Les cinéphiles ne vont pas admettre que je donne 4 étoiles à ce film et que je ne m'extasie pas devant les Amours imaginaires de Xavier Dolan. Disons que c'est une question d'ambition et de simplicité.
Il s’agit en résumé des aventures sentimentalo-rocambolesques inspirées de la série best-seller de C. D. Payne Youth in Revolt. On suit un adolescent amoureux lancé sur les traces de Sheeni, la fille de ses rêves rencontrée dans un camping, qui s'invente un double pour se donner le courage de la séduire. Ce garçon maladroit apprendra à se connaître en essayant de devenir un autre.
Nick Twisp (je ne suis pas spécialiste de sémantique américaine mais je flaire le jeu de mots dans ce patronyme) construit ce « double » pour répondre aussi bien à l’idéal masculin de Sheeni qu’à la projection qu’il se fait du séducteur idéal, qui pourrait être un jeune français des années soixante. Il lui donne le prénom de François, le nom du braqueur de banque Dillinger (interprété par Johnny Depp dans Public Enemies de Michael Mann), lui fait porter la moustache à la Patrick Dewaere, l’habille comme jacques Dutronc, lui met dans la poche le paquet de cigarettes de Serge Gainsbourg et lui fait prendre des airs de dandy qui aurait été un mauvais garçon dans une autre vie.
Bien entendu c’est le même acteur qui interprète les deux rôles. C’est un régal de voir Michael Cera passer de l’un à l’autre avec agilité. On avait déjà pu le voir en 2007 dans le rôle du petit ami d' Ellen Page dans Juno ou encore dans SuperGrave. Il tient également cette année le haut de l'affiche de la superproduction Scott Pilgrim vs. the World.
Sa partenaire, Portia Doubleday, joue une adolescence raide dingue des artistes français et de la culture française. Là encore c’est un régal (nombriliste je l’accorde) de l’entendre citer le cinéma de la nouvelle vague, et fredonner des airs familiers de notre propre adolescence (enfin je parle pour moi). On reconnait Bang bang de Sheila, dans la version originale de Dalida, et puis Brigitte Bardot dans une chanson qu’on ne se souvient même pas soi-même d’avoir entendu.
Cela nous change de la trop caricaturale image du gaulois en béret avec sa baguette sous le bras. C’est même plutôt flatteur de passer pour un peuple intellectuel, surtout dans un film qui est une vraie comédie. Je préfère les discrètes mais claires références à la vague Belmondo que les citations appuyées de Xavier Dolan. Les bons divertissements se font rares et quand on en trouve un on a envie d’applaudir.
Le film intègre de belles séquences animées qui apportent une fantaisie supplémentaire aux génériques et à quelques scènes de transitions.
On ressort de ce film attachant avec un regard plus tendre envers la jeunesse et les quatre cents coups qu’elle réinvente à chaque génération. On est prêt à lui pardonner toutes (presque) ses bêtises … peut-être moins à tendre les clés de sa voiture. Ceux qui sont allés voir le film comprendront !
Je suis allée voir le film dans une des rares salles qui le programmaient encore, loin de l’agitation élyséenne.
C'était le beau et confortable cinéma Jean-Vilar, 1 rue Paul-Signac, 94110 Arcueil - 01 41 24 25 50.
On devrait penser davantage aux équipements de la banlieue, souvent excellents et à des tarifs très compétitifs.