the social network, ou la revanche du geek

Publié le 29 octobre 2010 par Bix

Séance Facebook hier, pour le dernier film de David Fincher : the social network ou la vie romancée de Marc Zuckerberg à partir de 2003.

Avant tout, avant de parler de Facebook ce film nous parle d'Harvard et sa société ultra codée et hiérarchisée, avec ses groupes fermés aux traditions de bizutage à la con, ses fraternités aux lettres grecques... Des références déjà vues et connues puisque souvent citées dans le cinéma américain pour les teens. Il est toujours étonnant que de cette société figée ait pu venir un outil de prise de contact quasiment universel, même si les frontières en ligne rejoignent celles de de la "vraie vie".

Ensuite, certes le film a comme sujet central la création de Facebook, qui a pris aujourd'hui une place centrale non seulement sur le web mondial mais aussi et surtout dans la vie quotidienne de centaines de millions de personnes, mais il est surtout un film qui parle de certains des bouleversements auxquels Internet contribue. David Fincher a fait le choix de se concentrer sur une histoire, celle de la success-story Zuckerberg.

The social network, c'est la prise du pouvoir par le geek, voire le nerd. Pourquoi ? Parce qu'il code, donc c'est lui qui fait. Donc c'est lui qui contrôle. C'est la période de la béta permanente, du test qui n'en finit pas : un site, tout comme un logiciel, n'est en effet jamais fini. Une critique Le Monde / Internet Actu résume assez bien ce changement de comportement :

Le personnage de Zuckerberg incarne un autre modèle. Lui sent qu'il y a quelque dans l'idée d'un réseau social d'étudiants de Harvard. Mais il ne commence pas par un business modèle, il se met derrière son ordinateur et il aligne du code, seul ou presque dans sa petite chambre. Il y passe ses journées et ses nuits. Certes il a besoin d'un peu d'argent pour louer de la bande passante, mais la préoccupation économique s'arrête là. Un jour, il appuie sur un bouton, et le site est lancé. Il n'y a aucune industrie derrière, il n'y a rien à construire, c'est le public qui va faire Facebook.

Changement d'époque, de comportements... et de puissance économique. Le dialogue entre Sean Parker (fondateur de Napster) et Eduardo Saverin, lors d'un dîner mémorable (qualifié plus tard de "Seanothon" par Eduardo) résume assez bien ce qui s'est passé dans les années 2000, quand le nouveau monde d'internet prenait le pas sur l'ancien monde. Saverin, qui n'aime pas beaucoup Parker, lui rappelle qu'il a perdu contre les majors du disque. Parker répond[1] : Oui, au tribunal. mais tu achèterais du Tower Records toi ?

Sean Parker flambe, couve Zuckerberg... là ou Saverin cherche des... annonceurs. Alors que la pub, it ain't cool. On sait que Facebook gagne de l'argent grâce aux annonceurs, mais plus grâce à du ciblage à la Google qu'avec du pop-up digne des 90s. Oui, à la fin, les financiers sont là, mais les codeurs gardent la main. Zuckerberg "is the CEO, bitch".

Cinématographiquement parlant, c'est filmé par David Fincher alors forcément, c'est propre et bien dirigé, bien réalisé. Je ne sais pas si on a enfin trouvé la bonne manière de filmer l'informatique en général et Internet en particulier, mais ça fait beaucoup de bien de sortir des délires à la Opération Espadon ou même de l'informatique de Jack Bauer. Enfin on a quelque chose de beaucoup plus crédible, voire carrément réaliste. J'essaie de ne pas laisser mon côté geek s'enflammer pour le fait d'avoir entendu les mots "php", "Emacs" ou d'avoir vu les vieux designs de KDE, mais c'est pas facile.

Ça ne restera sans doute pas comme un grand film mais il a le mérite de porter à l'attention du grand public un type de personnage (le geek, le programmeur) encore bien trop souvent caricaturé, tout comme son domaine (l'informatique, le code, et la culture afférente). Si vous me le permettez, je vais le ranger du côté de L'auberge espagnole, au rayon des films générationnel qui rendent bien compte d'une ambiance d'époque.

Notes

[1] citation de tête, vous m'excuserez si je me trompe