auteurs, dans une littérature aussi riche que les hamburgers, prête forcément à la critique : pourquoi celui-là et pas celle-ci ? Personnellement, je regrette l'absence de Paul Auster et de Siri Hustvedt, peut-être même de Laura Kasischke. Mais pour l'essentiel, ceux qui ont été choisis comme les Géants de la Littérature américaine (contemporaine, doit-on ajouter, sinon, comment justifier l'absence de Faukner, de Dos Passos parmi les Géants ?) ont leur place dans ce Panthéon : de J. D. Salinger à R. Brautigan, de Ph. Roth à J. Didion, de Toni Morrisson à Jim Harrison, en passant par J. Kerouac, D. DeLillo, l'immense R. Carver, J. Ellroy et B. E. Ellis (ça y est, j'ai réussi à placer mes préférences).
Le plus souvent passionnant, le mag est accompagné d'un CD comportant des choses émouvantes (la voix de Kerouac) et des hommages de la scène rock à ses figures totemiques.